L’association proFem dresse un état des violences conjugales en République tchèque

Foto ilustrativa: Kristýna Maková

Deux cinquièmes des femmes tchèques âgées de 18 à 65 ans auraient un jour été victimes de violences conjugales qu’ils s’agissent d’agressions physiques, psychologiques ou encore économiques. Cette information est tirée d’une enquête demandée par l’association féministe proFem et présentée la semaine passée à l’occasion d’une conférence internationale au Sénat sur les violences faites aux femmes et leurs impacts économiques sur la société.

La méthodologie de l’enquête réalisée par une boîte de consulting privée à la demande de l’association proFem, qui lutte contre les violences faites aux femmes et pour la défense de leurs droits, aurait peut-être demandée à être approfondie. Au mois de février dernier, un panel dit représentatif de 3 014 femmes a été invité à répondre à 22 questions sur Internet. Cependant, les résultats présentés mardi au Sénat donnent tout de même une idée de l’importance des violences machistes en République tchèque. Ainsi, d’après les auteurs de l’enquête, 400 000 femmes auraient subi des violences domestiques l’an passé, soit 11% du total des femmes dans la population tchèque. Ces violences sont diverses et pas seulement physiques. Il peut s’agir de pressions psychologiques ou économiques et parfois d’abus sexuels. Pour la présidente de l’association proFem, Soňa Hradecká, le fait alarmant, déjà connu mais confirmé par ce sondage, est le fait que ces femmes ont tendance à cacher les abus dont elles sont victimes et qu’il est, dans ce cas, très difficile de leur venir en aide. Ainsi, seulement un dixième d’entre elles se tourneraient vers la police. Elles seraient encore moins nombreuses à se faire soigner, à contacter les services sociaux ou des associations compétentes. Soňa Hradecká donne quelques raisons qui expliquent le silence des femmes violentées :

Soňa Hradecká
« Les victimes ne se confient pas à des proches parents si elles ne ressentent pas de soutien dans leur famille. Dans certains cas, elles préfèrent se confier à une amie. Mais en ce qui concerne ce qui a pu se passer, elles en ont honte, elles ont peur de le dire car elles craignent la réaction de leur partenaire si quelqu’un venait à l’apprendre. Bien sûr, il existe des organisations non gouvernementales et des centres de crise où il est possible de se confier et où l’on conseille les femmes pour qu’elles puissent être en sécurité. »

Selon Soňa Hradecká, il faut concentrer les efforts sur la prévention. Dans cette logique, une campagne d’information sur les violences domestiques vient d’être lancée en septembre. Son slogan est le suivant :« Ne pas voir quelque chose ne signifie pas que celle-ci n’existe pas » et invite les gens à être plus attentifs à leur environnement immédiat. Car cette campagne vise également les violences faites aux personnes âgées et parfois aux hommes bien que l’enquête de proFem ne se soit pas intéressée à ce phénomène, comme l’explique Kamil Kunc, qui en a supervisé la réalisation :

Kamil Kunc,  photo: CT
« Nous n’avons pas enquêté auprès des hommes. Il se trouve qu’il y a aussi des arguments pour une étude prenant en compte les hommes, mais les enquêtes internationales que nous avons à disposition et nos propres enquêtes font apparaître que la majorité des victimes de violences domestiques sont des femmes. Même s’il est vrai qu’une partie de ces violences touchent également des hommes. »

Par ailleurs, la conférence portait également sur l’aspect économique de ces violences domestiques. Car si celles-ci ont une incidence sociale très importante et difficilement quantifiable, elles ont également un coût économique pour la société. L’étude présentée mardi au Sénat a tenté, pour la première fois en République tchèque, de quantifier ce coût. Soňa Hradecká présente la méthode utilisée et les résultats obtenus :

« Nous avons observé un certain nombre de domaines à partir desquels nous avons calculé ces dépenses. Il s’agit des dépenses liées aux services sociaux fournis, à la police, au procureur, aux frais de justice ou encore aux allocations maladie dans les cadres de la santé et du travail. Lorsqu’on rassemble tous ces éléments, les dépenses totales s’élèvent à environ 1,4 milliard de couronnes (56 millions d’euros). Parmi ces dépenses, c’est le domaine de la santé qui représente la plus grosse partie avec près d’un demi-milliard de couronnes (20 millions d’euros). »

Les frais de justices représentent le deuxième poste de dépenses liées aux violences domestiques. En République tchèque, celles-ci seraient à l’origine d’un divorce sur trois.