La Tchéquie veut montrer qu’elle aide les réfugiés, mais pas sur son sol
Avec les pays de Visegrád, la République tchèque, on le sait, refuse tout net de prendre sa part dans l’accueil des centaines de milliers de réfugiés arrivés en Europe ces dernières années. Prague aimerait pourtant montrer qu’elle est sensible à leur sort et leur vient en aide. C’est la démonstration à laquelle s’est livré jeudi le Premier ministre Bohuslav Sobotka, qui recevait son homologue italien, en présentant un programme commun de soutien aux migrants en Côte d’Ivoire.
« J’ai informé le Premier ministre Gentiloni à propos des initiatives soutenues par la République tchèque en ce qui concerne le renforcement des frontières internes de l’Union européenne, en ce qui concerne l’aide humanitaire au Proche-Orient ou en Afrique du Nord. Nous considérons que cela représente notre expression et notre contribution de solidarité à l’égard des pays situés aux frontières de l’espace Schengen et qui ont actuellement la lourde charge de faire face à l’immigration illégale. »
La politique soutenue par Prague consiste à empêcher les migrants d’arriver en Europe, mais aussi à les empêcher de partir de leur pays d’origine. C’est tout l’enjeu d’un programme destiné à la Côte d’Ivoire, cofinancé par la Tchéquie et l’Italie à hauteur d’un million d’euros chacune, et présenté ce jeudi. Le projet vise à améliorer les conditions de vie de ressortissants ivoiriens qui ont tenté d’émigrer mais qui, arrêtés, ont été expulsés vers Conakry. Par ailleurs, la Tchéquie entend également contribuer à l’entraînement des garde-côtes libyens.
Pour l’Italie, pays d’arrivée de nombreux réfugiés en Europe, la question des quotas reste pourtant très délicate. A Prague, Paolo Gentiloni est tout de même apparu sensible aux arguments tchèques avec une volonté évidente d’apaiser les relations entre les Etats qui jouent le jeu, même de façon insuffisante, de l’accueil des réfugiés, et ceux, comme les quatre pays du groupe de Visegrád, qui l’excluent catégoriquement :
« Par bien des aspects, je crois que nous n’avons aucun intérêt à alimenter une idée de division entre, par exemple, la partie occidentale et la partie orientale de l’Europe. Nous avons besoin d’aller de l’avant. »Comme le notait la presse italienne à l’issue de la visite, Paolo Gentiloni ne se faisait guère d’illusion sur sa capacité à influencer les pays centre-européens. Il n’y est d’ailleurs pas parvenu. Le chef du gouvernement italien a donc salué les modestes efforts tchèques :
« Naturellement sur la question pour nous très délicate des migrations, il y a, comme l’a rappelé le Premier ministre Sobotka, des avis très divers au sein de l’Union européenne. L’Italie le réaffirme : les engagements sur les migrants sont des engagements contraignants pour tous les pays. C’est notre opinion. En même temps, en réaffirmant cela, nous devons aussi enregistrer avec intérêt la disponibilité de nos amis tchèques pour collaborer sur la dimension externe des migrations et nous avons discuté de ce projet commun en Afrique et du soutien aux opérations en cours en Méditerranée. »
Un peu plus tôt dans la journée en Slovénie, Paolo Gentiloni avait rappelé le devoir de solidarité des Etats européens à respecter l’accord de relocalisation des réfugiés. Sur ce point, la Tchéquie aura du mal à redorer son blason, elle qui a officiellement suspendu son application en juin dernier, et qui n’avait auparavant en tout et pour tout accueilli qu’un total de douze migrants.