Un an après son assassinat, le Centre d’investigation Ján Kuciak fondé en Slovaquie sur le modèle tchèque

Photo: Matej Grochal, CC BY-SA 4.0

Le 21 février 2018, le journaliste slovaque Ján Kuciak était tué par balles avec sa compagne Martina Kušnírová. Les Slovaques se préparent à marquer le premier anniversaire de leur mort ce jeudi, avec des rassemblements prévus dans les rues de Bratislava et de plusieurs autres villes du pays ainsi qu’à Prague, sur la place Venceslas. Ce double homicide a profondément choqué la société slovaque et plus particulièrement les journalistes du pays, qui s’efforcent un an après de poursuivre le travail de leur défunt collègue. Arpád Soltész, journaliste depuis plus d’une vingtaine d’années à Bratislava, vient de fonder le nouveau Centre slovaque pour l’investigation journalistique ICJK (http://icjk.sk/) – qui porte le nom de Ján Kuciak. Il a d'abord évoqué la génèse de ce projet:

Photo: Matej Grochal,  CC BY-SA 4.0
« Après le meurtre de Ján, un groupe de journalistes appelé All for Jan s’est formé pour permettre de terminer sa dernière enquête sur les affaires de la mafia calabraise ’Ndrangheta en Slovaquie. Mais les médias sont quand même un secteur concurrentiel à la base… Donc nous avons décidé avec Peter Bardy, le rédacteur en chef de Ján, et Zuzana Petková, qui dirige aujourd’hui une fondation contre la corruption, de maintenir cette forme de coopération très efficace et de fonder un centre en Slovaquie qui serait l’équivalent du Centre pour l’investigation journalistique ( http://www.investigace.cz/ ) qui existe déjà depuis plusieurs années en République tchèque. »

« Nous avons été bien aidés par la journaliste tchèque Pavla Holcová, qui est membre fondatrice de ce centre à Prague et qui collaborait avec Ján Kuciak sur sa dernière enquête, qui a été publiée dans de nombreux médias étrangers après sa mort. L’idée de donner son nom à ce nouveau centre nous est venue naturellement et sa famille nous en a donné l’autorisation. Il faut dire que Pavla Holcová avait déjà par le passé recommandé à Ján de fonder un tel centre, mais il ne se sentait pas encore assez expérimenté pour le faire à seulement 27 ans. Nous avons fondé ce centre qu’il aurait aimé voir exister et nous voulons faire un travail de qualité qui puisse faire honneur à son nom et au travail qu’il a accompli. »

Quels sont les principaux objectifs de ce Centre Ján Kuciak pour l’investigation ?

Arpád Soltész,  photo: Noviny.sk
« Le premier objectif est de favoriser la coopération internationale. Jusqu’à présent la Slovaquie était un peu un trou sur la carte mondiale de ce genre de plateforme. La première démarche après la fondation du centre a été de signer un partenariat avec OCCRP, la plateforme internationale pour les enquêtes sur le crime organisé, qui a également un partenariat avec le centre tchèque et une trentaine d’autres centres sur quatre continents. Ils nous ont débloqué des fonds pour démarrer notre travail et montrer ce qu’on était capable de faire pour ensuite lever des fonds en Slovaquie. »

« Nous avons en fait deux missions principales. D’abord collaborer au niveau international sur des dossiers concernant le crime organisé international avec ses potentielles ramifications en Slovaquie et ses conséquences sur la corruption au niveau politico-financier local. Donc servir de relais slovaque aux journalistes étrangers mais aussi, dans le sens inverse, servir de relais à nos collègues slovaques dans les cas où ils auront besoin de trouver hors de nos frontières des informations ou des données difficiles d’accès. »