Pendant tout l’été, Radio Prague Int. vous emmène en balade dans les plus belles stations thermales de République tchèque. Pour le premier épisode de cette série estivale, direction Karlovy Vary (également connu sous le nom de Carlsbad), une des villes les plus connues du fameux triangle thermal de Bohême de l’Ouest, que ce soit pour ses cures ou son festival de cinéma.
Nichée dans un amphithéâtre de collines, la cité thermale de Karlovy Vary s’étend tout le long de la rivière Teplá qui coule en son centre. Ici, l’essentiel de l’activité de la ville tourne autour de l’eau, de ses douze sources principales d’eaux chaudes et curatives qui ont fait sa renommée. A partir du XIXe siècle, quand la mode du thermalisme prend son envol un peu partout en Europe, toute la bonne société de l’époque vient y prendre les eaux.
Les villes thermales sont recherchées pour leurs vertus thérapeutiques, mais c’est aussi un endroit pour voir et se faire voir. Schiller, Goethe, Chopin, Clémenceau, Dvořák, Pierre le Grand ou Karl Marx ont foulé les pavés de la ville et ont flâné sous ses colonnades ornées, en sirotant les différentes eaux auxquelles sont prêtées mille vertus. Josef Dluhoš est le directeur de l’office du tourisme local :
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« Le caractère unique de la ville réside dans ses sources d’eau naturelle et minérale. On dit aussi qu’il existe une treizième source : c’est la liqueur aux plantes appelée Becherovka. Il y a évidemment de nombreux endroits dans le monde qui sont également réputés pour leur thermalisme, mais l’eau de Karlovy Vary est vraiment spéciale, elle a vraiment un effet sur l’organisme. C’est pour cela que la ville attire toujours autant de monde. »
Quand la pandémie n’avait pas encore bouleversé nos vies, cette affluence de curistes était démultipliée début juillet par l’arrivée de cinéphiles et de stars du cinéma : car depuis plus d’un demi-siècle, la ville accueille tous les ans le festival du film de Karlovy Vary, une institution dans le pays dont la réputation à l’étranger est en grande partie due au caractère décontracté de son déroulement. C’est un des rares festivals internationaux où se côtoient jeunes en sac à dos, familles avec enfants et gens du cinéma dans une atmosphère détendue et sans bling-bling, comme l’avait relevé avec enthousiasme il y a quelques années, la réalisatrice française Marion Laine :
« Ce que j’adore à Karlovy Vary, c’est que c’est très réputé à Paris et les gens adorent ce festival. On m’avait expliqué que les gens venaient de toute la République tchèque, qu’il y a tous ces jeunes qui viennent avec leur sac à dos, que les salles sont remplies... C’est fabuleux, du coup, j’avais très envie de venir et je suis vraiment très heureuse d’être ici. »
Annulé l’an dernier pour cause de Covid-19, il faut désormais croiser les doigts pour que l’édition 2021 décalée à fin août ait bel et bien lieu.
Dans tous les cas, il est tout à fait possible de profiter de balades dans la ville ou ses alentours, qui, festival ou pas, valent le détour, comme le détaille Josef Dluhoš :
« Nous avons ici 100 km de sentiers touristiques qui sont tous praticables à pied. Donc si vous venez en famille avec vos enfants, vous pouvez monter par exemple sur la tour panoramique Diana et profiter des environs vus d’en-haut. Vous pouvez aussi grimper en haut d’une gloriette baptisée Mayer ou au sommet du Saut du cerf. »
Outre ses célèbres colonnades, Karlovy Vary se distingue par son architecture. Si l’histoire veut que la première source ait été découverte au XIVe siècle par l’empereur Charles IV, ce sont les styles de la grande époque de son développement qui dominent. Ainsi hôtels, bâtiments thermaux, immeubles de rapport, ont poussé comme des champignons essentiellement au tournant des XIXe-XXe siècles, donnant à la ville thermale un cachet particulier et unifié, avec une prédominance de styles historicisants et d’Art nouveau. L’hôtel Pupp est un des bâtiments les plus connus de Karlovy Vary. C’est d’ailleurs là que sont généralement logées les plus grandes stars de passage pour le festival. L’historien Stanislav Bucharovič nous en dit plus sur l’architecture de la ville :
« La ville regorge de trésors. C’est une véritable plongée dans l’époque de l’empire austro-hongrois. Vous avez des bâtiments de style romantique, très appréciés par les nostalgiques de cette époque. La majeure partie de la ville ne remonte pas plus loin que 120 ans car la ville gothique et Renaissance a totalement brûlé lors d’un incendie en 1604. Il y a encore eu un autre incendie en 1759. La troisième phase de construction a été néo-classique et c’est à ce moment-là que Goethe est tombé amoureux de la ville. Ces bâtiments ont été détruits à la fin du XIXe siècle car les maisons étaient trop petites pour accueillir les curistes qui exigeaient un minimum de confort : l’électricité, l’eau chaude, le tout à l’égout, les ascenseurs… La ville s’est modernisée à ce moment-là pour acquérir l’aspect que l’on peut encore voir aujourd’hui. »
Pour les touristes qui ne cherchent pas particulièrement à faire une cure, il est possible de visiter ici le musée de la Becherovka, cette liqueur aux plantes dont la recette est un secret bien gardé et dont on sait juste que c’est précisément l’eau si spéciale de la ville qui contribue à sa particularité. Autre musée à visiter, celui des ateliers de fabrication de verre et de cristal Moser, car la région est également réputée pour sa verrerie.
A Karlovy Vary, impossible de ne pas remarquer également l’importante présence russe dans la ville : le nombre de panneaux en cyrillique en témoigne, destinés non seulement aux touristes russes ou originaires des anciennes républiques soviétiques, mais aussi liés au fait qu’une bonne partie du patrimoine immobilier appartient à des ressortissants de ce pays. Cette présence n’est pas nouvelle puisque la ville comptait depuis bien longtemps une église orthodoxe dédiée à saints Pierre et Paul.
Enfin, la ville de Karlovy Vary, tout comme dix autres villes d’eaux européennes dont Mariánské Lázně et Františkovy Lázně non loin de là, est en très bonne place pour se voir inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Les trois cités thermales, que nous vous proposons de découvrir dans le cadre de cette série tout au long de l’été, devraient être fixées sur leur sort au cours du mois de juillet.