Presse : le ton se durcit sur la scène politique tchèque
Les campagnes des partis au pouvoir et de l’opposition s’annoncent plus brutales que jamais. Cette nouvelle revue de la presse en donne quelques exemples. Rappel ensuite des traces tchèques de l’écrivain Salman Rushdie, l’attentat contre sa personne ayant soulevé beaucoup d’émotions également en Tchéquie. La prétendue inertie gouvernementale en temps de crise est un autre sujet traité. Il y sera également question de la protection anti-inondation à Prague et de l’obésité en hausse.
La société tchèque n’est pas divisée, mais elle fait en permanence l’objet de tentatives visant à la diviser. Un avis exprimé dans un texte intitulé « La haine en tant que moyen de travail. Les politiciens sont devenus fous », publié sur le site aktualne.cz. Son auteur a écrit :
« Pendant la guerre agressive que Poutine mène en Ukraine, aucun pays européen ne peut se sentir rassuré, un mélange de craintes sécuritaires, politiques et économiques se propageant rapidement à travers le continent. Toutefois, un peu partout les dirigeants politiques se comportent d’une manière raisonnable et responsable afin de ne pas angoisser les populations de leurs pays plus que nécessaire. La Tchéquie fait figure d’exception. »
A ce sujet, l’éditorialiste évoque en premier lieu les émotions et les guéguerres qui accompagnent les tournées en caravane de l’ex-Premier ministre Andrej Babiš à travers la république et ses meetings. Pour les attiser, comme il le rappelle, ce dernier n’a par exemple pas hésité à qualifier ses opposants de fascistes et de nazis. « Toutefois, les partis de la coalition gouvernementale n’améliorent pas non plus l’image de la scène politique. A l’approche des élections communales, ils misent sur une campagne négative, dans le cadre de laquelle ils comparent Babiš à Vladimir Poutine, tel un criminel de guerre », remarque-t-il. Et de conclure :
« C’est la première fois que nous sommes les témoins du fait qu’une haine personnalisée à l’égard des opposants est parallèlement activée par l’équipe gouvernementale et par le principal parti d’opposition. Cette volonté de nourrir la haine brutale devient-elle désormais une méthode standard du marketing politique ? »
La trace tchèque de Salman Rushdie
L’attentat contre Salman Rushdie a eu un grand retentissement dans les médias locaux. Dans une note publiée sur le site Seznam Zprávy, son auteure, une jeune écrivaine tchèque, a écrit :
« Salman Rushdie est un candidat évident au prix Nobel de littérature de cette année. Une distinction qu’il mérite grâce à la valeur littéraire de son œuvre et sa contribution au bien-être des lecteurs. Il le mérite peut-être plus encore en raison de ses qualités humaines. En le nobélisant, on ferait savoir que la liberté d’écrire et d’assumer sa responsabilité à l’égard de la parole est une liberté qui appartient à nous tous. »
L’auteur d’un texte mis en ligne sur le site aktualne.cz estime que l’attentat contre Salman Rushdie constitue le moment le plus sombre de la littérature mondiale de ce XXIe siècle. « Le monde occidental a devant lui une dure épreuve », écrit-il avant de s’interroger : « Les librairies cesseront-elles de nouveau de vendre les livres du célèbre écrivain, ou bien ne s’inclineront-elles pas cette fois-ci devant le mal ? .» L’occasion pour lui de rappeler que dans le passé, la Tchéquie avait défendu à l’égard du romancier des positions différenciées :
« En 1993, la première visite de Salman Rushdie en Tchéquie a été critiquée par le Premier ministre d’alors, Václav Klaus, qui a formulé le vœu ‘qu’elle ne soit pas interprétée comme un acte dirigé contre les pays de l’islam’. Le président de la République Václav Havel, lui, a exprimé à l’auteur son soutien. Huit ans plus tard, Rushdie a participé au Festival des écrivains à Prague. »
Le journaliste fait également part de la trace tchèque des Versets sataniques. Publié d’abord en 1994 en traduction anonyme, le livre a connu une réédition il y a sept ans de cela, dans une traduction sous pseudonyme. Le chef de la diplomatie tchèque de l’époque, Lubomír Zaorálek, l’a saluée comme un signe de la liberté d’expression.
Un cabinet trop inerte en temps de crise ?
Comment est-il possible que le cabinet de Petr Fiala demeure à tel point inerte ? A-t-il perdu son instinct de survie, ou bien dispose-t-il d’informations que nous autres ignorons ? Autant de questions, selon le journaliste de l’hebdomadaire Respekt, auxquelles on espère recevoir des réponses. Il explique pourquoi :
« Avec l’arrivée de l’automne et de l’hiver, qui seront probablement marqués par la récession économique, les experts s’attendent à une nouvelle baisse du niveau de vie et à la détérioration du climat au sein de la société. Or, le contraste entre le calme gouvernemental et les bouleversements économiques est frappant. L’opposition, quant à elle, avec à sa tête le chef du mouvement ANO Andrej Babiš, fait preuve de sa détermination d’en tirer profit pour attaquer le gouvernement et pour renouveler sa popularité en déclin. »
Face aux événements qui s’enchaînent sur la scène internationale, les possibilités d’action des partis au pouvoir sont limitées. Pourtant, d’après ce qu’indique l’éditorialiste de Respekt, il y a une chose que le gouvernement peut faire pour maintenir la stabilité au sein de la société : c’est de manifester sa solidarité psychologique et, surtout, financière, « une façon de signaler qu’il pense aux citoyens et aux entreprises, et qu’il cherche à les aider ».
Prague mieux préparée à une crue
Les inondations qui ont lourdement affecté la Tchéquie, il y a vingt ans de cela, n’ont pas épargné la capitale tchèque. L’occasion pour le chroniqueur du journal Deník N d’examiner si Prague est désormais mieux préparée à une nouvelle crue massive :
« En 2002, la capitale tchèque disposait d’un système de protection anti-inondation qui n’était que partiellement achevé. Puisant dans cette expérience dramatique, celui-ci a subi par la suite une transformation de fond en comble. Ainsi, un cas pareil ne devrait luas prendre Prague au dépourvu, malgré la persistance de certains points vulnérables. Parmi ceux-ci, entre autres, le Jardin zoologique situé dans le quartier de Troja, près de la Vltava et qui, tout comme précédemment, aurait du mal à résister à une crue dite millénaire. »
Le chroniqueur illustre cette amélioration par quelques chiffres. Tandis que lors de l’inondation en 2002, près de 50 000 habitants de Prague avaient dû être évacués, celle survenue onze ans plus tard a exigé l’évacuation de quelque 1270 personnes seulement. Les barrages mobiles – qui représentent un tiers de l’ensemble du système de protection et qui constituent un outil important notamment dans le centre historique de la ville – sont aujourd’hui à même de couvrir au total quelque 6 900 kilomètres.
L’obésité en hausse
L’obésité constitue une nouvelle menace sanitaire, rapporte l’auteure d’un texte mis en ligne sur le site Seznam Zprávy:
« Selon les données recensées l’année dernière, la Tchéquie compte près de 28% des personnes adultes en situation d’obésité, 38% de la population souffrant de surpoids. Comparé aux autres pays européens, elle est un des pays les plus touchés par ce phénomène. L’augmentation des prix des denrées alimentaires causée par l’inflation va encore aggraver le problème. On peut effectivement s’attendre à ce qu’une partie de la population ait désormais recours à des produits moins chers et de moindre qualité. »
De l’avis de la journaliste du site, l’obésité constitue à l’heure actuelle une nouvelle pandémie « latente ». Mais en Tchéquie, hélas, elle continue à être considérée prioritairement comme un problème esthétique, et non comme un grave problème sanitaire.