Migration : la République tchèque va lancer un programme d’aide à destination des pays d’Afrique du Nord
Au plus fort de la crise migratoire qui a touché l’Union européenne à partir des années 2010, la République tchèque, tout comme ses voisins du groupe de Visegrád, s’est distinguée par son intransigeance par rapport à l’accueil et à la répartition de ces réfugiés entre les Etats-membres. Aujourd’hui, la République tchèque veut mettre en pratique ce que ses dirigeants ont répété depuis le début : régler la question migratoire hors de l’Europe.
700 millions de couronnes échelonnés sur trois ans, alloués pour venir en aide, sur place, aux pays d’Afrique du Nord et du Sahel les plus susceptibles d’avoir de nombreux candidats au départ vers d’autres horizons. C’est la somme que la République tchèque pourrait débloquer dans le cadre d’un programme élaboré par les ministères des Affaires étrangères, de la Défense et de l’Intérieur, pour, estiment-ils, prévenir la « migration illégale ». Tomáš Petříček (ČSSD), ministre des Affaires étrangères :
« Nous essayons de combiner l’aide humanitaire, la stabilisation et l’aide au développement socio-économique de ces pays, afin de limiter les flux migratoires vers l’Europe. Trois pays sont prioritaires pour nous dans le cadre de ce programme : l’Ethiopie, le Mali et le Maroc. »Pour mettre en œuvre ce programme de trois ans, les ministères se sont inspirés de leurs activités menées par le passé dans certaines régions du Proche-Orient comme le précise encore Martin Tlapa, vice-ministre des Affaires étrangères :
« Ces projets pour l’Afrique s’inspirent en fait de ce que la République tchèque a pu déjà faire en Irak ou dans le cadre de la reconstruction de la Syrie. Nous nous efforçons de mettre sur pied des projets humanitaires et de développement avec d’autres ministères afin d’apporter une aide coordonnée plus efficace. »
La République tchèque a été particulièrement critiquée pour son inaction aux moments les plus durs de la crise migratoire. Pas plus tard qu’à la mi-juillet, le ministre de l’Intérieur allemand Horst Seehofer avait déploré que « la volonté (des pays d'Europe de l'Est) d'être partie prenante d'une solution européenne (soit) proche de zéro ». Une remarque qui avait fait mouche, suscitant la réaction des autorités tchèques, le ministre des Affaires étrangères rappelant que le pays était prêt à aider dans le cadre d'une solution globale européenne mais refusait le principe des quotas migratoires.
Le programme des trois ministères se veut être la réponse tchèque à cette question, et l’application de ce que le Premier ministre tchèque n’a eu de cesse de marteler : le problème doit être réglé à la source. Mais pour de nombreux observateurs, l’engagement tchèque s’apparente à une goutte d’eau dans la mer. C’est en tout cas l’avis d’Ondřej Horký-Hlucháň, de l’Institut des relations internationales :« D’un côté, on voit comme le gouvernement s’efforce de promouvoir ce qu’il répète depuis le début : venir en aide sur place, au lieu d’accueillir les réfugiés. La Pologne, la Hongrie ou la Slovaquie ont le même discours. Mais d’un autre côté, si l’on regarde les efforts déployés par la Tchéquie en termes de développement global, il est clair que le pays est en retard et qu’il ne remplit de loin pas ses engagements. »
En 2015, la République tchèque s’est engagée, dans le cadre de l’OCDE, à consacrer d’ici 2030 jusqu’à 0,3% de son PIB à l’aide au développement. L’an dernier, la République tchèque n’a toutefois alloué qu’un peu plus de 0,1% de son PIB à cette aide, soit plus de plus de 7 milliards couronnes (environ 272 millions d’euros).
Les représentants des ministères vont rencontrer cette semaine la ministre des Finances, Alena Schillerová (ANO) pour discuter de leur contribution financière à cette aide. D'après le ministre des Affaires étrangères Tomáš Petříček, le gouvernement devrait recevoir le projet d'ici la fin octobre.