L'élection présidentielle et son histoire depuis 1918
Le Parlement tchèque est en train d'élire le 10e président de la République. Qui succédera à Vaclav Havel dont le mandat expire le 2 février - on le saura, peut-être, après le 2e tour de scrutin, vendredi prochain. En attendant, un peu de l'histoire de l'élection présidentielle depuis la naissance de la Tchécoslovaquie, en 1918.
Le premier président tchécoslovaque, Tomas Garrigue Masaryk, est resté le plus longtemps dans ses fonctions. Il a été réélu 4 fois : pour la première fois en novembre 1918, lorsqu'il était encore en exil, ensuite en 1920, 1927 et 1934. Lors de cette dernière élection présidentielle, Masaryk a eu pour rival Klement Gottwald, député communiste, qui s'est fait élire président 14 ans plus tard. Mais n'anticipons pas. Tomas Garrigue Masaryk, président jouissant de la plus haute estime, a consolidé la situation d'après-guerre de la Tchécoslovaquie sur des bases de la démocratie parlementaire. Son objectif était de résoudre le problème des nationalités du nouvel Etat suivant le modèle helvétique. Bien que se situant au-dessus des partis, il intervenait dans des controverses politiques. Sous sa présidence, le château de Prague était devenu un important centre de pouvoir alternatif exerçant une grande influence sur la politique tchécoslovaque. A cause d'une maladie, Masaryk n'a pas fini son 4e mandat.
Sur sa recommandation personnelle, Edvard Benes, ministre des Affaires étrangères, a été élu son successeur, en décembre 1935. Suite à la conférence de Munich, Benes donne, le 5 octobre 1938, sa démission. En mars 1939, le pays est occupé par Hitler et Emil Hacha est installé dans les fonctions de président du Protectorat de Bohême et de Moravie. Il y reste jusqu'à la fin de la guerre, où il est arrêté. Il mourra en prison. Mais revenons à Edvard Benes. En 1940, il constitue à Londres le gouvernement tchécoslovaque en exile. Tous les actes de l'après-Munich, dont la démission de Benes, sont déclarés nuls. Conformément à la constitution de la République tchécoslovaque de 1920, Edvard Benes n'a jamais cessé d'être le président. En octobre 1945, l'Assemblée nationale l'a confirmé à l'unanimité dans ses fonctions. Après le putsch communiste de février 1948, Benes est obligé d'accepter la démission du cabinet démocratique et de nommer Klement Gottwald, stratège du putsch, président du conseil. Edvard Benes démissionne en juin 1948, après avoir refusé de signer la nouvelle constitution.Le même mois de juin 1948, Klement Gottwald se présente comme l'unique candidat à l'élection présidentielle. Il est voté par acclamation. C'est la fin du régime démocratique et le début de la pratique communiste de l'élection à l'unanimité d'un candidat unique désigné à l'avance. L'ère de Klement Gottwald, marquée par des injustices, l'arbitraire policier, la terreur judiciaire et les procès politiques, est de triste mémoire dans l'histoire de la Tchécoslovaquie. Antonin Zapotocky, disciple fidèle de Gottwald, lui succède après sa mort, en mars 1953.
En novembre 1957, Antonin Novotny est élu le 6e président tchécoslovaque. Parmi les présidents ouvriers d'après-guerre, Novotny est le premier à perdre son influence sur le parti communiste qu'il dirige et à être obligé de démissionner, sous la pression de l'opinion publique. C'était en janvier 1968, période de dégel politique et de tentative d'édification du socialisme à visage humain.
Le leader du renouveau, Alexander Dubcek, impose l'élection du général Ludvik Svoboda à la tête de l'Etat. Peu après son élection, les troupes soviétique envahissent, en août 1968, la Tchécoslovaquie. Svoboda refuse d'abord de nommer un gouvernement ouvrier paysan, mais il est contraint d'accepter le diktat de Moscou. En avril 1969, il soutient la direction normalisatrice du parti communiste représentée par Gustav Husak. En dépit de son mauvais état de santé, Svoboda refuse de démissionner.
C'est Gustav Husak, secrétaire général du parti, qui dirige, de fait, le pays, et qui est élu président en mai 1975. La voie de Gustav Husak, premier président slovaque, au Château de Prague, n'a pourtant pas été facile. Dans les années cinquante, Husak a été qualifié de nationaliste bourgeois et en tant que tel condamné à perpétuité. Après avoir été, en 1960, amnistié, il s'engage au parti communiste. Au lendemain de l'occupation soviétique, Gustav Husak se fait remarquer comme le premier dirigeant de la dite normalisation de la société tchécoslovaque dictée de Moscou. C'est la Révolution de velours, en novembre 1989, qui le contraint à quitter ses fonctions.
Le 29 décembre 1989, le parlement tchécoslovaque, encore communiste, élit à l'unanimité Vaclav Havel président de la République, en ce moment encore « socialiste fédérative tchécoslovaque ». Les premières élections libres ont lieu le 5 juillet 1990. Vaclav Havel est élu, au scrutin secret, président de la République. Les députés slovaques empêchent, le 3 juillet 1992, sa réélection. Havel démissionne de ses fonctions. Jusqu'au décembre 1992, le chef du gouvernement fédéral, Jan Strasky, est chargé de l'exercice des pouvoirs présidentiels. A la fin de 1992, la Tchécoslovaquie se divise en deux Etats indépendants. Dans les premières élections de l'histoire de la République tchèque, organisées le 26 janvier 1993, Vaclav Havel est élu président. Pour la 4e et dernière fois, Vaclav Havel est réélu le 20 janvier 1998. Le 2 février prochain, son mandat expirera.