A Brno, la course aux astéroïdes est lancée
A Brno, des scientifiques tchèques préparent un projet unique dont l’objectif est de développer des technologies capables de cartographier les richesses minérales de l’espace pour ensuite les exploiter.
Le programme, baptisé mission Slavia, a d’ores et déjà obtenu le soutien de l’Agence spatiale européenne. Pour l’heure, seules des entreprises et institutions tchèques participent au projet. Petr Kapoun, le directeur de la société SAB Aerospace à Brno, qui supervise l’initiative, dévoile les enjeux de cette nouvelle aventure spatiale :
« L’exploitation des astéroïdes est récemment devenue un sujet de premier plan et elle le sera sûrement d’autant plus dans dix ou quinze ans quand nous disposerons de la technologie de pointe nécessaire. Nous avons longuement étudié la rentabilité de l’exploitation des astéroïdes avant de nous lancer dans une telle mission. »
La composition des astéroïdes sera analysée par des caméras multispectrales
Les apports techniques et scientifiques potentiels d’un tel programme ont finalement convaincu les chercheurs tchèques de mener à bien ce projet. Selon Petr Kapoun, les astéroïdes peuvent renfermer des éléments que nous connaissons sur Terre, tels que des métaux précieux, mais aussi des matériaux chimiquement beaucoup plus avancés.
« Il existe dans l’espace une ceinture d’astéroïdes et de temps en temps de minuscules fragments s’en détachent. Ces derniers, quand ils dévient vers la Terre, se consument dans l’atmosphère. De la matière s’échappe alors. Une caméra multispectrale serait capable de repérer ces éléments qui brûlent dans l’atmosphère et de déterminer leur composition. Notre ambition serait de mettre en orbite autour de la Terre deux satellites qui compareraient tous les débris incandescents dans l’atmosphère. Nous pourrions alors également définir la provenance de ces débris et ainsi créer d’ici quelques années une carte des ressources de l’espace. Une fois que nous en bénéficierons, tout nous semblera plus familier. Nous serons capables de dire : ‘si vous voulez cette matière ou ce minéral, allez par ici, ou si vous cherchez telle autre chose, alors allez par-là’. Ce projet permettra donc de simplifier et de réduire les coûts des autres missions. Il ne sera dès lors plus envisageable de se poser quelque part sans savoir au préalable s’il y a quelque chose à exploiter. »
Comment tout cela est-il réglementé d’un point de vue juridique ? Qu’en est-il si plusieurs pays revendiquent l’exploitation d’un même astéroïde ?
« Il existe un accord international qui fonctionne de la même manière que celui pour la Lune. Certains Etats ont des revendications plus larges que d’autres, mais chaque pays a le droit de mettre le cap sur la Lune et de s’y poser. Selon la législation, le premier arrivé n’est pas pour autant le propriétaire des lieux. Les richesses de l’espace sont pour le moment partagées. Il s’agit plus de savoir quel pays s’y rendra et en profitera. L’espace suscitant, cependant, un intérêt grandissant, nous ne pouvons prédire quelle sera la situation dans dix ou quinze ans ou quel sera le rôle joué par la législation. Mais nous n’en sommes pas encore là pour le moment. »
Le satellite Slavia intégrera des équipements de haute technologie
Pour l’heure, seules des entreprises et des institutions tchèques prennent part au projet. Ce dernier pourrait ainsi devenir la première mission exclusivement tchèque de l’Agence spatiale européenne.
« L’industrie spatiale tchèque fournissait jusqu’à présent principalement du matériel, telles que des pièces de fusée ou de satellite pour diverses missions étrangères. C’est cependant la toute première fois que nous concevons notre propre mission. Il ne s’agit donc pas simplement de fabriquer des équipements, nous devons aussi par la suite envoyer les satellites dans l’espace, les exploiter et en retirer des données. Le projet est de ce fait en tout point exceptionnel. Une étude approfondie vérifiera si tout ce que l’on élabore fonctionne. La mission durera douze mois et, si tout se passe comme prévu, nous devrions être en mesure de développer les satellites et de les mettre en orbite d’ici deux ans et demi. »
Les astéroïdes suscitent de nos jours un intérêt croissant auprès de la communauté scientifique. Plus d’un demi-million ont déjà été découverts, mais les connaissances relatives à leur composition et à leur origine demeurent limitées. S’il voit le jour, le satellite Slavia pourrait par conséquent constituer une véritable révolution dans la conquête spatiale.