Presse : 25 ans d’adhésion à l’OTAN ou la nostalgie de l’époque Havel

Cette nouvelle revue de presse se penche d’abord sur l’approche des Tchèques à quelques mois des élections européennes et sur les célébrations liées au 25ème anniversaire de l’entrée de la Tchéquie dans l’OTAN. Deux autres sujets à son menu : l’émergence de la diphtérie et d’autres maladies infantiles et de nouvelles spéculations autour de la mort de Jan Masaryk. Quelles remarques enfin concernent le léger séisme qui a récemment touché la Bohême du Sud.

Selon un sondage effectué par l’agence Ipsos, seul un tiers des électeurs tchèques se disent prêts à participer aux élections européennes. Le magazine Reflex précise :

Source: Conseil de l'UE/Conseil de l'Europe

« Les chiffres précédents sont éloquents : en 2014, le taux de participation aux élections européennes en Tchéquie se situait autour de 18 % pour atteindre cinq ans plus tard quelque 29 %. Ainsi, au sein de l’UE, les Tchèques sont, aux côtés des Chypriotes la nation la moins intéressée par ce scrutin. Les questions qui préoccupent ceux qui envisagent de se rendre aux urnes sont principalement liées à la sécurité, qu’il s’agisse de l’immigration, des menaces étrangères ou de la sécurité et de l’autosuffisance énergétique. Ces questions tout comme la politique environnementale sont perçues comme cruciales. »

La chroniqueuse du site aktualne.cz estime pour sa part que le peu d’intérêt pour les élections européennes découle de la faible attention que la Tchéquie accorde aux activités européennes. Elle trouve également, ce que confirme le sondage de l’agence Ipsos, que ce sont les Pragois d’un certain âge qui influenceront majoritairement les résultats des élections. Ils font partie des électeurs les plus pro-européens et les plus disciplinés :

« Cette évaluation se rapporte prioritairement aux personnes de plus de 65 ans et ayant une formation secondaire ou universitaire. C’est d’ailleurs sur cette catégorie de la population que les cinq partis de la coalition gouvernementale peuvent le plus compter. »

Il y a 25 ans, la Tchéquie rejoignait l’OTAN

« La visite de l’ex-président américain Bill Clinton à Prague, qui a participé à une conférence intitulée ‘Notre sécurité ne peut être tenue pour acquise’ organisée à l’occasion du 25ème anniversaire de l’entrée de la Tchéquie dans l’OTAN, a apporté une bouffée de nostalgie rappelant l’époque de Havel », peut-on lire dans un texte publié dans le quotidien Hospodářské noviny. Selon son auteur, « elle a rappelé une démarche historique que nous commençons à apprécier à sa juste valeur en ce moment même » :

Photo: Ministère de la Défense

« L’ancien président américain est pour les Tchèques associé à une période historique exceptionnelle tant pour leur pays qu’au niveau mondial : tout ce qui était positif semblait possible, on aspirait à un monde où ni la guerre mondiale ni l’apocalypse nucléaire ne présentaient des menaces proches. Des dizaines de pays se démocratisaient, les frontières et des possibilités de voyage et d’affaires sans précédent s’ouvraient, les investissements dans les programmes sociaux prévalaient sur ceux dans le domaine militaire. Les effets du changement climatique semblaient très lointains, les dirigeants politiques imaginaient un régime démocratique en Russie, tandis que la Chine devenait un atelier bon marché et fiable. »

Mais depuis 2007, comme l’indique le publiciste du journal économique, Vladimir Poutine fait tout pour que l’alliance retrouve son objectif initial, à savoir la défense de la liberté et de la démocratie en Europe, raison pour laquelle elle a été fondée il y a 75 ans :

« Il a fallu plus d’une décennie pour que les Européens se réveillent, pour qu’'ils commencent à réaliser qu’il faut se défendre contre le danger autoritaire venant de l’Est. Une chose que les personnes plus âgées qui ont connu les années 1990 et l’ère Clinton ont voulu oublier et que les plus jeunes considèrent comme une relique du passé. Hélas, il y a lieu de changer cette attitude, car parler de paix ne peut dissuader un agresseur qui ne comprend que la force. Avec l’OTAN, nous disposons d’un instrument historique unique. »

La diphtérie et ces autres maladies infantiles qui réapparaissent 

« Le premier décès dû à la diphtérie depuis 1969 est un signal d’alarme, même si la victime était âgée de 82 ans et était donc née à une époque où le vaccin contre la maladie n’existait pas encore. D’autant plus qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé, car le nombre d’autres maladies infantiles augmente également. » C’est ce qu’indique l’auteur d’un texte publié sur le site Novinky.cz avant de présenter quelques détails :

Photo illustrative: Angelo Esslinger,  Pixabay,  Pixabay License

« En 2022, la diphtérie a été détectée sur notre territoire pour la première fois depuis 27 ans. 12 cas ont été enregistrés au cours des deux dernières années, six ayant déjà été dépistés cette année. Malheureusement, ce n’est pas la seule maladie ‘infantile’ perçue comme presque éradiquée qui réapparaît. Selon les données officielles, le nombre de cas de coqueluche enregistrés cette année est le plus élevé depuis dix ans, le nombre de nouveaux cas continuant d’augmenter. »

Les causes de cette évolution sont multiples. Toutefois, comme le souligne l’éditorialiste du site, la fermeture des frontières dont rêvent les xénophobes est irréaliste et n’apporterait aucune solution. Il explique :

« Le problème, c’est la baisse du taux de vaccination lié au fait que l’obligation vaccinale des enfants est peu respectée. Les anti-vax sont de plus en plus nombreux dans la société, comme l’a clairement montré l’épidémie de Covid-19. Mais l’Etat est également défaillant, car souvent les vaccins ne sont pas disponibles. Non seulement les adultes ne sont pas obligés de se faire vacciner, mais, à l’exception des femmes enceintes, ils ne sont même pas encouragés à le faire. De même, une meilleure éducation fait défaut. On parle peu des dangers de ces maladies et de l’importance de la vaccination. »

Nouvelles spéculations autour de la mort de Jan Masaryk en 1948

« Pourquoi la mort de Jan Masaryk, le fils du premier président tchécoslovaque Tomáš Garrigue Masaryk, continue de fasciner tant de Tchèques ? », s’interrogent les auteurs d’un texte publié dans le quotidien Deník N qui s’inscrit dans la série intitulée Réécrire l’histoire. Nous citons :

Jan Masaryk | Photo: Archives de ČRo

« Jan Masaryk, le très populaire chef de la diplomatie tchécoslovaque après la Seconde Guerre mondiale, est une sorte de John Fitzgerald Kennedy tchèque. Sa vie s’est achevée en mars 1948 dans des circonstances qui ne sont pas toujours pas vraiment éclaircies. C’est pourquoi les spéculations sur les causes de sa chute depuis une fenêtre du palais de Černín, siège du ministère, vont bon train. Tout dernièrement, la Télévision publique tchèque a ravivé la polémique en accordant de l’espace à des recherches aboutissant sur de nouvelles spéculations. Celles-ci défendent l’idée que les coupables de ce meurtre supposé, ne seraient pas les communistes mais au contraire des personnes de l’entourage de Masaryk, des collaborateurs mécontents de la volonté du ministre de s’engager avec le président communiste Klement Gottwald... Tout indique en effet que ces spéculations ne disparaîtront jamais. »

Preuve de l’attrait de cet épisode mystérieux, selon les chroniqueurs du journal : aucun film n’a battu à ce jour le record du film Masaryk, qui a remporté douze Lions tchèques  en 2016. « Le jury a-t-il été ébloui par le scénario, historiquement pourtant peu convaincant, ou bien ce succès est-il dû tout simplement au fait que le film soit consacré à Jan Masaryk ? », se demandent-ils.

Séisme en Bohême du Sud  : un avertissement ?

Un récent séisme de magnitude 3,9 a été ressenti la semaine dernière en Bohême du Sud. « Il y a quelque chose de troublant dans cet événement, car même si dans notre pays, il y a des endroits où la terre tremble de temps en temps, cette région n’en fait pas partie », a noté à ce propos un chroniqueur du magazine Reflex. L’occasion pour lui de raconter :

Source: Geofyzikální ústav AV ČR

« Nous croyons que les tremblements de terre ne nous concernent pas parce que le massif tchèque est ancien et calme. C’était vrai au cours des derniers siècles. Mais les paléosismologues ont découvert que de tels séismes se sont produits, s’étendant sur de longues périodes, même dans des régions aussi peu actives que la Tchéquie. Cela a été le cas  entre 1134 avant notre ère et l’an 192 et entre 792 et 1020, au moment où l’Etat  tchèque était en train de se constituer. Les deux ont atteint une magnitude d’environ 6,5 sur l’échelle de Richter, magnitude à partir de laquelle les maisons s’écroulent et les gens meurent. Des chroniques mentionnent également quelques tremblements de terre qui ont de quoi troubler quelque peu l’idée selon laquelle nous vivons dans une région sismique calme de l’Europe. »

« Or, le tremblement de terre qui s’est produit en Bohême du Sud reste un mystère et constitue peut-être un avertissement », lit-on en conclusion dans Reflex.