A la pointe de la révolte contre Andrej Babiš, Mikuláš Minář prend son bâton de pélerin
Grande figure de l’important mouvement de contestation contre le gouvernement d’Andrej Babiš en 2019, Mikuláš Minář a confirmé, lundi, qu’il entendait bien se lancer en politique dans la perspective des élections législatives l’année prochaine. Avec l’intention de convaincre les millions d’électeurs tchèques qui ne votent pas que le changement est possible.
« Personnalité de l’année 2019 » selon le journal Hospodářské noviny ou encore « étoile montante » à suivre dans le monde en 2020 selon le prestigieux quotidien britannique The Times, Mikuláš Minář a jusqu’à présent plutôt eu bonne presse. Mais cela pourrait rapidement évoluer après l’annonce, fin septembre, de son intention de créer son propre mouvement politique.
« Pas un parti, mais un mouvement », a-t-il bien précisé, convaincu de la nécessité de faire naître une énergie qui concernera toutes les catégories de la population. Invité de la Radio tchèque pour expliquer ses motivations, l’ancien cofondateur et président de l’association Un million de moments pour la démocratie, à l’origine des manifestations qui ont parfois rassemblé jusqu’à 300 000 personnes, a refusé de préciser quelles actions concrètes il entendait mener pour parvenir à ses fins. Pour Mikuláš Minář, l’essentiel, pour l’instant, est de tenir un discours mobilisateur :
« Ce que je veux dire aux gens, c’est que nous avons besoin d’une meilleure Tchéquie. Mais aucun manager n’y parviendra seul, la réussite de cette entreprise ne dépend que de nous. Des milliers de gens normaux de tous les horizons doivent se rassembler et mettre leurs forces en commun avec des experts compétents. J’en ai marre de la situation actuelle et je ne suis pas le seul à en avoir ras-le-bol. Mais râler et pleurnicher ne suffit plus. Il est temps de lever nos fesses et de changer tout ça. »
Mikuláš Minář entend s’adresser aux cinq millions d’électeurs en République tchèque qui ne se sont pas rendus aux urnes le week-end dernier pour les élections régionales. Des électeurs dont il assure vouloir être à l’écoute pour résoudre leurs problèmes. Et à la différence de l’actuel Premier ministre Andrej Babiš, qui tient le même discours et affirme « travailler pour les gens » depuis son entrée en politique en 2011, Mikuláš Minář, qui a fêté ses 27 ans en mars dernier, prétend ne pas vouloir se servir de son action en politique pour faire valoir ses propres intérêts d’homme d’affaires et « privatiser le pays ».
Sa déclaration d’intentions a toutefois été très diversement appréciée dans les médias. Face au mouvement centriste populiste ANO, régulièrement crédité de 30% d’intentions de vote dans les sondages, beaucoup estiment que le vague projet de Mikuláš Minář ne fera qu’émietter un peu plus encore une opposition déjà divisée en de trop nombreux partis pour espérer inquiéter Andrej Babiš lors des prochaines élections législatives, qui se tiendront à l’automne 2021. Une critique toutefois mal placée selon le principal intéressé, qui estime qu’aucune formation politique en République tchèque n’offre aujourd’hui d’alternative séduisante et entraînante au système oligarchique triomphant instauré par Andrej Babiš :
« Les partis d’opposition ne croient pas qu’ils peuvent toucher de nouveaux électeurs. Des électeurs qui votent ANO ou les gens déçus qui ne votent pas ou ne votent plus. Selon eux, s’adresser à ces catégories de la population n’a aucun sens. Lorsqu’avec l’association Un million de moments pour la démocratie nous avons demandé à leurs leaders pour quelles raisons selon eux les gens se jettent dans les bras d’ANO et ce que leurs partis proposent aux gens pour résoudre leurs problèmes, aucun d’entre eux ne nous a répondu. J’ai le sentiment qu’en réalié ils ne réfléchissent pas à ce qu’ils peuvent faire dans l’intérêt du plus grand nombre. Ce n’est pas ce qui les intéresse et les gens le savent bien. »
Bien qu’il parte donc de très loin, Mikuláš Minář, qui assure pouvoir compter sur le soutien de centaines de personnalités, va désormais œuvrer à mobiliser le plus grand nombre de forces. Convaincu de pouvoir remporter les élections, l’étudiant en thélogie qu’il était encore avant de s’engager dans son action militantiste en 2017, va prendre son bâton de pélerin pour parcourir la République tchèque et convaincre les électeurs de lever leurs fesses si eux aussi veulent changer leur pays.