Une semaine de coronavirus en Tchéquie
Comme ailleurs dans le monde, l’actualité en République tchèque durant la semaine écoulée a été dominée par l’épidémie de coronavirus et l’application des mesures de confinement prises par le gouvernement d’Andrej Babiš pour enrayer sa propagation. Mais si elle n’est pas moins grave, la situation apparaît moins alarmante qu’ailleurs.
Alors que plus de 10 000 personnes dans le monde sont désormais mortes, victimes de la maladie, et que l’Europe est davantage touchée par le coronavirus que la Chine, la République tchèque, reste, elle, encore relativement épargnée. Un peu moins de 800 personnes contaminées étaient recensées vendredi, mais les cas graves sont rares et aucune personne en République tchèque n’est encore décédée.
Comme ailleurs, les autorités tchèques n’étaient pas prêtes à faire face à une telle propagation de l’épidémie. Le gouvernement, aussi parce que son chef Andrej Babiš divise plus qu’il ne rassemble depuis son entrée en politique, a néanmoins été un des premiers en Europe à adopter les mesures les plus drastiques : fermeture des écoles dès le mercredi 11 mars, adoption de l’état d’urgence, fermeture des commerces, des frontières et interdiction de circulation des personnes sauf pour aller au travail, chez le médecin ou faire les courses. Même si la République tchèque, au même titre par exemple que la Slovaquie, a d’abord été critiquée par certains autres pays et par la présidente de la Commission européenne pour ce repli sur soi, il s’est finalement avéré que l’ordre de confinement général était la bonne décision. Même si le nombre de personnes contaminées continue d’augmenter et que le matériel de protection manque toujours, la situation sanitaire en République tchèque apparaît clairement moins grave et moins inquiétante qu’ailleurs.Dimanche dernier encore, avant l’annonce dans la soirée de l’interdiction de sortir, les Tchèques, beau temps aidant et comme conscients de la nécessité de profiter des dernières heures de liberté, étaient très nombreux à se promener. Dans la plaine ou dans les forêts en province, dans les parcs et jardins dans les grandes villes, ils ont été des millions à sortir de chez eux, l’immense majorité sans protection respiratoire. Depuis lundi, même si le soleil a régné tout au long de la semaine, tout a changé. Rues, places et transports en commun ont fini de se vider. Traditionnelement disciplinés, les Tchèques, à quelques exceptions, respectent les mesures adoptées. Même le matin en pleine nature – puisque les sorties pour s’aérer l’esprit et s’entretenir un minimum sont encore tolérées - il est désormais rare de voir une personne se déplacer sans masque. Ces masques, beaucoup les fabriquent eux-mêmes et les distribuent. Solidaires, beaucoup ont aussi proposé leur aide aux personnes âgées. Comme souvent au cours de leur histoire en période de crise, les Tchèques, que l’on présente pourtant souvent comme indifférents au sort des autres, se sont mobilisés.
Puisque même Škoda Auto a fermé ses usines et mis au chômage technique ses quelque 30 000 employés, puisque même l’industrie automobile, dont on a coutume de dire qu’elle est le moteur de l’économie tchèque, est maintenant à l’arrêt comme tout le reste ou presque, les conséquences économiques sont bien sûr régulièrement évoquées. Qu’adviendra-t-il de tous les acteurs du tourisme, dont Prague et la République tchèque sont devenues dépendantes des milliards de revenus au fil des années, du développement du low cost et des lignes aériennes directes avec la Chine ? Autant de questions pour l’heure sans réponses et auxquelles il sera temps de répondre plus tard.
Jeudi soir, depuis son château de Lány, le président de la République, Miloš Zeman, s’est exprimé au cours d’une allocution préalablement enregistrée. Apparu très affaibli, à peine en mesure de rester assis sur une chaise, le chef de l’Etat a appelé ses concitoyens à ne pas prendre l’épidémie à la légère, sans toutefois succomber à la panique et à la peur, et à faire preuve de courage. Et s’il n’a pas oublié de remercier la Chine pour avoir été le seul pays à aider la République tchèque dans la fourniture de matériel de protection (plus d’un million de respiraeurs sont arrivés à Prague ce vendredi), il a aussi souligné et mis en avant la solidarité manifestée par une multitude de bénévoles. Et puisque Miloš Zeman a même souhaité aux Tchèques de s’aimer, d’être bienveillants et de démontrer leur humanité, il faut vraiment que l’heure soit grave...