Candide, un opéra tiré du célèbre roman philosophique de Voltaire, sur la scène de l'Opéra d'Etat de Prague

Candide, photo: www.opera.cz

C'est à ce jeudi que l'Opéra d'Etat de Prague a fixé la date de la première de l'opéra Candide de Leonard Bernstein basé sur le célèbre roman philosophique de Voltaire. Le spectacle a été mis en scène par les frères Simon et Michal Caban, et la direction musicale a été confiée à Guillaume Tourniaire, un chef d'orchestre français établi en Suisse. Ce dernier a répondu, à la veille de la première, à quelques questions de Radio Prague.

Pour Guillaume Tourniaire, ce n'est pas la première rencontre avec l'ensemble de l'Opéra d'Etat de Prague. Il a collaboré avec une partie des musiciens et des choristes de cet ensemble, l'été dernier, au festival de Macerata en Italie où ils ont préparé, entre autres, la création de l'opéra «Le bel indifférent »de Marco Tutino. Monter Candide à Prague lui a donc donné l'occasion de retrouver cet orchestre, mais aussi de présenter une oeuvre pour laquelle il a beaucoup d'admiration.

« Pour un musicien d'orchestre c'est une oeuvre fantastique à jouer parce que Bernstein était non seulement un immense compositeur, mais aussi un immense chef d'orchestre, et comme un mécanicien d'auto il connaissait mieux que personne, mieux que tous les autres compositeurs de ce siècle, comment doit sonner un orchestre. Ayant dirigé le répertoire italien, allemand et français, il savait exactement obtenir les couleurs qu'il voulait. (...) Et ce qui est fascinant quand on travaille cette oeuvre c'est de voir à quel point il a fait quelque chose de personnel de toute cette expérience. Je voyais les musiciens sourire, rire, s'amuser beaucoup, la collaboration a été vraiment à cent pour cent, depuis le début des répétitions jusqu'à aujourd'hui. Et je dois dire la même chose de la collaboration avec les chanteurs. Chacun était là, très présent, très investi, parce que c'est une oeuvre évidemment très belle pour les chanteurs, même pour les tout petits rôles, parce que chacun a quelque chose de personnel à donner. »

Est-ce que c'est une oeuvre qui pose de grands problèmes aux interprètes ?

« Alors, si l'on veux différencier les choses, il faut dire que ce que Bernstein a écrit pour le choeur est très exigent, par exemple dans la scène d'autodafé c'est très brillant, il y a des moments « a capella ». Il y a eu donc toute sorte de choses qu'on devait faire. Un choeur qui aurait l'habitude de chanter toutes les symphonies de Mahler pourrait très facilement se mettre dans ce mode-là, mais il aurait peut-être plus de mal à chanter les scènes de Venise. Pour l'orchestre, il y dans l'opéra cette brillantissime ouverture que tout le monde connaît et qui est même difficile pour les meilleures phalanges du monde. (...) Quant aux chanteurs, il est difficile de chanter toujours avec un sourire, de ne pas trop se prendre au sérieux tout le temps. Il faut se prendre au sérieux à certains moments, car il y a dans l'opéra de grands moments de philosophie, mais il y a aussi de grands moments de spectacle et pour un chanteur d'opéra, ce ne sont pas vraiment les choses qu'on a l'habitude de faire. »

Souvent les chefs d'orchestre à l'opéra n'arrivent pas à s'identifier avec la conception des metteurs en scène. Est-ce qu'il est facile pour vous d'acceptez la conception des frères Caban qui ont mis en scène cet opéra à Prague ?

« Oui, c'était facile, je dois dire que les frères Caban ont construit des images et une vision très personnelles de certains moments de l'opéra. Je pense que même si quelquefois il y a dans l'histoire de l'opéra des éclats sanglants, des coups de gueule entre une personnalité et une autre, toutes les grandes décisions de l'histoire, si l'on regarde la politique, ne sont faites qu'avec de grands coups de gueule. Ce n'est donc pas toujours avec les ronrons et les berceuses qu'on arrive à construire quelque chose. Je ne dis pas qu'il faut toujours chercher la provocation ou le conflit, mais une pièce aussi riche doit avoir plusieurs angles de vue et c'est bien de les confronter au moment où nous sommes là. Ceci étant, je trouve qu'il y a (dans cette production) vraiment des moments de théâtre très réussis et j'espère que le public sera très sensible à ça. »