À Prague, une crèche vivante pour célébrer Noël
La période de l’Avent, qui se termine ce dimanche, offre de nombreuses occasions de rassemblement entre amis et collègues ou en famille. À Uhříněves, dans le sud-est de Prague, une troupe de théâtre amateur prépare chaque année une crèche vivante, qu’elle met en scène pour les habitants à l’occasion d’une représentation unique. Petit tour dans leur salle de répétitions.
« Venez, peuple, dépêchez-vous ! Le monde entier est rassemblé à Bethléem… » Comme dans la chanson de Noël, les comédiens de la compagnie théâtrale du Sokol d’Uhříněves invitent à la rencontre à l’occasion de la neuvième édition de leur crèche vivante, jouée le dimanche avant Noël sur une place du quartier.
Outre la dizaine d’acteurs interprétant les rôles de Joseph, d’Hérode ou des Rois mages, entre autres, la troupe est accompagnée de quatre musiciens. Et aussi de la voix de l’acteur Ondřej Vetchý, fossoyeur dans le film oscarisé « Kolya », entre de nombreux autres rôles. Mais celui qu’il joue dans la crèche vivante est beaucoup moins terre-à-terre : ses répliques y sont celles de « la voix venue des hauteurs »… Dans la distribution, un autre rôle retient l’attention : celui du metteur en scène. Une mise en abyme qu’explique Daniel, le scénariste :
« Le fil conducteur de la pièce cette année, c’est une répétition de théâtre qui ne se passe pas bien. Je me suis un peu inspiré de la répétition dans Le Songe d’une nuit d’été, lorsque les acteurs se retrouvent dans la forêt pour une pièce, mais que cela tourne mal. Nous allons donc jouer une répétition qui ne se déroule pas comme il faut, mais au final, un miracle se produit, et on y parvient… du moins on l’espère ! »
Les crèches vivantes sont une tradition chrétienne dont l’origine est difficile à dater, même si François d’Assise aurait contribué à leur popularisation. Elles sont chose courante en Italie, où elles peuvent prendre la forme de spectacles à très grande échelle, rassemblant même jusqu’à plusieurs centaines d’habitants-acteurs dans une commune de la province d’Ancona ! Plus modestes en République tchèque, elles sont jouées par exemple dans les villes de Zlín et de Třešť, ou encore à l’écomusée de Rožnov pod Radhošťem.
Comme leur nom l’indique, les crèches vivantes mettent en scène l’histoire de la naissance de Jésus. Un récit dont l’action n’a guère changé depuis des siècles… mais dont la narration peut avoir recours à des anachronismes, et prendre des formes contemporaines inattendues. Daniel explique comment il procède d’une année sur l’autre pour éviter les redites dans ses scénarios :
« Je n’en suis pas encore à recycler les idées de scénario, parce que même si l’histoire de Noël est toujours la même, les temps changent, eux. J’essaye toujours de relier le scénario à un événement d’actualité. L’année dernière, c’était les élections présidentielles, par exemple, avec l’histoire racontée à travers Hérode. Une autre année, c’était une ‘crèche ferroviaire’ à l’occasion des 100 ans du chemin de fer : l’histoire se déroulait dans un train. L’année du centenaire de la Première République tchécoslovaque, en 2018, la crèche mettait en scène des personnalités qui avaient marqué la vie de notre commune il y a 100 ans. »
Traditionnellement réservées au jour même de Noël, les crèches vivantes sont aujourd’hui souvent jouées avant le jour qui célèbre la naissance de Jésus-Christ. C’est d’ailleurs l’événement perturbateur du scénario mis en scène à Uhříněves cette année, qui s’ouvre sur une coquille : un spectacle a été annoncé par la presse à une date… qui est en fait celle d’une répétition, à laquelle les acteurs ne se sont clairement pas préparés. Et le metteur en scène s’arrache les cheveux de frustration, devant des spectateurs qui soi-disant auraient dû se présenter une semaine plus tard…
A la crèche vivante d’Uhříněves, les spectateurs sont invités à accompagner les acteurs en chantant quelques « koledy », les chants de Noël traditionnels tchèques. Si le classique « Pásli ovce Valaši » ne saurait manquer au répertoire – avec son entêtant refrain « Hajdom hajdom tydlidom » qui plaît tant aux enfants – c’est aussi l’occasion d’interpréter des Noëls moins connus du grand public – et plus méditatifs …
La troupe de théâtre UCHO https://www.dsucho.cz/ a fêté cette année ses 25 ans d’existence. Mais au fait, comment est né le nom de cette compagnie, dont le sens premier est « oreille », mais qui peut aussi désigner une anse, un dispositif d’écoute ou encore, de façon péjorative, une personne maladroite ? Explication de la comédienne Veronika :
« UCHO, le nom de notre troupe, a de nombreux sens. Cela a surtout été interprété comme une abréviation de ‚Uhříněveští ochotníci‘, les comédiens amateurs d’Uhříněves. Mais le nom UCHO, est venu avant, et c’est ex post que ce sens lui a été donné. »
Musicien autodidacte, Matěj accompagne les acteurs à la guitare, accordéon et à l’ukulélé. Une récente blessure au doigt n’a nullement entamé sa motivation :
« C’est très important pour moi, parce que j’adore cette histoire de Noël, de la naissance de Jésus-Christ. J’adore l’atmosphère qui entoure cette histoire. Et il faut préciser que ce spectacle est unique : c’est à la fois la première et la dernière, donc on donne tout : on fait tout ce qu’on peut et du mieux que l’on peut. »
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