Une philanthropie pas comme les autres
Cette nouvelle revue de la presse tchèque s’intéressera d’abord à un cas de philantropie peu commun. Deux sujets politiques sont également à son menu : le congrès de l’ODS, principal parti de droite dans l’opposition, et les tentatives de la gauche de reprendre un nouveau souffle. La Tchéquie est loin d’être un pays égalitaire : explication également dans ce magazine. Les étudiants slovaques en médecine en Tchéquie et les problèmes qu’ils risquent désormais d’affronter sera un autre sujet traité.
Quel est l’événement le plus important à relever ces derniers jours en Tchéquie ? Est-ce la fin du ministre des Transports ou encore le congrès du Parti civique démocrate (ODS) ?, s’interroge le commentateur du site aktualne.cz avant de répondre par la négative. Pour lui, il s’agit de la création de la plus importante et la plus grande fondation privée, Experimentia, et ce notamment dans une perspective longue :
« La fondation est l’œuvre des époux Hana et Dalimil Dvořák qui ont décidé de consacrer 200 millions de couronnes afin de soutenir la recherche. Cette somme provient de l’argent des brevets sur d’importants produits antiviraux, issus du laboratoire du professeur tchèque reconnu Antonín Holý. A l’annonce de cette décision, les médias ont mis notamment l’accent sur l’altruisme des époux. Non moins important est toutefois le message qui en ressort et qui dit que les moyens dédiés à la science ne doivent pas être disséminés et qu’il faut les consacrer à des disciplines spécifiques. La nouvelle fondation mise en effet uniquement sur la chimie organique, bioorganique et la médecine. »
L’autre message à retenir, selon le commentateur du site aktualne.cz, est que le soutien de l’Etat à la science est insuffisant. « Il n’est pas possible qu’un éventuel prochain prix Nobel de chimie soit uniquement le fruit de l’apport d’une fondation privée de philantropes », remarque-t-il.
L’ODS aux temps de l’inertie
Le congrès du Parti civique démocrate (ODS), principale formation de droite du pays fondée en 1991 par Václav Klaus, devenu plus tard Premier ministre et président de la République, n’a pas apporté de surprise. C’est le constat dressé par la plupart des commentateurs à l’issue du congrès de samedi dernier de ce parti d’opposition dont les préférences politiques tournent aujourd’hui autour de 12 %. Le quotidien Lidové noviny a indiqué à ce propos :
« Réélu président du parti, Petr Fiala est l’unique chef de l’ODS qui n’a jamais été Premier ministre. Et comme l’a montré le dernier congrès du parti, il ne le sera jamais. L’ODS n’a pas la volonté et peut-être même pas la capacité de gagner les élections ou du moins de devenir un éventuel parti fort de coalition. Son plus grand problème, c’est que la majorité de ses représentants sont désespérément ennuyeux et dépourvus d’élan. Il n’est donc guère étonnant que peu de personnes croient que le parti puisse prochainement battre le mouvement ANO d’Andrej Babiš. »
Le journal Deník N remarque pour sa part l’absence de femmes au sein de la direction de l’ODS, une situation « dont elles ne sont pas responsables, mais qui à mettre sur le compte des dirigeants du parti », écrit-il. L’hebdomadaire Respekt a remarqué de son côté :
« Lorsqu’à l’avenir, on s’interrogera sur la raison pour laquelle Andrej Babiš a si longtemps dominé la politique tchèque, cette question fera partie des sujets les plus excitants de thèses et de travaux scientifiques. On peut chercher une réponse, aussi partielle et imprécise soit-elle, dans le congrès de l’ODS. Tout en déclarant sa volonté de remporter les prochaines élections législatives, ses participants n’ont manifesté que peu d’idées inédites et de détermination. On avait l’impression de se retrouver dans une rencontre d’anciens étudiants qui, à part avoir grossi et vieilli, sont demeurés les mêmes. »
Une gauche qui se cherche
Sale temps pour les sociaux-démocrates et les communistes. Voilà pourquoi on voit se multiplier dans la gauche, des débats sur la nécessité de créer un nouveau parti moderne et dynamique qui serait à même d’attirer non seulement les électeurs traditionnels de la gauche, mais aussi la partie plus libérale de la société. Deux formations qui sont en train de se constituer et qui s’appellent La gauche authentique (Skutečná levice) et le mouvement L’Avenir (Budoucnost) déclarent leur volonté de satisfaire de telles attentes. Le journal en ligne Deník Referendum a écrit à ce propos :
« Pour les observateurs de la vie politique locale, il existe dans le spectre politique actuel un espace pour un parti de gauche moderne. Cela dit, ces mêmes observateurs ne croient pas aux chances de succès d’une de ces nouvelles formations. Tant que la social-démocratie sera sur la scène politique présente, un nouveau parti aura du mal à s’imposer. On peut aussi s’attendre à ce que le reste de ses électeurs se tourne vers le mouvement ANO d’Andrej Babiš. Si un nouveau parti veut s’imposer, il devra trouver le moyen de faire front au populisme de ce dernier. »
« De toute façon, ceux qui voudront mettre sur pied un nouveau projet appelé à donner à la politique de gauche un nouveau souffle auront du travail devant eux », conclut le commentateur.
La Tchéquie, un pays égalitaire ?
Dire que la Tchéquie est le pays le plus égalitaire au monde ne correspond pas à la vérité. L’article intitulé « Les plus grosses fortunes entre Moscou et Berlin ou bien comment les oligarques modifient la société tchèque », publié dans la dernière édition du magazine Echo, explique pourquoi :
« La société tchèque n’enregistre pas de fortes différences entre les biens et les revenus de la majorité de ses habitants. D’un autre côté, nulle part ailleurs en Europe, les différences entre les patrimoines ne sont aussi marquantes qu’en Tchéquie ce qui n’est pas forcément bénéfique pour le pays. »
Le magazine rapporte que dans nul autre pays post-communiste à l’ouest de la Russie et à l’est de l’Allemagne on ne voit autant de personnes richissimes comme en Tchéquie. Sur une trentaine de milliardaires, à compter en dollars, on trouve dans cette région huit qui sont actifs en Tchéquie. La liste Forbes compte d’ailleurs dans la première dizaine des grosses fortunes à au moins trois milliards de dollars quatre Tchèques, quatre Kazakhs, un Ukrainien et un Géorgien.
L’enseignement supérieur vu sous deux angles différents
Selon le quotidien économique Hospodářské noviny, l’université Palacký d’Olomouc est le premier établissement de l’enseignement supérieur tchèque à donner des cours en dehors du pays. C’est dans la ville d’Erbil, capitale du Kurdistan, qu’elle a mis sur pied un programme d’études pour ingénieurs pétroliers, en attendant d’y proposer à l’avenir d’autres options : la médecine, le droit international, la stomatologie, l’anglais ou la musique.
Toujours à propos de l’enseignement supérieur, le quotidien Deník N s’est penché, quant à lui, sur une démarche envisagée en Slovaquie qui risque de porter un grave préjudice au système de santé publique tchèque qui dépend dans une grande mesure de la présence de médecins slovaques :
« Un des points du programme du plus fort parti gouvernemental slovaque SMER, en prévision des élections législatives de février prochain, a pour but d’empêcher le départ des jeunes médecins slovaques à l’étranger, dont beaucoup se rendent en Tchéquie. Une façon radicale d’améliorer la qualité de la santé publique du pays en manque d’effectifs. Ainsi, les diplômés auraient à choisir entre un séjour ‘forcé’ de dix ans en Slovaquie et une pénalisation de près d’un million de couronnes (l’équivalent de quelque 40 000 euros). »
Les Slovaques qui décident d’étudier la médecine en Tchéquie y bénéficient d’études à titre gratuit. Selon les évaluations de l’Ordre national des médecins, le nombre de jeunes Slovaques diplômés chaque année en médecine en Tchéquie varie autour de 200. Tandis qu’une certaine partie d’entre eux reste sur place, d’autres reviennent dans leur pays d’origine. A la lumière de ces constats, le commentateur de Deník N prétend que la démarche envisagée par le parti de l’ancien Premier ministre slovaque Robert Fico se présente comme « un paradoxe ».