Les Tchèques commémorent le centenaire de l’assassinat de « leur » Ferdinand
Il y a cent ans de cela, le 28 juin 1914, l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche était tué dans un attentat à Sarajevo, événement qui, par le jeu des alliances entre les différents pays européens, allait déclencher la Première Guerre mondiale. Aussi, tout le week-end, des commémorations se sont déroulées en République tchèque, qui, à l’époque, faisait partie de l’Empire austro-hongrois et où résidait la victime.
« Le premier tir a touché sa femme Sophie Chotek à l’abdomen et le second François-Ferdinand au cou. Au fond, les assassins avaient bien calculé leur coup. »
Mécontents de l’annexion illégale de la Bosnie-Herzégovine par l’Autriche-Hongrie en 1908, les nationalistes serbes ont aussi bénéficié du facteur chance car une première grenade lancée sur le véhicule archiducal avait manqué sa cible. Aussi, c’est au hasard d’un changement d’itinéraire et d’une manœuvre maladroite de son conducteur, le Tchèque Leopold Lojka, que la voiture s’est retrouvée bloquée au milieu de la foule et à portée de pistolet de Gavrilo Princip.Ce jeune homme de 19 ans, qui se dit nationaliste yougoslave, membre de l’organisation révolutionnaire Jeune Bosnie à l’instar de l’écrivain nobélisé Ivo Andrić, devient un héros en Serbie. Côté autrichien, on ne l’entend évidemment pas ainsi et, dans l’impossibilité de le condamner à mort en raison de son âge, Gavrilo Princip est incarcéré dans la forteresse de Terezín, à quelques dizaines de kilomètres au nord de Prague, complexe qui sera utilisé comme camp de concentration durant la Seconde Guerre mondiale. Atteint de la tuberculose depuis son enfance et souffrant de mauvais traitements, le Serbe allait y mourir en avril 1918. Historien spécialiste de l’univers carcéral, Aleš Kýr raconte :
« Chaque prisonnier avait le droit à un lit, en l’occurrence pour Gavrilo Princip il s'agissait d'un lit rudimentaire en bois. Ensuite, il y avait une petite table avec un emplacement pour manger et un récipient pour boire. Les conditions de détention, l’humidité et le froid ont contribué à aggraver sa maladie. »
« Ils nous ont tué Ferdinand », annonce-t-on au brave soldat Švejk, dans le récit du même nom de Jaroslav Hašek. En République tchèque, cent ans après, François-Ferdinand semble susciter le plus de compassion. Celui-ci, qui avait pourtant des ‘relations exécrables’ avec les locaux, résidait non loin de Prague, dans le château de Konopiště. C’est là qu’est exposée la balle qui a eu raison de l’archiduc. C’est là aussi que ce week-end, Dominik Duka, le chef de l’Eglise catholique tchèque, a célébré une Messe de Requiem à sa mémoire. Y participaient plusieurs centaines de personnes, parmi lesquelles le ministre de la Culture, le chrétien-démocrate Daniel Herman, mais aussi certains nostalgiques de la monarchie. Le cardinal et archevêque de Prague a eu ces mots :« Cet événement s’est en fait projeté dans l’histoire de tout le XXe siècle. Nous pouvons sentir que les avertissements avant l’éclatement du conflit mondial sont encore bien actuels. »
Avec l’étincelle de Sarajevo, les tensions montantes sur le continent européen vont se transformer en guerre mondiale. En représailles à l’assassinat de François-Ferdinand, l’Autriche-Hongrie déclare la guerre au Royaume de Serbie le 28 juillet. Le jeu des alliances entraîne alors les puissances du Vieux Continent et leurs colonies dans un des conflits les plus dévastateurs de tous les temps.