Le NERV, Conseil économique du gouvernement
Mercredi, le gouvernement a présenté son programme de politique générale. Dans ce document d’une quarantaine de pages, les questions économiques sont prédominantes. La réduction des déficits publics est le leitmotiv du nouveau gouvernement qui s’est doté d’un organe de conseil économique, le NERV (Národní ekonomická rada vlády).
« On ne peut pas exclure que sur certains points, le conseil économique puisse convaincre le gouvernement de changer des positions qui sont le résultat d’un compromis de la coalition. Et ceux qui resteront sur ce compromis seront peut-être convaincu par ces experts économiques que leur point de vue n’est pas raisonnable et changerons d’avis. Nous voulons respecter l’indépendance du potentiel intellectuel de cet organe. »
Le conseil économique du gouvernement est tout de même loin de ressembler par exemple, au conseil économique et social français, cette assemblée constitutionnelle consultative qui regroupe les représentants de la plupart des acteurs économiques du pays – syndicats d’employés et de dirigeants d’entreprises, artisans, familles etc. En République tchèque, il était composé de dix experts économiques sous le gouvernement Topolánek. Petr Nečas a fait appel à cinq experts de plus, parmi lesquels certains noms connus, comme Tomáš Sedláček, un jeune économiste souvent invité des plateaux télévision, ou encore deux ex-ministres des Finances, Eduard Janota, sous le gouvernement intérimaire de Jan Fischer, ou Jiří Rusnok, sous le gouvernement Špidla, de 2001 à 2002. Certains de ces spécialistes ont construit leur carrière dans des banques, qu’il s’agisse de banques privées ou de la banque nationale tchèque. D’autres dans des multinationales, ou dans les universités. Mais tous ont déjà eu plusieurs postes de conseillers, et la plupart d’entre eux sont déjà intervenus au service des gouvernements successifs. Enfin, certains avaient déjà fait partie du premier Conseil économique du gouvernement, comme Miroslav Zámečník, Jiří Schwarz, ou Petr Zahradník. On écoute d’ailleurs Petr Zahradník, qui, fort de son expérience avec le NERV première version, explique comment il conçoit la restauration de cette institution :« Le premier NERV est né ad hoc, à l’époque de la crise, et à l’époque du début de la présidence de la République tchèque de l’Union européenne, alors que le gouvernement était en plein mandat, tandis que ce NERV commence en début de mandat du nouveau gouvernement. J’ai le sentiment qu’il y aura beaucoup plus de place pour des conceptions et des analyses à long terme plutôt que ces solutions ad hoc pratiques et opérationnelles comme cela avait été exigé lors de la présidence tchèque de l’UE et pour réagir rapidement à la crise. »Les missions de ce Conseil économique du gouvernement ont été en effet clairement définies par le gouvernement de coalition. Petr Nečas :
« Premier domaine : la stabilisation du déficit public et de la dette. Deuxième domaine : la réforme des retraites. Troisième domaine : la lutte contre la corruption et pour la transparence des marchés publics. Le quatrième domaine est celui des politiques économiques dans le cadre de l’Union européenne. Le cinquième point est celui du maintien de la compétitivité du pays et le sixième celui du soutien à l’entreprenariat. »Les objets de travail des quinze experts du Conseil économique du gouvernement sont précisément déterminés. Sans surprise, ils correspondent aux priorités définies pendant la campagne électorale et après la formation du gouvernement par les trois partis de la coalition. Voici les les commentaires de Tomáš Sedláček, jeune économiste très en vue et très prometteur, qui était d’ailleurs déjà membre du premier NERV :
« J’ai parcouru le programme et par exemple, la question de l’euro, qui a un peu disparu des médias, y apparaît avec la définition d’un délai et la volonté de tenir ce délai pour l’introduction de la monnaie européenne en République tchèque. C’est une position avec laquelle je suis d’accord. Je suis content que le gouvernement se penche sur la corruption. Parler des investissements et les exportations est aussi légitime, et il y a la volonté de transformer notre économie, d’une économie un peu lourde comme dans les années 1990 vers une économie plus légère, sur le modèle finlandais par exemple, et non pas une économie où domine l’automobile ou la production industrielle. On devrait se diriger plutôt vers la valeur plutôt que la matière, la qualité plutôt que la quantité. »
La création ou refondation de ce Conseil économique du gouvernement laisse cependant quelques observateurs sceptiques, et notamment l’opposition politique, pas tant sur la composition du conseil, puisque ses membres sont d’obédiences politiques différentes, mais sur l’efficacité de ce conseil. Bohuslav Sobotka, chef intérimaire de la social-démocratie tchèque :
« Je ne crois pas que ce conseil soit complètement inutile mais le gouvernement doit compenser le fait qu’il n’a pas de politique économique propre. Si l’on regarde la déclaration de politique générale, il n’y a aucun objectif concret clairement défini. Il n’y a rien qui pourrait soutenir l’emploi et je pense que le Petr Nečas, en fondant à nouveau le NERV, fait en sorte de cacher le fait que le gouvernement, actuellement, n’a pas de stratégie économique clairement définie. »Les partis de l’opposition vont donc surveiller de près ce Conseil économique du gouvernement. Il est difficile de savoir, effectivement, quelle sera le réel pouvoir de cet organe, son audience et la façon dont il pourra être utilisé dans les médias, parfois peut-être pour justifier de mesures impopulaires. Ses recommandations pourraient également se heurter à certaines démarches électorales lors des prochaines campagnes de l’automne prochain. Quoiqu’il en soit, des rencontres régulières, chaque mois, devraient avoir lieu entre les quinze membres du conseil, et ces derniers devraient être en contact étroit avec différents ministères. Tomáš Sedláček, sur la collaboration entre le NERV et le gouvernement :
« J’attends que le Premier ministre Petr Nečas et les ministres viennent consulter le NERV comme par le passé et qu’ils ne nous utilisent pas simplement pour une question d’image. Les membres du conseil ne sont pas payés, c’est un travail bénévole, donc si le gouvernement ne nous considère pas, qu’il s’agit seulement d’un coup médiatique et que nous sommes là seulement pour la parade, le conseil se dissoudra de lui-même. Mais je suis content qu’un gouvernement ait renoué avec ce mode de consultation, avec des experts. Je serais personnellement content si des organes comme le NERV apparaissaient, et pas seulement dans le domaine économique, mais aussi par exemple, dans l’art, la culture, les transports etc. »Le NERV a eu sa première réunion jeudi 5 août. A noter qu’à l’image du gouvernement, il ne compte aucune femme.