Approvisionnement en gaz et livraisons de chars : Prague se tourne vers Berlin
Énergie et sécurité étaient au programme de la rencontre entre le Premier ministre tchèque, Petr Fiala, et le chancelier allemand, Olaf Scholz, à Berlin, mardi. À la veille de l’annonce faite par Berlin, qui autorise la livraison de chards Leopard à l’Ukraine, cette rencontre a confirmé la bonne entente entre les deux pays.
Sans littoral et soucieuse de diversifier ses sources d’approvisionnement, la République tchèque souhaite prendre une participation dans le nouveau terminal de gaz naturel liquéfié (GNL) de Lubmin, sur la côte Baltique. Inauguré tout récemment par Olaf Scholz, ce terminal, nœud de distribution stratégique dans les infrastructures gazières, est le premier du genre dont la réalisation a été financée par des fonds privés. Il doit servir à renforcer l’indépendance énergétique de l’Allemagne, mais aussi celle à terme, comme Petr Fiala l’envisage, de la République tchèque :
« La République tchèque voit effectivement un intérêt stratégique dans l’utilisation du potentiel des terminaux allemands, je pense ici en particulier à celui de Lubmin. Sa position est avantageuse pour nous, car Lubmin est relié à l’infrastructure énergétique tchèque. Nous sommes donc prêts à participer à l’exploitation de ce terminal et intéressés par l’obtention d’une part conséquente. Nous avons convenu avec le chancelier aujourd’hui que le gaz pourrait être acheminé de Lubmin vers la République tchèque à compter de l’hiver prochain. »
Pour la République tchèque, dont la totalité des approvisionnements en gaz avant la guerre provenait de Russie, l’objectif est de se débarasser pour de bon de cette dépendance. Prague s’est déjà tourné vers des pays comme le Qatar et l’Algérie, mais la proximité avec l’Allemagne est bien évidemment une donnée importante, alors que le terminal de Lubmin permettra de fournir à l’Allemagne plus de cinq milliards de mètres cubes de gaz par an.
Outre l’approvionnement énergétique, la défense et la sécurité ont été l’autre grand sujet de discussion où Petr Fiala et Olaf Scholz ont démontré que la solidarité européenne n’était pas un vain mot. Sur ce point, l’Armée tchèque a besoin de chars Leopard 2 pour remplacer les chars envoyés en Ukraine, et ce, afin de pouvoir assurer sa propre défense en cas de besoin. Et à en croire Petr Fiala, il n’y a, là non plus, guère de friture sur la ligne Prague-Berlin :
« Pour la République tchèque, la situation est la suivante : nous avons envoyé nos chars T-72 en Ukraine et c’est pour cette raison que nous souhaitons nous entendre avec l’Allemagne de manière à pouvoir garantir la capacité d’action de notre armée. C’est là un exemple concret de coopération : nous aidons l’Ukraine et l’Allemagne nous aide à compenser nos pertes de matériel. »
Alors que la République tchèque, au même titre que la Pologne et les pays baltes dans la région, compte parmi les pays les plus solidaires avec l’Ukraine, l’Allemagne, elle, a vu son image de leader européen être quelque peu ternie ces dernières semaines par son incapacité à se décider quant à la livraison de ses chars de combat Leopard 2.
Ce mercredi, Berlin a finalement officiellement donné son feu vert aux pays alliés pour le transfert de ces blindés de conception allemande et de renommée mondiale en Ukraine, tout en annonçant parallèlement une première livraison de quatorze de ses propres tanks à Kyïv. Avant cette annonce très attendue, Petr Fiala s’était déjà déclaré confiant sur l'issue des négociations :
« Il ne s’agit pas de faire pression sur l’Allemagne. Je suis attentivement le débat interne allemand et je sais qu’il est parfois difficile de surmonter certaines choses du passé. Je suis convaincu qu’au final, une bonne solution sera trouvée et que l’Ukraine recevra les équipements nécessaires, y compris des chars. »
Enfin, en matière de défense commune, Petr Fiala, pour qui il s’agissait du troisième voyage à Berlin depuis mai dernier, a confirmé que la République tchèque était toujours intéressée par la construction d’un parapluie antimissile européen. Il s’agit là d’un projet qui avait été évoqué par le chancelier Scholz lors de son passage remarqué à Prague en août dernier. Jusqu’à présent, quatorze pays ont adhéré à la proposition allemande, parmi lesquels la République tchèque et la Slovaquie.