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5) Que de vie à l’Université tchèque des sciences de la vie de Prague

Université tchèque des sciences de la vie

C’est peu dire que Manhattan et Thalia sont heureuses d’être à Suchdol. Et pas seulement parce que leur école possède sa propre brasserie. Situé sur la rive gauche de la Vltava, Suchdol est le nom du quartier au nord de Prague où se trouve l’Université tchèque des sciences de la vie (Česká zemědělská univerzita v Praze - ČZU, en tchèque).

De l’agrobiologie et ressources naturelles à la sylviculture et aux sciences du bois en passant par les sciences de l’environnement ou même encore l’agriculture tropicale, son campus regroupe aujourd’hui six facultés, un institut et, surtout, quelque 20 000 étudiants.

Car en plus d’être un important lieu de savoir et d’apprentissage, le campus de la ČZU est aussi un formidable lieu de vie, au sens propre comme figuré, et d’échanges, comme en témoignent les deux Françaises que nous y avons rencontrées, Manhattan et Thalia, pour la suite et fin de notre série consacrée aux cinq meilleures universités en République tchèque.

Manhattan Lebrun et Thalia Pelegrin | Photo: Guillaume Narguet,  Radio Prague Int.

M.L : « Je m’appelle Manhattan Lebrun et suis en post-doctorat à l’université de Prague depuis un an. »

T.P : « Je m’appelle Thalia Pelegrin et suis en fin de master à l’Université des sciences de la vie de Prague aussi. Je suis française mais n’ai jamais vécu en France. »

Thalia, c’est vous qui nous avez emmenés dans ce très bel endroit du campus. Où sommes-nous donc ?

Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Elena Vedere,  Radio Prague Int.

T.P : « Nous sommes dans les jardins botaniques. Notre université est très verte et écologique, ils ont fait beaucoup d’avancées pour amener de la biodiversité dans les endroits et on encourage ça avec les communautés autour de nous. C’est un jardin très joli à visiter, pour étudier, pour se relaxer, pour voir des animaux et des oiseaux souvent. »

Vous avez dit être française sans jamais avoir vécu en France. La République tchèque est donc pour vous une nouvelle expérience. Comment vous êtes-vous retrouvée à Prague ?

T.P : « Ma mère travaillait pour l’Union européenne en tant que diplomate, j’ai donc beaucoup voyagé dans mon enfance, et souvent j’habitais en Afrique. J’ai toujours voulu étudier ses écosystèmes et, par hasard, après ma licence, j’ai trouvé sur Internet cette université qui proposait un master vraiment spécifique sur le sujet des écosystèmes africains. Cela avait l’air très intéressant, j’ai donc voulu m’y installer. »

T.P : « Je travaille vraiment sur les écosystèmes, la faune et la flore africaines, donc tout ce qui a trait aux attaques contre les animaux en raison des conflits entre humains qui habitent dans ces endroits. Nous essayons de trouver des solutions sans ‘énerver’ trop de monde, si l’on peut le dire ainsi. C’est ce qui me passionne le plus, surtout parce que les écosystèmes africains sont très divers, constamment en train de se développer avec le tourisme. C’est vraiment un sujet très intéressant. »

Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

Cela peut sembler étonnant qu’il soit possible d’étudier cela en République tchèque…

T.P : « Absolument, mais ma faculté spécifiquement a des ‘agri tropics’. Beaucoup de personnes, des professeurs ont des associations avec d’autres organisations et des parcs nationaux en Afrique. Cela nous donne la possibilité de pouvoir y aller et de travailler sur le monde africain ».

C'est pourquoi il y a aussi beaucoup d’étudiants africains à Suchdol.

Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

T.P : « Absolument, il y a énormément de développement dans des agricultures ou des façons de faire de l’agriculture moderne et soutenable. Donc beaucoup de personnes africaines viennent ici pour étudier, puis ramener ce savoir et l’implémenter en Afrique, là où ils habitent ».

Donc, même en restant à Prague, vous restez dans votre élément africain ?

T.P : « Absolument, oui. J’ai beaucoup d’amis qui viennent de partout car c’est une université vraiment internationale. Il y a beaucoup de Français, des gens d’Amérique latine, et aussi bien sûr, donc, du continent africain. »

Vous, Manhattan, votre parcours est un peu différent. Qu’est-ce qui vous a amené à Prague ?

Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

M.L : « Ce n’est pas vraiment le hasard mais par connexion. J’ai fait ma thèse à la fois en France et en Italie, et quand il a fallu trouver un évaluateur pour ma thèse, cela a été un des professeurs de Prague que mon directeur de thèse avait rencontré dans une conférence. Comme il avait apprécié mon travail, lorsqu’il a eu un poste ici, il m’a demandé si je voulais venir. Comme j’aimais ce qu’il faisait, j’ai accepté et cela s’est très bien passé. J’aime beaucoup être ici. »

Quel est le thème de vos travaux ?

M.L : « Je travaille sur l’amélioration des sols dégradés, que ce soit d’anciens sites miniers avec des contaminations plutôt inorganiques ou des sols agricoles dans lesquels on essaie de réduire l’utilisation d’intrants fertilisants chimiques, ou les aider pour tout ce qui est stress hydrique, essayer d’améliorer tout ce qui est rétention en eau… »

Tous vos travaux se passent en anglais, mais votre professeur, qui est tchèque, parle aussi parfaitement français.

M.L : « Oui, mais, de toute façon, il n’y a pas tant de Tchèques que ça dans mon département. Il y a deux post-doctorants avec moi qui sont tchèques et une doctorante. Mais tous les autres doctorants viennent d’Europe ou même d’autres pays. Il y en a certains d’Iran ou d’autres pays africains aussi. Donc, tout se passe en anglais, tous nos techniciens parlent anglais. C’est très pratique, il n’y a pas besoin d’apprendre le tchèque si l’on veut rester ici. D’ailleurs, dans notre département, nous avons un master spécifiquement en anglais, ce qui fait que l’on peut avoir des étudiants de partout. »

Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Elena Vedere,  Radio Prague Int.

Qu’est-ce qui fait la particularité de la ČZU par rapport aux autres universités de ce type en Europe ?

M.L : « J’ai été à l’université en France, j’ai été un peu en Italie, un peu en Belgique. Déjà en France, méme lorsqu’il y a des étrangers, on continue de parler en français. C’était du moins le cas dans mon université . Et je trouve qu’ici, il y a vraiment beaucoup d’inclusion, tout le monde parle en anglais, il n’y a pas de problèmes. En France, on pense toujours que les pays un peu plus à l’Est sont plus pauvres, mais je trouve que la ČZU est plus riche que la mienne. Je n’ai pas de parc comme celui-ci dans mon université. Ici, tous les bâtiments sont quasiment neufs. Et comme l’a dit Thalia, sur l’écologie, ils ont par exemple un système de traitement de l’eau et quand de l’eau est utilisée pour un divertissement, ce n’est pas de l’eau potable. Ils ont vraiment beaucoup de systèmes là-dessus. D’ailleurs, dans notre nouveau bâtiment, ils vont faire tout un mur de végétation que je n’ai encore jamais vu ailleurs.

La faculté des sciences agricoles tropicales | Photo: Université tchèque des sciences de la vie

Justement, le site où vous allez bientôt travailler est actuellement en travaux et, déjà, vous nous avez dit être impatiente de le découvrir ?

M.L : « Oui, car ils ont eu un financement pour faire un nouveau bâtiment et comme nous sommes beaucoup dans notre département, c’est compliqué en termes de place. Nous allons donc avoir un nouveau laboratoire, plus spatieux. Ils ont pensé ce bâtiment de manière écologique. Au niveau des toits, il va y avoir un 'rooftop' pour avoir de la végétation un peu partout, collecter l’eau. Parfois, sur le campus, ils collectent les eaux usées pour notre propre recherche. On utilise de la vraie eau usée pour réaliser nos travaux de recherche et être au plus proche de ce qui se passe en vrai. »

Et vous, Thalia, êtes-vous aussi satisfaite de ce que vous avez découvert, des conditions d’étude de travail ?

Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

T.P : « J’ai vraiment beaucoup aimé mes études ici, car dans ma faculté on est beaucoup dans la pratique aussi. En dehors de l’université, nous avons une ferme à Lány, qui se trouve à 40 minutes d’ici. On y a fait des travaux pratiques là-bas car nous avons des élands, une antilope africaine, avec laquelle nous travaillons actuellement. En tant qu’étudiants, nous avons l’opportunité d’aller là-bas et de vraiment comprendre comment se développent et grandissent les animaux. On peut même aider à la collection de données sur leur poids, leur sang pour comprendre comment ils grandissent et s’ils sont en bonne santé. Donc, il y a beaucoup d’éléments de pratique. Nous avons aussi pu aller dans le sud de la République tchèque dans une 'ferme de crocodiles', mais c’était plutôt un zoo, dans lequel se trouvaient au moins vingt espèces de crocodiles. C’est vraiment très divers et il y a beaucoup de choses à apprendre et on a le droit d’expérimenter avec la pratique dans mon domaine. »

Et vous, Manhattan ?

Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Guillaume Narguet,  Radio Prague Int.

ML : « Me concernant, je suis encore là au moins pour toute l’année 2023. Ensuite, on verra, car le système tchèque est très différent du français dans le sens où les post-doctorants déposent des projets de recherches qui peuvent être financés et vraiment porteurs. Or, c’est une chose, écrire un projet de recherches, que j’ai beaucoup aimée ici, c’était la première fois, et que je n’avais jamais faite en France. Du coup, j’essaie de faire en sorte de pouvoir rester en République tchèque. Et tant que j’aimerai cela, je resterai, d’ailleurs ! »

Malgré ce très beau site à Suchdol, toutes les deux avaient fait le choix de loger dans le centre de Prague. Pourquoi, alors que nous sommes ici justement un peu à l’écart de la ville, avec beaucoup de possibilités de balades à pied ou à vélo dans la campagne environnante ?

TP : « En fait, j’aime beaucoup explorer de nouvelles villes et Prague est une trps jolie ville où il y a plein de choses à faire, surtout quand il commence à faire beau. J’ai donc préféré me rapprocher de ces activités plutôt que de la nature où, si je le veux, je peux être pratiquement tous les jours. Cela n’a pas été un choix très difficile à faire à moi, mais pour ceux qui préfèrent la nature, oui, je conseillerais de vivre à Suchdol. »

ML : « Moi, j’ai pris l’appartement que l’on me proposait et qui n’est pas très éloigné de l’université. Et comme j’aime beaucoup aller au cinéma, le centre-ville est plus pratique. Le système de transports en commun est très bon et permet de se déplacer partout. Il me faut une demi-heure le matin pour me rendre de chez moi jusqu’à l’université, donc habiter en centre-ville ne pose absolument aucun problème. L’autre chose est qu’il nous arrive assez régulièrement de sortir avec les collègues, donc pour ça aussi, le centre-ville présente des avantages. »

Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

ML : « Et puis le centre international de l’université organise aussi beaucoup de visites pour les étrangers. Il peut s’agir de visites de villes tchèques comme, par exemple aussi, de randonnée en montagne. J’y participe régulièrement et cela permet de rencontrer beaucoup d’autres gens. »

Miss Agro | Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

ML : « Enfin, j’ai l’impression que le moindre prétexte est l’occasion d’organiser une fête, comme par exemple le Jour de la Terre. Il y a aura aussi prochainement la fête de Miss Agro (le 16 mai), des concerts... Il y a des terrains de sport, une piscine pour les employés de l’université et les étudiants... Vraiment, il y a tout ce qu’il faut et tout est possible ici. »

TP : « C’est vrai, c’est très facile d’y vivre, car il y a aussi bien sûr des chambres pour les étudiants. Au-delà des activités, comme pour moi qui suis passionnée des animaux, il y a aussi des écuries dans les alentours, on peut donc faire du cheval, et des ruisseaux dans lesquels on trouve des salamandres... Enfin, souvent le jeudi après-midi, on fait du ‘networking’ avec nos professeurs dans les bars qui se trouvent sur le campus pour mieux comprendre ce qu’ils font dans leurs recherches. C’est comme ça qu’il arrive parfois que, le soir, un prof décide de nous emmener chercher des salamandres... Et on en trouve ! »

Manhattan Lebrun et Thalia Pelegrin | Photo: Guillaume Narguet,  Radio Prague Int.

TP : « Chaque début d’année est aussi organisée une sorte de journée Formule 1 où des ingénieurs de la ČVUT présentent la voiture qu’ils ont eux-mêmes créée. Une partie du terrain du campus est alors bloquée de manière à pouvoir les voir conduire. C’est très intéressant. »

La brasserie de l'Université tchèque des sciences de la vie | Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie

TP : « Et comme nous sommes en République tchèque, je n’oublie pas que nous avons une bière qui est produite sur le campus même... »

ML : « Ouaih, il y en au au buffet de la fac... »

TP :« Donc, à chaque fois qu’une manifestation est organisée, c’est souvent cette bière-là qui est servie, même parfois gratuitement. »

ML : « Du vin aussi est produit. Bon, je l’ai fait goûter à mon père et peut-être n’est-il pas suffisamment bon pour des Français, mais je trouve que c’est quand même assez sympa. Il y a du miel de l’université... On trouve pratiquement de tout à la boutique cadeaux. »

TP : « L’autre truc qui m’a beaucoup plus aussi, c’est le tournoi de hockey sur glace qui réunit les quatre grandes universités de Prague. Au stade, comme nous sommes l’Université des sciences de la vie, nous supporters étions bien évidemment habillés en vert. Les autres étaient en bleu, rouge ou blanc, et c’est vraiment un événement très sympa ! »

Photo: Petr Zmek,  Université tchèque des sciences de la vie
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