Nouveau gouvernement : « Cela va être très compliqué pour Petr Fiala d’imposer un ministre »
Au cours d’une cérémonie aussi aseptisée qu’originale, le chef de l’Etat a nommé dimanche Petr Fiala au poste de Premier ministre. Le président Zeman entend désormais rencontrer chacun des candidats au poste de ministre dans le futur gouvernement avant de le nommer dans son ensemble, ce qui est encore loin d’être acquis.
Michel Perottino dirige le département de politologie de la faculté des sciences sociales de l’Université Charles :
Qu’est-il important de savoir sur Petr Fiala, au-delà du fait que c’est un fan de James Bond, comme on peut le lire dans la presse étrangère ?
« Tout d’abord, Petr Fiala est un professeur de science politique, donc il a une connaissance assez approfondie des mécanismes politiques d’une manière générale et du fonctionnement du gouvernement – c’est peut-être son avantage le plus manifeste. »
« L’autre élément à prendre en considération est qu’il est le chef de l’ODS depuis 2014, après les affaires de Petr Necas, et qu’il a réussi après une situation difficile à en faire un parti relativement efficace en campagne électorale. »
Il est donc le chef d’un parti aux tendances eurosceptiques mais est lui-même plutôt pro-européen ?
« Je dirais que la situation est un peu plus compliquée : il est pro-européen par rapport à la ligne dure de l’ODS qui existe encore mais il est lui-même sur une ligne très conservatrice, relativement proche du parti conservateur britannique. Si on peut le qualifier d’eurosceptique relativement pro-européen, il reste sur une ligne qui dénote dans la coalition gouvernementale qui est en train de se mettre en place. »
Petr Fiala connaît donc la science politique et la Constitution tchèque – comment peut-il sortir de ce qui semble pour l’instant être une impasse avec le refus du président de la République M. Zeman de nommer le candidat du Parti pirate Jan Lipavský au poste de chef de la diplomatie ?
« Cela va être très compliqué. Ce n’est pas une question de connaissance de la Constitution mais plutôt un rapport de force avec le chef de l’Etat. Jusqu’à présent, tous les présidents de la République ont contrôlé les ministres proposés et dans certains cas ont opposé un veto. Dans tous les cas, c’est le chef du gouvernement qui a été obligé de changer son candidat. »
« La situation actuelle est évidemment un peu plus compliquée, avec un M. Zeman en fin de mandat et son état de santé étant plus que fragile, donc les jeux sont relativement ouverts. Mais cela va être très compliqué pour P. Fiala d’imposer un ministre, en particulier le ministre des Affaires étrangères qui sera évidemment appelé à coopérer avec le chef de l’Etat puisqu’ils sont tous les deux compétents en matière de politique étrangère. »
Quel serait selon vous l’objectif poursuivi par M. Zeman ou son entourage dans cette affaire ?
« D’abord essayer de conserver une sorte de jurisprudence en ce qui concerne la nomination des membres du gouvernement. Et puis évidemment le président de la République est sur une ligne différente de celle du Parti pirate et de celle de toute la coalition, en particulier en ce qui concerne la Russie. Le point d’achoppement manifestement le plus important porte sur la relation à Israël, M. Zeman étant très pro-israélien. »
Le gouvernement pourrait-il est définitivement nommé à la mi-décembre, comme l’espère P. Fiala ?
« Cela paraît relativement difficile, mais pas impossible. M. Zeman souhaite rencontrer tous les candidats à une fonction ministérielle sans qu’on connaisse le calendrier exact. Je serais plutôt sceptique quant à une date aussi proche. »