Le zoo de Prague vient d’accueillir son premier wombat
Début janvier, un wombat répondant au nom de Cooper, a fait ses premiers pas sur la scène du zoo de Prague. Premier wombat en République tchèque depuis les années 1950 et l’un des seuls en Europe, Cooper est né en Allemagne, au Zoo de Hanovre, où il a passé 17 mois avec sa mère, avant d’arriver en République tchèque début décembre et de passer un mois de quarantaine. Yolandi Vermaak, la fondatrice et présidente de l’association australienne Wombat Support & Rescue, a accepté de nous parler de cette espèce peu connue en Europe et protégée en Australie.
Le wombat est un marsupial originaire d’Australie. Il y a trois sous-espèces de wombats : le wombat à nez poilu du Sud et du Nord et le wombat commun. Nouveau locataire du zoo de Prague, Cooper est un wombat commun, mais il a pour spécificité d’être un wombat de Tasmanie, une sous-espèce de ce wombat commun qui, comme son nom l’indique, est indigène de Tasmanie et est légèrement plus petit. Yolandi Vermaak nous décrit à quoi ressemble un wombat :
« Les gens comparent souvent les wombats à de petits ours parce qu'ils sont très trapus. Adultes, ils peuvent peser jusqu'à quarante kilogrammes. Leur musculature est assez dense. On les appelle aussi les bulldozers de la brousse parce qu'ils passent littéralement au bulldozer à travers tout. Ce sont des animaux incroyablement forts.
Les femelles ont une poche parce que ce sont des marsupiaux. Nous avons quelques marsupiaux en Australie et le wombat est l’un d’entre eux. La différence entre tous les autres marsupiaux et les wombats est que leur poche est orientée vers l'arrière et que lorsque la mère creuse son terrier, la terre ne peut pas aller dans la poche et déranger le bébé car elle est orientée vers l'arrière, c'est donc un trait évolutif incroyablement intéressant des wombats.
Par ailleurs, lorsqu'un bébé naît, il mesure environ vingt millimètres de long, c'est une toute petite chose de deux grammes et c'est ainsi qu'il atteint quarante kilogrammes à l'âge adulte. En captivité, il peut vivre plus de trente ans, alors qu'à l'état sauvage, nous estimons qu'il vit cinq ans en raison de tous les défis auxquels il est confronté. Les petits vivent avec leur mère entre 18 et 24 mois.
La chose la plus célèbre à propos des wombats est sans doute leurs excréments en forme de cubes. Quand ils défèquent, ils le font sur des pierres pour marquer leur territoire. »
Les wombats sont tellement connus pour la particularité de leurs excréments que le zoo de Prague s’en est amusé en proposant aux visiteurs des « cubes de wombat », des friandises au massepain et des biscuits en forme de cubes rappelant les crottes pour le moins originales du marsupial.
Les wombats sont également connus pour leur capacité à creuser des terriers allant jusqu’à 20 ou 30 mètres de longs, chaque tunnel étant lui-même composé d’une série de tunnels se terminant par une « chambre » où le wombat dort. Ainsi, les wombats créent de véritables labyrinthes souterrains alors même qu’ils n’utilisent qu’une seule entrée.
Cette capacité à creuser des tunnels a posé un véritable problème logistique pour les équipes du zoo. Pour que Cooper ne creuse pas un tunnel trop long et ne s’échappe pas du zoo de Prague, son directeur Miroslav Bobek a fait installer des filets en acier enfouis jusqu’à deux mètres sous le sol.
Ces tunnels ne sont pas seulement une curiosité de la nature. Ils peuvent également avoir une fonction importante. L’Australie est en effet régulièrement ravagée par de terribles incendies, ce qui a un effet désastreux sur la faune et la flore locale. Or, certains animaux trouvent refuge dans ces terriers. S’il peut être tentant d’en faire des animaux héroïques, sauveurs de leurs congénères, Yolandi Vermaak nous rappelle qu’il ne faut pas embellir la réalité et qu’il s’agit avant tout d’heureuses coïncidences :
« Ce qui se passe, c'est que les animaux cherchent des abris pendant les incendies, donc c’est une heureuse coïncidence, ce n'est pas comme si les wombats amenaient les animaux dans les terriers. Les wombats sont probablement endormis au fond des terriers lorsque cela arrive. Une fois que le feu commence, les animaux savent instinctivement comment chercher des abris : s'il y a un terrier et qu'ils sont assez petits, ils vont les utiliser. »
Bien que les wombats soient relativement bien protégés contre les incendies, Yolandi Vermaak nous informe qu’ils n’en restent pas moins une espèce menacée en Australie.
« Les trois sous-espèces ont des états de conservation différents, le nez poilu du Nord est en danger critique d'extinction, il en reste un peu plus de 200 à l'état sauvage. Le nez poilu du Sud est quasi menacé, il est en voie d'extinction et deviendra donc un jour ou l'autre une espèce en danger. Le wombat commun n'est pas classé comme menacé à ce stade. Nous pensons que cela changera d'ici une vingtaine d'années, car leur nombre diminue considérablement, mais pour l'instant, ils ne sont pas en danger. »
Parmi les raisons de ce déclin, on retrouve les défis de la nature, comme les feux de brousse ou les inondations, celles-ci causant certainement le plus de dégâts car les wombats aiment construire leurs terriers à proximité des cours d’eau et sont donc exposés à un risque de noyade.
L’homme a également un rôle à jouer dans leur disparition, car des permis d’abattage sont encore délivrés aux fermiers australiens qui n’hésitent pas à abattre les wombats lorsqu’ils causent des dommages à leurs exploitations
L’homme est ainsi, malheureusement, vraisemblablement le deuxième prédateur du wombat, après les dingos. Selon Yolandi, les wombats ne sont néanmoins pas des animaux agressifs et n’attaqueraient pas l’homme. Ces animaux, qui sont, rappelons-le, herbivores, ne se battent presque exclusivement qu’entre eux pour conserver leur territoire.
Ce qui a néanmoins accéléré le déclin des populations de wombats d’une façon si alarmante, c’est l’épidémie de gale sarcoptique qui sévit à l’heure actuelle en Australie. 70% des wombats en sont vraisemblablement affectés et lorsqu’un wombat est malade, son taux de mortalité est de 100%.
C’est notamment pour sensibiliser à cette question que l’association Wombat Rescue a été fondée. Elle met en effet en place des programmes de traitement de la gale dans les zones où les wombats sont malades de la gale sarcoptique et cherche à sensibiliser et à éduquer les Australiens quant à la souffrance de ces animaux. L’association essaie également de changer la législation et d’établir un dialogue avec les autorités tout en ayant une action directe en faisant des rondes pour sauver les wombats dans le besoin, comme par exemple les wombats malades ou les petits dont la mère a été abattue.
Dans ce combat pour sauver les wombats, Yolandi considère le travail des zoos comme celui de la capitale tchèque comme essentiel :
« Les gens ont besoin de voir les wombats. Si l’on voit l'animal de près, le message passe beaucoup mieux. En termes de conservation, il est extrêmement important que les zoos continuent d’avoir ce rôle de promotion des messages de protection en montrant au public qu’il a aussi les moyens d'aider les associations qui les protègent et d’avoir ainsi un impact. »
L’accueil de Cooper le wombat est un exemple de l’engagement du zoo de Prague pour la protection et la sauvegarde des espèces menacées parmi tant d’autres. On se rappelle par exemple des chevaux de Przewalski, une espace menacée d’extinction que le zoo accueille régulièrement depuis plusieurs années afin de ré-acclimater les individus à Prague pour ensuite les relâcher dans la nature en Mongolie.
Et pour ceux qui pourraient s’inquiéter de la solitude de Cooper à Prague, qu’ils se rassurent, c’est une espèce majoritairement solitaire :
« Le wombat à nez poilu du sud vit en famille mais pas le wombat commun. Les mâles sont très solitaires et les femelles vivent avec leurs petits. S'ils partagent des terriers, chacun a sa chambre. Ils ne s'entendent pas très bien, ils pourraient partager des terriers mais ils ne s'aiment pas beaucoup et sont donc assez solitaires. Je ne pense pas que Cooper mourrait d'être seul, mais ce serait bien pour lui d'avoir un compagnon. »
Cooper est à voir au Zoo de Prague dans l’enclos « wombat ». On lui souhaite que d’autres wombats le rejoignent vite !