Pâques pour les réfugiés à Prague : « La vie continue, malgré tout »

Soirée ukrainienne

Transformé, il y a deux ans de cela, en centre de spiritualité ouvert au grand public et géré par la communauté pragoise des frères Carmes et des laïcs, l’ancien monastère Fortna, au centre de Prague, a trouvé une nouvelle vocation. Une cinquantaine d'Ukrainiens qui ont fui la guerre ont trouvé refuge dans ce bâtiment historique rénové, situé place de Hradčany, à quelques pas du Château de Prague. Nous sommes allés à leur rencontre, avant la célébration, ce week-end, de la Pâque orthodoxe.

L’ancien monastère Fortna | Photo: Magdalena Hrozínková,  Radio Prague Int.

« Bien sûr que c’est un moment de fête pour nous… Il y a une semaine, nous avons célébré tous ensemble les fêtes de Pâques catholiques. Samedi, nous avons préparé à cette occasion notre gâteau traditionnel, ‘pascha’. Ce week-end, nous allons célébrer la Pâque ukrainienne, dimanche matin, nous irons tous à l’église orthodoxe de Prague, pour assister à la liturgie. Et le soir, nous ferons une fête ici, » raconte Tatjana, une jeune maman originaire de Kyiv.

Elle est arrivée en Tchéquie le 4 mars dernier, avec son fils et sa fille, âgés de six et trois ans.

Tatjana | Photo: Magdalena Hrozínková,  Radio Prague Int.

« En Ukraine, je dirige une entreprise que nous tenons avec mon mari. Elle est spécialisée dans la fabrication de vannes d’arrêt et d’autres équipements industriels. Mon mari est en ce moment dans l’ouest de l’Ukraine, il aide l’armée ukrainienne, matériellement et physiquement. »

« Avec mon mari et nos enfants, nous avons quitté Kyiv dans la soirée du 24 février. Nous sommes d’abord partis chez nos amis, à Ivano-Frankivsk, en Ukraine de l’Ouest, mais ils vivent près de l’aéroport qui a été bombardé dès le premier jour de l’invasion russe. Alors mon mari a voulu que nous partions, les enfants et moi. Je suis allée en voiture en Roumanie, nous avons été coincés pendant neuf heures à la frontière, avant d’être ensuite accueillis dans un camp de réfugiés pour enfants. J’ai pensé peut-être rester en Roumanie et puis aller ailleurs, mais je ne savais pas où. Mais dans ce camp, nous avons rencontré un jeune homme de Prague qui nous a proposé de venir ici. J’ai accepté, et nous sommes partis en République tchèque, lui dans sa voiture et moi, qui le suivais dans la mienne. Le voyage nous a pris deux jours et nous n’avons dormi que deux heures. Nous sommes arrivés à Prague le 4 mars, à 4 heures du matin. »

Photo: Archives du monastère Fortna

A Prague, Tatjana et ses enfants ont été accueillis dans l’ancien monastère Fortna. Hana Říhová y organise des cours de méditation et autres événements destinés au grand public. Elle s’occupe désormais des dizaines de femmes et enfants ukrainiens hébergés dans ce centre spirituel qui, par conséquent, a annulé son programme habituel jusqu’à fin juin.

Mardi dernier, une soirée culturelle ukrainienne a eu lieu au monastère. Elle a été entièrement organisée par ses nouveaux habitants, souligne Hana Říhová :

  | Photo: Magdalena Hrozínková,  Radio Prague Int.

« Jusqu’au dernier moment, notre équipe tchèque ne savait pas exactement comment la soirée allait se dérouler, parce que c’était vraiment une initiative de nos amis ukrainiens, plus précisément d’un garçon qui avait travaillé, je crois, comme modèle en Ukraine. Je ne sais pas par quels moyens il a fait transporter à Prague des vêtements inspirés du folklore et créés par deux dessinatrices de mode ukrainiennes. Alors nous avons pu assister à un défilé de mode auquel ont participé toutes les filles et femmes ici présentes. Il y avait de la musique, des repas traditionnels ukrainiens aussi. Des Tchèques ainsi que des Ukrainiens qui n’habitent pas au monastère sont venus. C’était une soirée très conviviale, mais quand même plutôt inhabituelle dans ses locaux. » (rires)

Soirée ukrainienne | Photo: Anastasiia Shaptala

Comme les autres habitantes ukrainiennes du centre Fortna, Tatjana se réjouit de ce genre d’activités :

Soirée ukrainienne | Photo: Anastasiia Shaptala

« Vous savez, la vie continue, malgré tout. On ne peut pas s’habituer à cette guerre terrible, mais nous nous sommes déjà un peu habituées à la vie ici. Il faut aussi penser à autre chose et surtout distraire les enfants. Pour eux, tout cela est difficile à supporter. Nous avons de la chance, parce que nous vivons ici. Toute l’équipe du centre Fortna et les bénévoles s’occupent magnifiquement de nous, nous sommes hébergés et nourris gratuitement, nous sommes allés au cinéma avec les enfants, au théâtre de marionnettes… L’école que fréquentent nos enfants organise des excursions pour nous, au Théâtre national par exemple… Tout est bien, mais je veux retourner en Ukraine, immédiatement, dès que la guerre se terminera. Les enfants veulent aussi rentrer, retrouver leur chez soi. »

Rendez-vous la semaine prochaine sur Radio Prague International pour la suite du reportage.