Le 28 septembre est la fête de saint Venceslas et la Journée de l'Etat tchèque

Saint Venceslas

Merci d'être avec nous pour cette édition spéciale des Faits et événements préparés à l'occasion du 28 septembre, qui est la fête du patron des Tchèques, saint Venceslas, et la Journée de l'Etat tchèque. Le lien entre les deux significations de cette fête est plus qu'étroit. "Venceslas marque non seulement le début de l'histoire de l'Etat tchèque,"écrit dans son livre "Saint Venceslas" l'historien Dusan Trestik, "mais aussi le début de l'idée de cet Etat et de sa continuité, voilà pourquoi le 28 septembre est la journée de l'Etat tchèque."

Le culte de saint Venceslas dure depuis le Xe siècle et il reste vivant jusqu'à aujourd'hui parmi les Tchèques, un peuple des plus athées d'Europe. La statue de saint Venceslas au coeur de Prague est le témoin tacite des événements cruciaux de l'histoire tchèque. Saint Venceslas est représenté par d'innombrables oeuvres d'art et chanté par d'innombrables chorals.

Qui était Venceslas? Neuvième prince de la dynastie des Premyslides, il a consacré sa vie à la promotion de la nouvelle foi chrétienne introduite dans le pays en 863, par les apôtres byzantins Cyril et Méthode. Un prince éclairé qui a contribué à l'introduction de la culture occidentale, a réformé la jurisprudence et posé les fondements de la future cathédrale Saint-Guy. Un homme pieux qui aidait les nécessiteux et défendait les faibles. Le 28 septembre 929 ou 935, on ne le sait pas exactement, il a été assassiné à Stara Boleslav, à l'instigation de son frère aîné, Boleslav 1er le Cruel, auquel ce fratricide a ouvert la voie vers la prise du pouvoir.

Avec moi au studio M. Jan Stenicka, amateur d'histoire tchèque et guide, pour me compléter:

L'assassinat de Venceslas
"Venceslas, Vaclav en tchèque, est le symbole de la nation tchèque. Il est le premier dans notre histoire à s'être orienté vers l'Ouest de l'Europe. Venceslas, qui n'était pas roi, comme le chante la chanson de Noël "Le bon roi Venceslas", mais duc, fut le premier à protester contre la politique byzantine."

Après l'assassinat de Venceslas, une légende s'est aussitôt créée, faisant de lui un martyr mort pour la cause du christianisme. Au Xe siècle, Venceslas est canonisé. Cet acte donne une nouvelle importance à la dynastie des Premyslides, solidifie la position du peuple tchèque au sein de la chrétienté et affermit le prestige international de la Bohême. Le portrait de Venceslas, avec le bouclier des Premyslides et le drapeau, devient le symbole du pays. Il apparaît sur les pièces de monnaie, la couronne porte son nom et, symboliquement, Venceslas est compté parmi les chevaliers légendaires qui dorment dans la montagne de Blanik, prêts à sortir et à venir en aide lorsque la Bohême sera en danger. Pour les Tchèques, Saint Venceslas reste toujours leur patron principal. Des dizaines de générations imploreront, dans leurs prières, sa protection et le prieront de ne laisser périr ni eux ni leurs descendants.

Au fil des siècles, le legs spirituel de saint Venceslas, qui personnifie la sagesse, la piété, la compassion, mais aussi la fermeté et le courage, s'éternise. L'empereur Charles IV est l'un de ses plus grands admirateurs. Il fait fabriquer la couronne du Royaume de Bohême, joyau au prix inestimable, qu'on ne pose sur la tête des rois que lors des cérémonies de couronnement, mais qui doit reposer la plupart du temps sur celle de Saint Venceslas, relique la plus chère qui gît dans la chapelle Saint-Venceslas de la cathédrale Saint-Guy, au Château de Prague. Le prêtre Jan Hus, réformateur de l'Eglise catholique mort au bûcher, appelle, dans ses sermons, Venceslas "soldat de Dieu." Les hussites, qui s'insurgent, au XVe siècle, contre l'église corrompue, l'invoquent dans leurs chants et partent au combat avec l'image du saint sur leurs boucliers. Le choral de Saint-Venceslas est chanté par les hussites lors de l'élection du roi hussite, Georges de Podebrady, en 1458. Il devient une sorte d'hymne national. Après la défaite des Etats tchèques à la Montagne blanche, en 1620, qui marque la fin de l'indépendance tchèque, le peuple se réfugie, à nouveau, sous la protection du saint national. C'est alors que le choral de Saint-Venceslas connaît le plus grand épanouissement. Au XIXe siècle, les patriotes feront de Saint Venceslas le symbole de leur combat pour la renaissance nationale. Ainsi, Josef Jungmann emploie, en 1814, le terme "La langue venceslasienne" pour désigner la langue tchèque parlée à l'époque. Le fondateur de la République tchécoslovaque, Tomas Garrigue Masaryk revient une fois de plus vers le culte du patron. Dans son discours prononcé en 1929, il déclare: "Saint Venceslas était le prince de la paix, mais il se défendait vaillament et a sauvé l'Etat des Premyslides. Ses adversaires étaient obligés de poursuivre sa politique. La vie et la mort de Venceslas nous enseignent que la vie saine d'un peuple est basée sur l'érudition et la morale sanctifiée par la piété véritable..."

Les reliques de saint Venceslas reposent à la cathédrale Saint-Guy. Pourtant ce n'est pas là, mais sur la place Venceslas que les gens viennent fêter saint Venceslas. Car c'est ici que se trouve la statue équestre de ce saint. Jan Stenicka raconte:

"Nous sommes sur la place Venceslas qui n'est pas, en réalité, une place, mais une avenue longue d'un kilomètre et vieille de six siècles, datant de l'époque de Charles IV. Venceslas a été pour la première fois présent ici au milieu du XIXe siècle, quand c'était vraiment encore une place."

En effet, déjà au début du XIXe siècle, le Marché aux chevaux, comme s'appelait alors cette place, a été orné par une statue équestre de saint Venceslas. En 1848, sous l'impulsion de Karel Havlicek Borovsky, le Marché aux chevaux devient la place Venceslas. La statue de pierre de Jan Jiri Bendl est remplacée, en 1912, par le monument de bronze réalisé par Josef Vaclav Myslbek. La statue originale de saint Venceslas se trouve à Vysehrad. Un concours a été lancé pour la réalisation d'une nouvelle statue. Le premier projet proposait de la situer au centre de la place, seulement le deuxième projet de Myslbek situe la statue équestre au pied de la rampe du Musée national, un imposant bâtiment qui se dresse derrière. Myslbek représente Venceslas à cheval sur un haut piédestal, entouré de quatre sains: Procope, Adalbert, Ludmila et Agnès. Jan Stenicka précise:

"C'est notre patriotisme qui a placé saint Venceslas à cet endroit. La statue équestre, grande par ses dimensions, est encore rehaussée par un socle sur lequel elle repose et qui est une oeuvre de l'architecte Dryak, auteur de l'hôtel Evropa, à droite de la place Venceslas. Aujourd'hui, la statue est en réparation, ce qui est dommage, parce que les touristes voudraient la voir, non seulement la statue principale de Venceslas, mais aussi les quatre autres statues moins grandes qui l'entourent. Il est intéressant de rappeler qu'en 1912, date de l'élévation de la statue, il y a avait saint Ivan, patron byzantin et symbole des Russes, qui a été remplacé, après le premier conflit mondial, par Agnès, canonisée juste avant la révolution de Velours."

November 1989
Les premiers mots du choral sont gravés sur le socle sur lequel repose le monument: "Saint Venceslas, duc du pays tchèque, ne nous laisse pas périr, nous et nos descendants". Myslbek représente Venceslas comme chevalier et protecteur du peuple. Son visage sous le casque à nasal et son regard déterminé, tourné vers l'avant, est un visage d'espoir. Voilà pourquoi c'est vers ce monument qu'on se réfugie lors des moments cruciaux et vitaux de la nation: il en a été ainsi lors des manifestations contre la domination des Habsbourg. En 1918, l'Etat tchécoslovaque y a été proclamé. En 1938, la statue est devenue le symbole de la résistance contre Munich. En 1968, s'y concentrait la résistance contre l'occupation soviétique. En 1969, Jan Palach s'immole par le feu près de la statue. En 1989, la place est le lieu des manifestations ayant abouti à la révolution de Velours. Aujourd'hui, le duc légendaire observe, du haut de son cheval, les flots de touristes parcourant cette artère la plus importante de Prague. La parole est à mon invité, Jan Stenicka:

"La place Venceslas a toujours été une place de protestation. Pourquoi? Le monsieur qui est là, sur son cheval, a été le premier à avoir protesté contre la politique venant de l'Est. Il est très important de rappeler qu'à son époque, notre alphabet a été changé pour devenir un alphabet latin, alors qu'avant, il était cyrillique, ce qui est très important."