L'affaire des frères Masin au Sénat

Les frères Masin

Le Sénat, chambre haute du Parlement tchèque, proposera au président de la République de décerner les médailles de l'Héroïsme aux six membres d'un groupe qui, après le coup d'Etat communiste en 1948, avait opposé une résistance armée au régime arbitraire.

Josef Masin, fils du colonel Masin exécuté par les nazis pour ses activités dans la résistance. En 1953, trois membres du groupe, dont les frères Masin, ont réussi à se frayer un passage pour l'Occident. Lors de leur fuite, ils ont tué six personnes. Deux membres du groupe ont été arrêtes et exécutés. A Prague, le régime a pris une revanche cruelle contre les parents des fugitifs. Plus de vingt personnes, dont la mère des frères Masin, ont été arrêtées et condamnées à de lourdes peines. La mère est morte en prison au bout de trois ans. Aujourd'hui, les frères Masin vivent aux Etats-Unis. Le troisième membre du groupe ayant réussi à fuir, Milan Paumer, vit, lui, depuis 2001, de nouveau en Tchéquie. En 1998, les actes des frères Masin ont été juridiquement prescrits. Les frères hésitent pourtant à revenir au pays.

En Tchéquie, l'affaire Masin a provoqué des réactions contradictoires. Une partie de l'opinion les considère comme des héros, d'autres leur reprochent d'avoir tué des gens innocents. Ces arguments ont ressurgi aussi dans le débat ayant précédé la décision du Sénat. Tandis que les anciens dissidents parmi les sénateurs, Jan Ruml et Daniel Kroupa, ont cherché à justifier et à réhabiliter les actes des Masin, cette initiative a été contestée, comme il fallait s'y attendre, par les sénateurs communistes, mais aussi par Ladislav Macak du Parti social-démocrate:

"Si l'on qualifie de héros quelqu'un qui blesse ou tue des gens qui, malheureusement, se trouvaient à un moment inopportun à un endroit inopportun, on pourra dire bientôt la même chose de quelqu'un qui fait exploser une charge sur son corps et tue des passagers dans un bus, par exemple un Palestinien en Israël."

Des propos de ce genre ont provoqué évidemment des réactions indignées, dont celle de la sénatrice indépendante, Jitka Seitlova:

"Comparer les frères Masin à un fléau comme le terrorisme contre la population civile dans certains pays est, à mon avis, une effronterie éhontée."

Tout dépend maintenant du président de la République. C'est à lui de décider si les frères Masin seront promus ou non au rang de héros officiels.