Zuzana Paroubkova et le féminisme

Zuzana Paroubkova, l'épouse du Premier ministre tchèque, photo: Jakub Ludvik
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On entend rarement parler de Zuzana Paroubkova, épouse du Premier ministre Jiri Paroubek, sauf quand il s'agit par exemple de ses activités en faveur des enfants abandonnés, malades, handicapés ou autres activités caritatives... Préférant se tenir à l'écart des projecteurs, elle a fait pourtant beaucoup parler d'elle cette semaine. Ce sont ses paroles à propos du rôle à jouer par les femmes dans la politique qui ont provoqué un véritable tollé, dans les rangs des féministes tchèques notamment. Le quotidien Mlada fronta Dnes publie dans son édition de ce mercredi un « duel » verbal entre Zuzana Paroubkova et Olga Sommerova, réalisatrice de films documentaires à succès, connue pour sa défense inlassable de la « cause féminine ».

Zuzana Paroubkova avec Livia Klausova,  photo: CTK
Les hommes sont mieux disposés que les femmes à faire de la politique, du fait que celles-ci ont pas mal d'autres préoccupations. C'est dans cet esprit que Zuzana Paroubkova s'est exprimée dans une récente interview télévisée... Ceci dans un contexte où les femmes tchèques ne sont que très faiblement représentées dans la haute politique : deux femmes au sein du cabinet tchèque de dix-huit membres, moins de 18 % des femmes au sein de la Chambre basse et quelque 11 % de femmes au sein de la Chambre haute du Parlement tchèque.

Il n'étonne guère que ces paroles ne soient pas passées inaperçues. Les réactions les plus négatives ont retenti dans le camp des féministes tchèques. Alena Kralikova, directrice de l'organisation Gender Studies, va jusqu'à prétendre que de tels propos ne seraient pas pensables « dans des pays civilisés de l'Union européenne ». Selon la réalisatrice Olga Sommerova, « toute personne émancipée sait que la société a besoin d'une influence féminine directe sur la gestion du monde malade ».

Olga Sommerova
Olga Sommerova et Zuzana Paroubkova ont accepté le jeu proposé par le quotidien MfDnes leur permettant de s'interviewer mutuellement et d'offrir une confrontation de deux vues différentes sur la vie et sur la femme. Une confrontation à l'amiable quand même et qui permet d'éclaircir plus en détails leurs positions.

L'épouse du Premier ministre affirme d'abord de ne pas s'opposer aux efforts des femmes d'entrer dans la politique. D'ailleurs, dans un démenti publié au lendemain de son interview par le bureau du gouvernement, qui est une réaction à l'étiquette qui lui avait été collée, elle développe son idée en disant qu' « une plus grande représentation des femmes dans la politique serait souhaitable, compte tenu de la différence entre les approches des femmes et des hommes ». Ce qu'elle veut pourtant souligner c'est que la position de la femme est ailleurs, dans la famille notamment. Je cite :

« Il faut que les enfants aient devant leurs yeux deux modèles, celui de l'homme et de la femme, qui sont importants pour leur bon épanouissement... Dans une famille traditionnelle, le rôle de la femme est irremplaçable. C'est elle qui forme les enfants, par son exemple, son amour, sa patience, son dévouement, son sens de la justice et son respect envers les autres ».

Zuzana Paroubkova insiste en même temps sur ce qu'il est nécessaire « de donner aux femmes la chance d'influencer l'état du monde ». Et d'ajouter : « Je vois la femme et l'épouse en tant que partenaire égale de l'homme ».

C'est en revanche le féminisme qui est le principal thème des questions que Mme Paroubkova pose par l'intermédiaire du journal MfDnes à la cinéaste Olga Sommerova. Celle-ci s'explique :

« L'ambition du féminisme est d'offrir la liberté et la démocratie à tous, aux femmes et aux hommes, de faire revenir à la normale le monde, détourné par le système patriarcal. Il aspire à donner aux femmes les chances qu'elles n'avaient pas pendant des milliers d'années, histoire de s'épanouir comme des êtres libres... Il libère les femmes de la dépendance économique des hommes... Les féministes, hommes et femmes, souhaitent que les femmes participent à la gestion du monde, y contribuant avec une expérience existentielle et un système de valeurs différent ».

Quelles qualités appréciez-vous chez les hommes ? A cette question, Olga Sommerova qui, outre son travail de cinéaste, s'est fait remarquer grâce à plusieurs livres publiés sous un titre unique « De quoi rêvent les femmes? » et retraçant à travers des interrogatoires très intimes les parcours de dizaines de femmes de milieux et de destins différents, répond :

« J'admire l'esprit de décision qui est propre aux hommes, mais plutôt dans des choses techniques et stratégiques que dans les relations humaines. Je reconnais les scientifiques, les chercheurs, les médecins, les sapeurs-pompiers, les pilotes, les alpinistes, les plongeurs, les soldats. J'aime le courage des hommes... J'aime l'intelligence masculine... J'aime les hommes pleins d'esprit... Et, finalement, il ne faut pas oublier qu'un vrai homme est toujours tendre ».

La question de la représentation des femmes tchèques dans la politique devient d'actualité avec l'approche des élections législatives qui auront lieu dans moins de six mois. Le Premier ministre, Jiri Paroubek, quant à lui, prétend vouloir engager plus de femmes dans la politique. Une tâche difficile : son parti, la social-démocratie, ne compte parmi ses membres qu'un tiers de femmes et les listes des candidats aux prochaines législatives leur donnent, en plus, peu de place... Cette situation est plus ou moins pareille dans les autres partis, à l'exception du Parti des Verts qui donne les mêmes opportunités aux femmes et qui espère franchir pour la première fois de son histoire la barre des 5 %, ce qui lui permettrait d'entrer au Parlement. La « carte féminine » s'annonce ainsi peut-être comme une bonne carte à jouer.