Violences sexuelles : le président de la police critiqué pour ses propos sur des accusations infondées
Le premier centre tchèque destiné aux femmes victimes de violences sexuelles ouvrira prochainement ses portes à Prague. Le débat sur la protection des victimes s’est encore accentué ces deniers jours, après les propos controversés du président de la police relatifs à de fausses accusations de viol.
« Il faut dire une chose, et j’espère que mes propos ne seront pas sortis de leur contexte : très souvent, les plaintes des femmes pour une agression sexuelle reposent sur une fausse accusation. Durant ma carrière, j’ai eu à faire à au moins deux témoignages qui étaient montés de toutes pièces. Les policiers doivent être prêts à cette possibilité et vérifier le bien-fondé des propos des victimes », a déclaré cette semaine le président de la police tchèque, Martin Vondrášek, dans un entretien pour le site Aktuálně.cz.
Dans cette même interview, il a souligné que des policiers spécialisés dans le domaine, souvent des femmes, travaillaient dans chaque commissariat et que la police mettait un accent particulier sur la sensibilisation de tous ces employés à la problématique via une collaboration avec des ONG.
Néanmoins, ses propos ont été vivement critiqués. « Le président de la police a craché au visage des victimes du viol », a par exemple titré le même site Aktuálně.cz.
Ministre de l’Intérieur, Vít Rakušan s’est empressé d’apaiser la polémique, notamment en qualifiant la déclaration du président de la police de « maladroite » :
« Au contraire, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que les victimes n’aient pas peur de s’adresser à la police pour signaler chaque agression sexuelle, chaque cas de violence domestique. Pour cela, nous organisons de nombreuses formations et élaborons de nouvelles méthodes destinés aux policiers. »
Pour sa part, Martin Vondrášek a déclaré ne vouloir « en aucun cas » minimiser le phénomène des violences sexuelles. En réaction à la critique de son chef, la police a publié ses statistiques internes : « En 2022, la police a engagé des poursuites pénales pour suspicion de viol dans 1 375 cas, dont 573 ont été classées », lit-on dans son communiqué. Toutefois, selon les experts, l’abandon des poursuites ne signifie pas qu’il s’agissait d’accusations infondées, mais plutôt que tous les éléments permettant de prouver le crime n’ont pas été réunis.
On écoute Michalena Studená de l’initiative « Pod svícnem » qui lutte contre les violences domestiques :
« Les fausses accusations existent, mais elles sont plutôt rares. Ce qui est plus problématique, c’est l’impact psychologique des déclarations du président de la police. Elles ne peuvent qu’affaiblir la confiance des victimes de violences sexuelles dans la police. »
Selon différentes études, environ 12 000 viols sont commis chaque année en République tchèque, mais seulement 5% sont signalés à la police.
Le premier centre spécialisé destiné aux victimes de violences sexuelles devrait être ouvert au début de l’année prochaine dans le quartier pragois de Břevnov. Son but est d’offrir, en un seul et même endroit, une assistance en cas de crise, un traitement, des conseils et une thérapie.
« Nous nous trouvons actuellement dans l’un des studios où nos clients pourront être hébergés pendant une dizaine de jours. Il y aura une salle de bain, une cuisine, un lit », explique Jitka Poláková, directrice de l’ONG proFem. Les victimes pourront passer au centre des examens médicaux et participer à des thérapies de groupe. Des travailleurs sociaux et des avocats seront également à leur disposition, de même qu’est prévue la création d’une salle d’interrogatoire spéciale pour collaborer avec la police.
À l’heure où le ministère de la Justice prépare une nouvelle législation visant à redéfinir le viol et à mieux en protéger les victimes, l’ONG proFEM a lancé une collecte de dons : 2 millions de couronnes (plus de 82 000 euros) sont encore nécessaires pour achever la construction de ce centre unique en son genre en Tchéquie.