Anna Honzakova
Déjà cent ans se sont écoulés depuis le jour solennel, lorsque Anna Honzakova a été promue première femme médecin à la faculté de médecine de l'Université Charles, à Prague. La gynécologue était également la première femme à avoir exercé son métier en privé.
A.Honzakova a vu le jour en novembre 1875, au nord de la Bohême. Dès l'enfance, elle s'intéressait à l'anatomie et à tout ce qui était lié aux sciences naturelles. Les plans d'Anna sur son futur ne correspondaient absolument pas aux objectifs des jeunes filles de l'époque. Au cours des études au lycée classique Minerva, Anna était déjà fermement décidée à se consacrer à la médecine. Le plus vraisemblablement, elle avait hérité de la passion pour la noble science de son père, médecin de profession. Après avoir passé le baccalauréat, la jeune Anna voulait s'inscrire à l'université pour étudier la médecine comme son frère. Au tournant du 19ème siècle, il était pratiquement impensable qu'une jeune femme se lance dans des études universitaires et encore moins en médecine. Sa candidature est refusée. Finalement, elle est d'abord admise à la faculté de médecine allemande et trois ans plus tard à la faculté de médecine tchèque. La jeune femme peut suivre les cours, mais n'est pas autorisée à passer les examens, elle est en position d'auditrice libre. A Honzakova est loin d'être satisfaite. Elle se met à écrire des lettres à la cour royale de Vienne. En vain ! Les décisions finales sont bloquées surtout du côté des professeurs de médecine de Prague car ils n'arrivaient pas à accepter qu'une femme soit capable de faire des études d'une science si difficile. Pourtant, un grand nombre de délégations féminines intervenaient en sa faveur. Enfin, conformément au décret de 1900, A. Honzakova devient auditrice régulière de la faculté de médecine. Cela ne voulait absolument pas dire que la jeune femme était acceptée par ses collègues et les professeurs. On l'ignorait et lorsqu'elle passait sa première licence, tous les étudiants sont venus écouter les réponses de cette femme aux cheveux très courts qui a osé s'introduire dans un milieu réservé jusqu'alors au genre masculin.
La jeune étudiante a réussi à terminer ses études en médecine avec succès et obtenu son diplôme le 17. mars 1902. Après trois ans de travail à l'hôpital, la jeune femme se présente au poste d'assistant qui venait de se libérer. On lui refuse le poste sous prétexte qu'elle ne susciterait aucun respect auprès des étudiants. A. Honzakova ne se laisse pas décourager et ouvre un cabinet de gynécologie privé dans le centre de Prague. Successivement elle acquiert une clientèle considérable parmi laquelle les femmes et filles de médecin qui se dressaient contre les études des femmes. En peu de temps, la femme médecin atteignait une grande renommée.
Les mérites d'A. Honzakova se sont manifestés surtout dans sa lutte contre les avortements clandestins au début des années vingt. Cette femme remarquable soutenait la légalisation des avortements. Elle faisait appel à la responsabilité avant la conception, à l'hygiène et à la discipline individuelle.
A. Honzakova était également présidente de l'Association des femmes médecin tchèques et fondatrice du Fond d'assistance aux femmes pauvres, abandonnées et malades. Par ailleurs, la fameuse gynécologue soignait les femmes pauvres gratuitement et parfois même, elle leur avançait des sommes d'argent. Elle avait également fondé avec Charlotte Masaryk, épouse du président de la Tchécoslovaquie T.G. Masaryk, le Club Féminin tchèque. Dans les années trente, A. Honzakova était bien la première à donner des conférences sur les questions de la protection contre les grossesses indésirables. La salle était pleine à craquer de femmes de toutes les couches sociales.
La célèbre gynécologue ne s'est jamais mariée. Elle a trouvé le sens de la vie en sa profession et dans l'éducation des deux enfants de sa femme de ménage, décédé prématurément. Vers la fin de sa vie, elle vivait entourée par ses nièces et neveux, relation qui lui apportait grande satisfaction et plénitude.
La première femme promue à la faculté de médecine tchèque, soutenait l'opinion que la femme est un être humain, et que son rôle ne résidait pas uniquement dans celui d'être mère et bonne épouse. A. Honzakova, la femme qui a su partiellement rompre les préjugés est décédée le 13 octobre 1940.