Des touristes tchèques eux aussi parfois trop nombreux
Crise du coronavirus oblige, les Tchèques ont été invités, cette année, à passer leurs vacances chez eux. Et même si certains se rendent malgré tout en Croatie ou en Grèce, destinations estivales traditionnellement très prisées des touristes tchèques, pour profiter de l’air marin, la grande majorité d’entre eux, prudents et attentifs à l’évolution de la situation sanitaire, ont effectivement choisi de profiter des charmes de la République tchèque. Mais cet afflux n’est parfois pas sans poser certains problèmes.
Il suffit de voir l’affluence à la gare ou de jeter un coup d’œil sur les plaques d’immatriculation des véhicules stationnés sur les parkings pleins situés à proximité du centre-ville pour vite comprendre qu’à Český Krumlov les Tchèques, complétés par quelques Allemands, Autrichiens et autres Slovaques voisins, ont remplacé les touristes chinois dont la présence toujours plus massive dans la petite ville de Bohême du Sud classée au patrimoine de l’UNESCO était tant décriée dans les médias ces dernières années. Depuis la mi-mai, la levée des premières mesures de restriction et la réouverture progressive des monuments et sites touristiques, les Tchèques se sont réapproprié les endroits qu’ils avaient perdu l’habitude de fréquenter. La faute à la priorité donnée par les hôteliers et propriétaires de restaurants aux visiteurs étrangers généralement moins regardants à la dépense. Le cas de Český Krumlov, donc, qui après Prague est la ville tchèque la plus visitée par les touristes étrangers, en est un parfait exemple.
Mais, cet été, les Tchèques ont pris d’assaut aussi les sites naturels. Qu’il s’agisse de la Šumava en Bohême du Sud, dont les forêts et les monts boisés ne sont distants que de quelques dizaines de kilomètres de Český Krumlov, de la région viticole de Moravie du Sud, des environs des parcs naturels des rochers d’Adršpach et de Teplice, de la Suisse ou du Paradis de Bohême ou du massif des Krkonoše dans le nord-est du pays, trouver un logement libre de dernière minute en cette période de grandes vacances pour y séjourner ne serait-ce que quelques jours est souvent devenu un vrai casse-tête. Tout est plein et davantage que d’une pénurie de visiteurs, hôtels et restaurants se plaignent plutôt de celle de cuisiniers, de serveurs et autres femmes de chambre, comme le confirment par exemple Pavel Škvrně et Zbyněk Bobek, propriétaires de pensions dans la petite ville de Teplice nad Metují, en Bohême de l’Est :
« Nous aurions besoin d’embaucher quatre serveurs et cuisiniers à temps plein. Je les prendrais sur-le-champ, mais encore faut-il les trouver. Il n’y en a pas. »
« Nous avons des candidats, mais c’est une catastrophe. Ce sont des gens avec lesquels il est impossible de travailler. Ils ne savent rien faire, n’ont aucune connaissance et ne sont pas intéressés par leur travail. On ne peut pas compter sur eux. »
LIRE & ECOUTER
Ailleurs, les préoccupations peuvent être de différente nature. Ainsi, au sommet du mont Sněžka, accessible en télécabine après une file d’attente longue parfois de deux à trois heures, les touristes sont aussi devenus trop nombreux. Le passage des 5 à 10 000 personnes, Tchèques et Polonais, qui gravissent chaque jour le point culminant de la République tchèque avec ses 1 603 mètres, laisse des traces. Du coup, la direction du Parc national des Krkonoše (Monts des géants) envisage de plus en plus sérieusement de limiter le nombre de visiteurs, dont l’indiscipline de beaucoup est pointée du doigt, comme le constate Radek Drahný, porte-parole du plus ancien parc national existant en République tchèque :
« Fermer le sommet du mont Sněžka aux visiteurs est pratiquement irréalisable, mais il faut réfléchir aux moyens de réguler l’affluence. Dans l’état actuel des choses, la situation est devenue intenable. Dans un site naturel protégé, le nombre de gens ne peut pas augmenter sans cesse. »
Depuis juin dernier, un filet rouge d’un mètre de haut a déjà été installé pratiquement tout autour du sommet de manière à empêcher les visiteurs de marcher dans les zones protégées. Son installation est le fruit d’une coopération tchéco-polonaise, Sněžka se trouvant sur la frontière entre les deux pays. Par ailleurs, comme cela se fait dans certains pays, en Autriche voisine notamment, mais aussi depuis 1994 du côté polonais du mont, rendre payant l’accès au Parc des Krkonoše est une autre solution envisagée.