Le Musée de Pardubice met la main sur un trésor unique du Xe siècle

Le trésor de Pardubice, photo: ČTK

Un trésor qui n’a pas d’équivalent sur le territoire d’Europe centrale ; c’est ainsi que le Musée de Bohême de l’Est de Pardubice présente la découverte de centaines de deniers d’argent, des pièces de monnaie, pour certaines jusqu’alors inconnues, qui dateraient de la fin du Xe siècle. La trouvaille, annoncée cette semaine, remonte en fait à l’automne dernier et il faudra plusieurs mois supplémentaires pour qu’elle puisse être exposée au public.

Le trésor de Pardubice,  photo: ČTK
Le lieu de la découverte est pour l’heure gardé secret : les archéologues espèrent pouvoir dénicher en toute tranquillité de nouveaux artefacts. Des objets qui viendraient enrichir un trésor déjà riche d’environ 400 deniers d’argent, 300 fragments de pièces ainsi que de tessons de céramique, laquelle a servi de contenant à cette masse de monnaie. Peu loquaces sur les circonstances de la trouvaille – on sait tout de même qu’il s’agirait d’un site localisé aux abords de l’Elbe -, les historiens rattachés au Musée de Bohême de l’Est de Pardubice préfèrent discourir sur ses caractéristiques, à l’image du directeur de l’établissement Tomáš Libánek :

« Il s’agit de pièces d’argent datant de la fin du Xe siècle. Elles sont attribuées à Boleslav II (duc de Bohême de 967 à 999, ndlr) et à Boleslav III (l’un de ses fils, duc de Bohême de 999 à 1004, ndlr) et il est aussi possible que nous trouvions de la monnaie frappée par Boleslas Ier le Vaillant (duc de Pologne de 992 à 1025, date à laquelle il est fait roi, ndlr). Il s’agit d’un point qui va certainement permettre d’apporter de nouvelles connaissances pour l’Etat tchèque et l’histoire tchèque ancienne. »

Le trésor de Pardubice,  photo: ČTK
La période probable de l’enfouissement correspond à l’époque du lent processus de construction d’un Etat en Bohême sous l’impulsion de la dynastie des Přemyslides et en parallèle de la christianisation progressive des pays tchèques. Toutefois, le tournant de l’an mille correspond aussi à des temps de troubles avec la Pologne voisine, le souverain polonais Boleslas Ier le Vaillant se proclamant duc de Bohême et de Moravie en 1003 et faisant la guerre au Saint-Empire pour l’hégémonie de ces territoires. Des tensions qui ont peut-être à voir avec le fameux trésor pour Petr Vorel, historien numismate au Musée de Pardubice :

Petr Vorel,  photo: ČTK
« Peut-être que cette période agitée au début du XIe siècle a conduit quelqu’un, et nous pouvons bien sûr spéculer sur l’identité de ce quelqu’un, à enfouir cette fortune. Une fortune colossale, qu’on ne peut appréhender avec les mesures contemporaines, et que n’aurait pas pu amasser le commun des mortels. Cela veut dire qu’il doit être question d’une réserve constituée quelque part dans le milieu de la famille ducale, qu’il s’agisse d’un fonds pour les soldats que quelqu’un transportait ou bien de l’épargne de quelqu’un de la haute aristocratie. »

Petr Vorel remarque que le métal utilisé, de l’argent, est de très bonne facture et que cette monnaie était probablement utilisée dans le cadre d’échanges internationaux. Le denier, qu’on connait sous le nom de « denár » en tchèque, le lointain ancêtre du mot « dollar », est alors une introduction récente en Bohême, comme le soulignait sur notre antenne Vojtěch Poláček, lors d’une exposition au Musée national consacrée à la monnaie dont il était le curateur :

Le trésor de Pardubice,  photo: ČTK
« En République tchèque, c’est-à-dire dans l’Etat « slave », qui est apparu autour du IXe siècle, les premières monnaies datent du Xe siècle. Il s’agit de deniers, le plus ancien étant le denier de Boleslav Ier (le père de Boleslav II, ndlr). »

Les historiens auront fort à faire désormais à analyser ces centaines de deniers. Aussi, le Musée de Pardubice ne prévoit pas de les exposer au public avant septembre prochain. Si ce trésor n’a pas profité à celui qui l’a enterré, il aura tout de même fait un bienheureux. Son découvreur, dont l’identité n’a pas été dévoilée, aura droit de recevoir un dixième de la valeur de sa trouvaille. Cette valeur n’a pas encore été établie avec précision, mais elle est estimée à plusieurs millions de couronnes.