Emil Holub, premier cartographe des chutes Victoria en Afrique

Emil Holub à la chasse à l'antilope, Illustration de la première édition de 'Sept ans en Afrique du Sud'

On trouve ses collections ethnographiques disséminées dans des musées du monde entier : Emil Holub (1847-1902) est né dans la région de Pardubice, en Bohême de l’Est et est un des rares scientifiques tchèques à avoir exploré l’Afrique du Sud et la partie nord du fleuve Zambèze. On lui doit aussi la première carte détaillée des chutes Victoria.

Emil Holub | Photo: Penarc,  Wikimedia Commons,  public domain

Au cœur de l’Europe centrale, les pays tchèques ont pu aussi, par leur enclavement, susciter des vocations exploratrices : une période y était particulièrement propice, le XIXe siècle, époque où les progrès technologiques se sont alliés à une soif de découverte, non sans arrière-pensées coloniales à des fins d’exploitation.

Mais l’empire austro-hongrois a une autre histoire que celle de la France ou du Royaume-Uni, et si le jeune Emil Holub, né en 1847 à Holice, près de Pardubice, commence à s’intéresser très tôt à l’Afrique, c’est en grande partie après la lecture des carnets de voyage de personnalités telles que David Livingstone et d’autres explorateurs. Jitka Koudelková, du musée de la ville natale d’Emil Holub :

Musée d’Emil Holub à Holice | Photo: Lukáš Peška,  ČRo

« Cette période des années 1880 correspond à l’apogée de la colonisation. De nombreux dirigeants européens voulaient utiliser l’expérience de ces voyageurs pour coloniser ces différents territoires, qu’il s’agisse de l’Afrique ou de l’Amérique du Sud. Le roi des Belges, Léopold, a offert à Emil Holub une grosse somme d’argent pour travailler pour lui. Mais Emil Holub n’avait qu’un seul credo, celui de servir la science et son pays. Il a donc refusé cette somme et continuer à collecter de l’argent pour son deuxième voyage de 1883. C’est aussi à cette époque qu’il rencontre le fils de l’empereur François-Joseph, le prince Rodolphe. Il aimait l’écouter et ils ont noué une sorte d’amitié. L’empereur François-Joseph a donc offert à Emil Holub une somme considérable. Ainsi, Holub a lancé sa deuxième expédition sous bannière austro-hongroise. L’empereur François-Joseph n’avait aucun besoin de colonisation : il avait suffisamment de soucis avec son immense Etat, multinational, mais pour faire plaisir à son fils, il a accordé cette somme à Holub. »

Emil Holub en Afrique,  Illustration de la première édition de 'Sept ans en Afrique du Sud' | Source: Emil Holub,  'Sedm let v Africe'

Mais avant de pouvoir envisager son tout premier voyage, les pas d’Emil Holub le mène d’abord à l’Université Charles à Prague, où il entame des études de médecine, un choix qui n’était pas illogique pour quelqu’un qui dont les centres d’intérêts étaient la nature et les sciences naturelles. Dès la fin de ses études, au printemps 1872, Emil Holub cherche à réaliser son rêve d’Afrique et se heurte au problème majeur du financement. Jitka Koudelková :

Emil Holub en route le long du Zambèze,  Illustration de la première édition de 'Sept ans en Afrique du Sud' | Source: Bibliothèque nationale,  CC BY 1.0 DEED

« Emil Holub a entrepris ce premier voyage avec une sorte d’enthousiasme juvénile. Il n’était pas très doué en langues, manquait d’argent, mais il a ouvert un cabinet de médecin près de la ville de Kimberley (Afrique du Sud) alors naissante. C’est là qu’il a pu gagner de l’argent et à partir de là qu’il a effectué trois voyages d’exploration au cours des sept premières années. Pendant cette période, il a parcouru le désert de Kala Hara jusqu’au fleuve Zambèze et a expédié en Bohême quelque 30 000 pièces, qu’il s’agisse de faune et de flore, de matériaux ethnographiques ou géologiques. Ses premières expositions au pays ont fait connaître Emil Holub comme collectionneur et explorateur dans l’esprit des Tchèques. »

Les chutes Victoria,  Illustration de la première édition de 'Sept ans en Afrique du Sud' | Source: Bibliothèque nationale,  CC0 1.0 DEED
Monument à Emil Holub devant le musée de Livingston | Photo: Klára Stejskalová,  Radio Prague Int.

Ce n’est qu’avec la troisième expédition de son premier séjour, en mars 1875, qui l’a conduit à la frontière entre le Zimbabwe et la Zambie qu’Emil Holub marque l’exploration de l’Afrique de son empreinte. Il en résulte la première carte détaillée de la région des chutes Victoria et les premiers récits sur la région, publiés en anglais quatre ans plus tard. Aujourd’hui, un buste de l’explorateur tchèque, inauguré en 2005, rappelle sa mémoire à Livingstone en Zambie.

Carte des chutes Victoria par Emil Holub | Photo: Klára Stejskalová,  Radio Prague Int.

Au cours de ce voyage, Holub cherche à devenir le deuxième Européen à pénétrer aussi loin à l’intérieur du continent, en remontant le Zambèze. Une expédition semée d’embûches durant laquelle il contracte le paludisme.

Au retour de ses expéditions, Emil Holub organise des expositions dont l’une des plus importantes se déroule en 1892 au Palais des Expositions de Holešovice à Prague, attirant des milliers de visiteurs :

L’exposition d’Emil Holub au musée à Holice | Photo: Radio Prague Int.

« Il a rassemblé quelque 13 000 pièces, dont 34 sculptures de différentes tribus, mais des oiseaux, des mammifères, des fossiles et autres types de matériaux ethnographiques. Il a fallu quatre trains et 72 wagons pour transporter le tout à Prague. Emil Holub voulait qu’elle soit vue par le plus grand nombre possible de personnes. Il a donc fixé un prix d’entrée très bas pour que l’exposition puisse être vue par 700 000 personnes. Un événement qu’il a organisé à perte, car il a dû rembourser cette dette jusqu’à la fin de sa vie. »

L'exposition ethnographique d'Emil Holub à Vienne en 1891 | Photo: Africké muzeum Dr. Emila Holuba

Sa collection sera redistribuée à différentes écoles et musées étrangers, les institutions muséographiques de Bohême n’étant pas intéressées pour accueillir un ensemble aussi important. Endetté, appauvri par ces expéditions, Emil Holub a passé le reste de sa vie écourtée en écrivant des livres et en donnant des conférences. Les complications dues au paludisme et à d’autres maladies contractées en Afrique font qu’il meurt à l’âge de 55 ans, à Vienne, où il repose.

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Auteurs: Anna Kubišta , Vít Pohanka
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