Presse : les attentes et les craintes liées à l’année 2021
Cette nouvelle revue de presse propose différents regards sur les défis, les perspectives et les changements prévus cette année en Tchéquie. A son menu également quelques réactions tchèques aux violences perpétrées mercredi à Washington.
Avec le début de la nouvelle année, la société tchèque a devant elle plusieurs défis à relever, constate la dernière édition de l’hebdomadaire Respekt. Pour un de ses commentateurs, il s’agit en premier lieu d’apprendre la patience :
« Le développement d’un vaccin contre le coronavirus a pu donner à croire que le retour à la vie normale était proche. Selon les experts, celui-ci n’est pourtant envisageable qu’à l’été ou à l’automne 2021. L’impatience et des attentes exacerbées représentent donc nos plus grands adversaires. La discipline et l’austérité demeurent de rigueur, car la situation va continuer à être difficile pour les entreprises, pour les écoliers, pour les établissements sanitaires, car il y aura également beaucoup de gens qui vont mourir ».
En ce qui concerne la vaccination de la population qui a commencé fin décembre en Tchéquie, l’auteur du texte publié dans le magazine Respekt estime que la campagne est marquée par « le chaos et l’incompétence ». Il admet toutefois qu’il reste encore assez de temps pour réparer les manquements et rattraper le retard ou pour s’inspirer à l’étranger, avant de conclure :
« La leçon à tirer de la pandémie de Covid-19 pour l’année 2021 est simple. En temps critiques, il est bon d’avoir un gouvernement compétent et un appareil d’Etat de qualité. Pour cette raison, il faut accorder une grande attention aux élections législatives qui se dérouleront en octobre prochain et motiver les gens intelligents et capables à travailler en faveur de l’Etat ».
2021 : un optimisme prudent
« Cette année sera bonne. Nous allons vers la guérison », prétend le commentateur du quotidien Deník. Il explique que ce constat ne s’appuie pas uniquement sur sa conviction, mais sur des faits :
« Plus le nombre de personnes vaccinées va augmenter, plus l’Occident va reprendre un nouveau souffle. A partir du printemps, l’Union européenne va commencer à distribuer les premières centaines de milliards d’euros prévues dans le projet de relance économique. L’utilisation de ces moyens, la plus importante injection financière de courte durée que l’Union ait jusqu’ici offerte à ses pays membres, dépendra dans une large mesure des gouvernements nationaux. Grâce à son nouvel instrument lié au respect de l’Etat de droit, elle pourra cependant mieux contrôler leur destination finale. »
Un Brexit finalement bien géré permettant l’amélioration des relations entre Londres et l’Union européenne et l’effet bienfaisant du départ du président américain Donald Trump : deux autres points parmi d’autres qui nourrissent l’optimisme prudent du commentateur de Deník. En ce qui concerne la Chine qui constitue selon lui « une menace croissante », il remarque que l’Occident s’est bien tiré de l’épreuve du « virus chinois » et ce par ses propres moyens et sans renoncer à ses valeurs. En conclusion, il écrit :
« Toute convalescence dure un certain temps. Voilà pourquoi, cette année, il ne faut pas s’attendre à des miracles. Mais la situation va s’améliorer. Le virus nous a affaiblis tout en nous aprenant beaucoup de choses. La baisse de la crédibilité des populistes et des démagogues qui ont fait preuve de leur incapacité en est une. Cette année donnera à certains pays démocratiques une chance de les empêcher de gouverner. »
Covid-19 : la Tchéquie plus affectée que les autres pays
Il y a lieu d’espérer que l’année 2021 sera meilleure que l’année précédente, écrit le commentateur du quotidien Lidové noviny. Son ton pourtant ne se veut pas optimiste :
« La situation est mauvaise et pourtant nous nous comportons comme si rien de grave ne se passait. Près de 13 000 décès causés à ce jour par le ‘virus chinois’ et un nombre record de personnes contaminées, près de 17 000 cas par jour cette semaine, classent la Tchéquie au sommet des pays les plus affectés alors qu’elle ne compte que quelque 10 millions et demi d’habitants . »
Le commentateur souligne que la Tchéquie a pris des mesures comparables à celles qui sont adoptées dans d’autres pays. Le seul problème, selon lui, c’est que les gens les ignorent ou ne les respectent pas. « D’où vient cette approche ? », s’interroge-t-il.
Des changements à prévoir
« La Tchéquie a devant elle une année de changements », titrait un commentaire mis en ligne sur le site aktualne.cz. Son auteur a précisé à ce propos:
« Une nouvelle année commence, le coronavirus fait des ravages, nul ne peut savoir ce qui nous attend. Avec cette seule certitude, c’est la volonté de changement que l’on peut observer au sein de la société qui constitue le point le plus marquant, malgré le fait que la pandémie de coronavirus a empêché la tenue des manifestations organisées précédemment par l’initiative Un Million de moments pour la démocratie. Cette volonté se manifeste aussi au niveau politique. La création de deux coalitions électorales, l’une réunissant trois partis conservateurs de droite, ODS, KDU-ČSL, Top 09, et l’autre prévue entre les Pirates et les Maires et les Indépendants, en sont une preuve éloquente. Jusqu’ici émiettée, l’opposition commence à trouver un langage commun en vue de mettre fin à la domination du mouvement ANO d’Andrej Babiš. Vu le contexte tchèque, on est tenté de dire que l’existence, au seuil d’une année électorale, de deux blocs d’opposition qui se présenteront en commun relève d’un miracle. »
Selon le commentateur du site aktualne.cz, un véritable changement ne peut toutefois se produire que lorsque les gens voudront réfléchir sérieusement et vérifier les informations au lieu de diffuser les mensonges et les fausses nouvelles. « Si seulement nous pouvions retrouver l’ambiance de gratitude et d’harmonie, telle que nous l’avons connue au lendemain de la chute du régime communiste en 1989 », conclut-il.
Les violences de Washington vues de Tchéquie
« C’est Donald Trump qui est responsable ». C’est ce que titre un commentaire publié dans le quotidien Hospodářské noviny en lien avec les violences perpétrées mercredi à Washington, un événement qui a eu un grand retentissement dans la presse locale également. Son auteur explique :
« Le carnage américain est une expression à laquelle Donal Trump a eu recours dans son discours d’inauguration en janvier 2017. Et c’est avec un carnage que se termine également, quatre ans après, son mandat présidentiel. Mais en réalité, nous ne savons pas s’il prend effectivement fin car les actes de Trump d’ici son départ de la Maison blanche prévu pour le 20 janvier sont imprévisibles. Désormais, il est clair que ses déclarations fracassantes ne servent pas uniquement à attirer l’attention, comme beaucoup le croyaient, mais qu’il faut les prendre au sérieux. De même, il faut donner raison à ceux qui prétendaient que Trump pouvait être plus dangereux qu’on ne le pensait. »
Si Trump est responsable de ce qui s’est passé à Washington, ce sont ses défenseurs qui n’en sont pas moins co-responsables, estime le commentateur de Hospodářské noviny. Il replace ce constat dans le contexte tchèque :
« Les défenseurs de Trump existent également en Tchéquie. Dans la haute politique, on peut les trouver au sein du Parti civique démocrate (ODS) ou du Parti chrétien-démocrate (KDU-ČSL). Seule la vulgarité de son vocabulaire est en général ce qui les dérange chez le président américain sortant. Ils n’ont pas compris, eux non plus, qu’il faut prendre les déclarations de Trump non seulement au sens propre mais aussi au sérieux. Ils doivent se réveiller. Le Premier ministre Andrej Babiš, quant à lui, a changé sa photo de profil sur les réseaux sociaux en enlevant sa casquette rouge, cet évident symbole trumpiste. Toutefois, il aurait dû le faire dès la nuit électorale, où Trump a commencé à proférer des mensonges ».
Le commentateur du site Forum24.cz remarque à son tour que ce sont les alliés de Donald Trump qui assument avec lui la responsabilité de ce qui s’est passé à Washington, car ils n’ont pas osé dire aux électeurs républicains la vérité. Et de remarquer que « les images du Capitole de ce mercredi sont incroyables, car elles évoquent celles que l’on est habitué à voir dans des pays où la démocratie est en panne ».