Jean-Pierre Améris : « Le goût du conte et du fantastique, c’est ce que j’aime dans le cinéma tchèque »

'Une famille à louer', photo: Festival du film français

Ce mercredi s’achève à Prague le Festival du film français. C’est le film « Une famille à louer », du réalisateur Jean-Pierre Améris qui clôt la 18e édition de ce rendez-vous du cinéma français. Pour Jean-Pierre Améris, c’est un retour à Prague, puisqu’il avait déjà passé quelques mois de tournage dans la capitale tchèque il y a quelques années, pour son film L’Homme qui rit. Avant de parler de cette expérience, il est revenu au micro de Radio Prague sur les origines de son dernier opus, « Une famille à louer ».

Jean-Pierre Améris,  photo: Eva Kořínková / Site officiel du Festival du film français
« Il s’agit de mon dixième film, mais seulement de ma deuxième comédie après Les émotifs anonymes. Quand je fais une comédie, c’est très autobiographique. Les émotifs anonymes, c’était sur mon expérience d’émotif et les handicaps que ça crée dans la vie. Là, c’est sur ma découverte de la vie de famille, assez tardive, assez récente, il y a sept ans seulement. Moi qui étais très solitaire, comme le personnage joué par Benoît Poelvorde, très anxieux et plutôt à vouloir l’ordre et la solitude, j’ai découvert ça, ce que c’est que de vivre avec une compagne, qui est d’ailleurs la scénariste du film, et avec un beau-fils, un enfant, qui fait du saut en hauteur sur les canapés. J’ai découvert que c’est parfois remuant mais que la vie est quand même de ce côté-là, du côté du désordre. »

Donc, du côté du fait d’être ensemble…

'Une famille à louer',  photo: Festival du film français
« C’est vraiment le sujet du film. Plus qu’un éloge de la famille, c’est un éloge du risque qu’il faut prendre pour sortir de soi, de sa solitude, pour surmonter ses inhibitions. C’est ce que font mes personnages en acceptant ce contrat fantaisiste… »

Chacun à sa façon, car ils sont tous deux très différents…

« Ces deux personnages sont totalement différents mais finalement ils se respectent beaucoup, sont intrigués l’un par l’autre, mais surtout ce sont des personnages courageux. Lui, c’est un homme très riche, mais coincé, handicapé des sentiments et elle est une mère de famille qui a une vraie joie de vivre, qui est courageuse, mère célibataire de deux pères différents. Elle voit arriver cet homme qui lui propose de la sauver de sa galère et de ses dettes si elle accepte de le prendre ‘en stage’ dans sa famille pendant trois mois, et elle pourrait dire : ‘Vous êtes malade !’ Mais elle l’accepte.

'Une famille à louer',  photo: Festival du film français
C’est ce que j’aime chez eux, cette prise de risques. Le vrai sujet du film c’est ça. La famille, c’est le fait d’être ensemble, de prendre le risque d’être ensemble, malgré les difficultés. Ce qui sauve les quatre personnages (je compte les enfants), c’est leur complicité et leur humour, et leur capacité enfantine à jouer. »

Vous êtes à Prague pour le Festival du film français, mais ce n’est pas la première fois que vous tournez ici, puisque votre film L’homme qui rit a été tourné aux studios Barrandov et avec de nombreux acteurs et figurants tchèques. Quels souvenirs gardez-vous du tournage ?

'L'homme qui rit',  photo: Europacorp Distribution
« J’ai un souvenir fabuleux de ce tournage à Prague aux studios Barrandov au début de 2012. C’était un rêve d’enfant de faire ce film d’après le livre de Victor Hugo que j’avais lu adolescent, qui était comme un conte. Ce que les studios Barrandov m’ont apporté, c’est justement de pouvoir réaliser ce rêve de jeune cinéphile, de créer un univers totalement irréel, un peu fantastique, avec une équipe tchèque qui était formidable, à la décoration, à l’image, et puis tous ces acteurs qui avaient le sens de la fantaisie. Mais ce n’était pas une surprise, pour moi qui adore le cinéma tchèque en plus de la grande époque, qu’ici on puisse trouver un écho à ma volonté de fantaisie et de surréalisme. Je me rends compte en le disant que je ne recherche pas des choses franco-françaises, mais plutôt des choses des pays de l’Est, ou anglo-saxonnes. Ce sont mes influences. »

En effet, le conte est encore très présent dans le cinéma tchèque, et ici, on tourne des contes de fée pour le grand écran…

'Une famille à louer',  photo: Festival du film français
« C’est ce que j’apprécie dans le cinéma tchèque et dans l’esprit qui règne ici. Cette part d’enfance me correspond, ainsi que le goût du conte et du fantastique, qu’on trouve même dans Une famille à louer. L’histoire est certes autobiographique, mais le traitement est celui d’une fable, même dans le choix des maisons. C’est un peu la Belle et la Bête, lui dans cette grande maison moderne très froide, et elle dans cette petite maison qui fait penser à la cabane de Peau d’âne. J’aime cet esprit et je me sens bien ici. »

Retrouvez l’intégralité de cet entretien dans une prochaine rubrique Culture sans frontières.