La science et la recherche, nouvelles priorités de la diplomatie économique tchèque
Comment mieux faire valoir les intérêts économiques tchèques à l’étranger dans le contexte d’une économie mondiale en pleine transformation ? C’est à cette grande question à laquelle s’efforcent de répondre tout au long de cette semaine à Prague les diplomates économiques, agricoles et scientifiques des ambassades tchèques et des représentants des bureaux CzechTrade et CzechInvest dans le monde. Traditionnellement très industrialisée et fortement dépendante de ses exportations, l’économie tchèque entend mettre l’accent sur le soutien à la recherche, au développement et à l’innovation pour conquérir de nouveaux marchés, en Afrique notamment.
« Pour l’avenir de l’économie tchèque, il est essentiel que la diplomatie économique se concentre sur la science, la recherche et les innovations », a déclaré Jan Lipavský, le ministre des Affaires étrangères, lundi, lors de son discours d’ouverture de la réunion qui rassemble chaque année les différents acteurs de la promotion des intérêts économiques tchèques dans le monde. Une promotion qui passe aussi par de nouveaux défis à relever, comme le précise Jiří Kozák, premier vice-ministre des Affaires étrangères :
« Dans la période qui a suivi la pandémie de coronavirus et avec l’agression russe de l’Ukraine, il s’est avéré qu’il nous fallait réfléchir à la nature de nos chaînes d’approvisionnement et à la fiabilité de nos partenaires. C’est pourqoui l’économie tchèque se doit de reconfigurer son mode de fonctionnement de façon à ce qu’elle ne soit plus dépendante de pays qui pourraient nous faire du chantage ou profiter de leurs relations économiques pour atteindre leurs objectifs politiques. »
Pour éviter cela et se tourner vers d’autres pays-partenaires, le gouvernement tchèque a adopté, à l’automne dernier, de nouvelles stratégies de coopération pour l’Indo-Pacifique et pour l’Afrique avec, dans le cas de cette dernière, la devise est « la Tchéquie est de retour en Afrique ! ».
« Le marché africain est un marché dynamique et beaucoup d’entreprises tchèques sont conscientes de son développement. Bien sûr, c’est un marché qui est un peu difficile d’accès pour nos entreprises d’abord parce qu’elles ne le connaissent pas toujours parfaitement. La situation étant instable dans beaucoup de pays, nos entreprises ne savent aussi parfois pas bien comment assurer financièrement leurs investissements. Mais celles qui ont réussi en Afrique peuvent confirmer qu’à partir du moment où elles parviennent à y nouer des relations de partenariat, ce sont des investissements rentables. »
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Pour les entreprises tchèques présentes en Afrique, l’intérêt, comme le confirme encore Jiří Kozák, est aussi de pouvoir agir sur le long terme dans une relation gagnant-gagnant avec le tissu économique et social local. Cette volonté de « partenariat égal » figurait d’ailleurs au cœur du message transmis par le chef de la diplomatie, Jan Lipavský, lors de son récent voyage en Angola et en Zambie. À condition que le climat politique et sécuiritaire y soit propice, c’est désormais l’ensemble du continent qui intéresse la diplomatie économique tchèque :
« Les entreprises tchèques ont du succès par exemple dans le secteur de la santé. Au Sénégal, une autre a construit et modernisé des aéroports. Au Ghana, une entreprise est en train de réaliser des points avec une approche très innovante. D’autres qui produisent des moyens de transport comme des autobus investissent également. La coopération est très forte aussi dans les domaines de la défense ou encore de la géologie. Mais du Sénégal au Kenya à l’Égypte en passant par la Côte d’Ivoire ou le Ghana, y a beaucoup de pays dans lesquels nous souhaitons développer cette coopération et aider nos entreprises. »
C’est aussi à cette fin, et plus globalement pour faire valoir les infrastructures de recherches ou les universités au-delà des frontières tchèques, qu’un nouveau département de diplomatie scientique a récemment vu le jour au ministère des Affaires étrangères.
Alors qu’il est parfois reproché à la République tchèque, pays parmi les plus industrialisés en Europe, de tarder à réagir aux grands défis qui attendent son économie dans un proche avenir, avec notamment la transition bas carbone et le développement d’activités à plus forte valeur ajoutée, Jiří Kozák assure que la transformation est malgré tout en marche :
« Je pense que les entreprises tchèques s’y préparent. Elles aussi ont pris conscience de certaines dépendances qui ne sont pas saines pour leur développement. Nous sommes concients que la valeur ajoutée de la production tchèque reste relativement faible. Le fait que nous soyons effectivement un des pays les plus industrialisés d’Europe et que nous ayons une économie orientée vers les exportations nous pousse à réagir rapidement à ces différents défis de modernisation, d’intelligence artificielle ou de nouvelles technologies, et ce y compris dans des secteurs industriels disons plus traditionnels. Mais ce sont là autant de domaines où nos entreprises sont en mesure de faire face à la concurrence dans le monde. »
Un monde dans lequel, enfin, la diplomatie économique tchèque entend se vendre sous une marque à la fois forte et simple, synonyme de qualité et de valeur ajoutée :
« ‘République tchèque’ ou ‘Czech Republic’ est le nom officiel de la Tchéquie. ‘Tchéquie’ ou ‘Czechia’ n’est pas quelque chose de nouveau. C’est une appellation qui existe depuis les années 1990 et qui nous semble plus simple d’utilisation et plus pratique pour la promotion de notre pays dans le monde. Une fois cela dit, il nous reste encore à construire la marque ‘Tchéquie’ ou ‘Czechia’ de façon à ce qu’elle devienne elle aussi une marque forte. ‘Czechoslovakia’, qui reste encore utilisée dans certains pays, en Afrique par exemple, est une marque qui était synonyme de qualité. Notre mission est donc de soutenir la construction de la marque ‘Czechia’ pour qu’elle soit elle aussi considérée de la sorte dans le monde : comme une marque de qualité. »