Coronavirus : les Tchèques face au défi de la responsabilité et de la solidarité

Photo illustrative: iXimus, Pixabay / CC0

Cette nouvelle revue de la presse tchèque de la semaine écoulée se penche d’abord sur les différentes manifestations de solidarité au sein la société tchèque à l’heure du coronavirus. Elle s’intéresse aussi aux réactions que la propagation de l’épidémie a provoquées dans la communauté vietnamienne établie en Tchéquie et, ensuite, au regard que portent les Tchèques sur leur ministre de l’Intérieur, régulièrement sur le devant de la scène médiatique ces derniers jours. Enfin, les théories de conspiration se reliant au Covid-19 seront le dernier sujet traité.

Photo illustrative: iXimus,  Pixabay / CC0
« Une crise est à même de rassembler une société qui, en temps normal, est divisée », remarque le commentateur du site Forum 24. Il met en relief la vague de solidarité qui s’est levée en Tchéquie :

« On se soutient, on s’entraide, on s’encourage. Il existe des tas d’exemples. Bénévoles, scouts, étudiants, ils sont nombreux à exprimer leur volonté d’aider les personnes âgées, la catégorie de la population la plus menacée par l’épidémie. Et cette volonté se traduit par des actes concrets. Nous sommes témoins du même élan aussi pour compenser la pénurie de masques de protection. On ne ne compte plus le nombre de personnes qui les fabriquent dans l’urgence chez eux pour les proposer à tous ceux qui en ont besoin, aux hôpitaux... Le coronavirus nous montre que la société tchèque ne méritait pas d’être jugée négativement. Si cette entraide et cette solidarité pouvaient perdurer après l’épidémie, on pourrait s’en féliciter. Mais nous sommes encore loin de ce dénouement idéal. »

Le commentateur du site novinky.cz observe de son côté :

« Les gens proposent leur aide et leur savoir-faire, histoire de se serrer les coudes jusqu’à ce que cette situation s’achève. Dans les années 1990, certaines voix doutaient de la raison d’être d’une société civique. Aujourd’hui, tout le monde peut voir à quoi elle sert et comment elle se manifeste. »

Le site du quotidien économique Hospodářské noviny rapporte à son tour que des milliers de personnes et de sociétés offrent leur aide. La chaîne de restauration Office Food, par exemple, a proposé de distribuer quelque 10 000 repas par jour à des personnes retraitées coincés chez elles, alors que leur nombre, rien qu’à Prague, est de 240 000.

« Nous avons tous complétement sous-estimé le coronavirus. Accuser maintenant le Premier ministre et le gouvernement est injuste. L’heure est au rassemblement. Le temps des jugements viendra plus tard », peut-on lire également sur le site aktualne.cz, qui explique un peu plus loin :

« Certes, un débat sur les responsabilités est nécessaire. Mais il aura sa place lorsque l’on sera au bout de cette épidémie et que l’on aura sauvé le maximum de vies. Hélas, en Tchéquie, le coronavirus est apparu en période d’anthipatie exacerbée à l’égard du gouvernement, qui dure depuis quelques années déjà. Du coup, au lieu de soutenir les démarches gouvernementales - ce qui serait de rigueur -, on voit se multiplier les critiques et les accusations... La crise doit être surmontée avec les leaders que nous avons actuellement. »

Le commentateur du site info.cz estime que l’on assiste à la création d’une sorte d’immunité nationale :

« Cette immunité semble nous protéger de la haine, de la peur et de la méfiance réciproque, des phénomènes qui nous ont, ces dernières années, étouffés, divisés et qui ont disloqué une société tchèque traditionnellement conviviale. Les sentiments d’unité et de solidarité que nous partageons aujourd’hui, sont identiques à ceux qui ont régné lors de la révolution de Velours en 1989 et dont l’intensité ne s’est plus jamais répétée ensuite, sauf lors de courts moments d’euphorie suite à des succès sportifs. C’est une belle promesse pour l’avenir. »

La communauté vietnamienne « tchèque » face au Covid-19

Photo: Site officiel de covidinfo.cz
La communauté vietnamienne établie en Tchéquie manifeste de différentes manières sa solidarité avec les Tchèques. C’est ce que remarquait l’édition de jeudi du quotidien Lidové noviny :

« Des milliers de Vietnamiens, qui formentla troisième minorité étrangère la plus importante du pays, s’engagent dans le projet ‘Les Vietnamiens aident’. Ils participent à l’initiative ‘Des masques pour tous’, fabriquent eux-mêmes des gels et des gants désinfectants, participent à l’approvisionnement à domicile des personnes âgées. Ils ont également lancé une collecte au sein de leur communauté, tandis que les commerçants vietnamiens offrent du café, du thé et d’autres boissons aux travailleurs du secteur sanitaire et des services de sécurité. Les vitres des centaines de commerces vietnamiens qui participent au projet sont désormais ornés d’un grand cœur rouge. »

Pour informer ses membres qui ne maîtrisent pas suffisamment la langue tchèque et pour informer en détail des mesures gouvernementales et de l’évolution de la situation sanitaire, la communauté vietnamienne a mis en place un nouveau site, covidinfo.cz. En se référant à la cheffe de l’association Lam Cha Me, le journal Lidové noviny indique également que les Vietnamiens redoutent le coronavirus plus que les Tchèques, ce qui explique pourquoi, dès le début, ils ont pris la maladie très au sérieux. Ils craignent notamment d’être rejetés par la société majoritaire s’ils devaient être contaminés.

Jan Hamáček : la résurrection d’un politicien ?

Jan Hamáček,  photo: ČTK / Ondřej Deml
« Avec l’épidémie de coronavirus, Jan Hamáček est enfin redevenu lu-même », affirme Hospodářské noviny. Le quotidien économique commente les dernières décisions et apparitions en public du ministre de l’Intérieur et leader du Parti social-démocrate (ČSSD), ainsi que l’augmentation de sa cote de popularité. Il écrit :

« De nouveau sur le ring. Le politicien le plus compétent. Une approche digne d’un homme d’Etat. Le maréchal contre le coronavirus. Tels sont quelques-unes des observations qui ont été formulées ces derniers jours sur les réseaux sociaux à l’adresse de Jan Hamáček, suite à ses apparitions devant les caméras de télévision. En pull rouge et en jean, il a su lancer aux Tchèques des appels calmes et dignes de confiance qui les ont convaincus d’accepter et de respecter les mesures de confinement. Celui qui, jusque-là, pouvait paraître fade, tel un ‘accessoire’ du Premier ministre Andrej Babiš, est apparu comme un leader déterminé. »

Le quotidien rappelle que Jan Hamáček a également à son compte une intervention policière réussie contre le trafic de masques de protection respiratoire et qu’il gère avec succès les difficultés liées aux longues files de camions à la frontière avec la Slovaquie. C’est lui aussi qui a réglé la question de l’importante commande d’articles sanitaires en provenance de Chine. Le commentateur refuse cependant d’estimer dans quelle mesure cette réussite pourrait faire augmenter la populairté du ČSSD, dont les intentions de vote se situent aujourd’hui autour de 6%. « Avant les prochaines élections législatives à l’automne 2021, les politiciens auront encore beaucoup d’autres défis à relever », explique-t-il.

Le Covid-19 et la désinformation

Photo illustrative: Gerd Altmann / Pixabay,  CC0
« Tout laisse à penser que le coronavirus a été diffusé dans le monde pour permettre aux promoteurs du vaccin de réaliser d’immenses profits. Un des buts de l’épidémie est également d’accélerer la crise globale. » Selon le site hlidacipes.org, ces propos tenus dans une vidéo sur youtube par l’astrologue tchèque Antonín Baudyš, peuvent servir d’exemple des théories de conspiration et des fausses informations qui circulent actuellement en Tchéquie :

« On voit circuler des mails en chaîne qui contiennent des ‘informations’ invraisemblables concernant le coronavirus et qui, pourtant, trouvent un terrain fertile auprès d’une partie de la population. Elles sont diffusées par des ‘sites alternatifs’ locaux qui, dans la plupart des cas, puisent leur inspiration idéologique dans l’espace d’information russe. »

En Tchéquie, les activités de désinformation sont suivies par l’association Les Elfes tchèques. Celle-ci confirme, toujours selon le site hlidacipes.orr, que les opérations de désinformation russes se servent traditionnellement de problèmes objectifs et des crises dans les pays visés pour briser la confiance de leurs habitants vis-à-vis de leur Etat. L’actuelle crise autour de l’épidémie du Covid-19 constitue donc une belle occasion.