Rugby : en visite chez les deux Tchèques du Top 14 (1ère partie)
Ils ne sont pas bien nombreux. Deux plus précisément. Lukáš Rapant et Miroslav Němeček sont les deux joueurs tchèques à évoluer dans un club du Top 14, le championnat d’élite du rugby français. Radio Prague est allé à leur rencontre à Oyonnax (Ain).
« J’ai un peu le même avis. Ce sont des gens dont je dirais qu’ils sont studieux. Ce sont des professionnels, certes, qui pourraient très bien se dire qu’ils ne sont là que pour un an ou deux, mais non, ils sont sérieux, consciencieux et font leur travail. Bien sûr, ils ne sont pas seuls dans l’équipe, mais ce sont deux éléments sur lesquels on peut compter, qui ont fait leurs preuves et, comme on dit dans le milieu professionnel, très compétents dans leur domaine. Je leur souhaite de continuer, avec nous bien sûr. On sait pertinemment qu’ils iront peut-être ailleurs un jour, mais en attendant, ce sont deux joueurs qui ont déjà prouvé leur fidélité depuis qu’ils sont à l’USO. Ils sont aimés et aiment ce club et cette ambiance qu’ils ont contribué eux aussi à créer. »
« Ce sont des joueurs qui jouent pour leur club, pour nous les supporters, pour eux aussi. Ils se donnent toujours à fond, ce sont deux joueurs de très grande qualité. Ouaih ! »
Ce n’est pas tout à fait une déclaration d’amour, mais cela y ressemble fort. Comme Jacqueline et Bernard, que nous avons rencontrés la semaine dernière au stade Charles Mathon, les supporters d’Oyonnax, le petit poucet du Top 14 cette saison, aiment leur club de rugby, ses deux joueurs tchèques et ils le font savoir. Respectivement pilier gauche et deuxième ligne, Lukáš Rapant et Miroslav Němeček défendent les couleurs des Rouges et Noirs et vivent dans la petite ville de l’Ain, à une centaine de kilomètres de Lyon et de Genève, depuis 2006 et 2008. Titulaires lors de la victoire à Biarritz vendredi dernier, succès primordial dans l’optique du maintien d’Oyonnax parmi l’élite du rugby français, Lukáš Rapant et Miroslav Němeček sont les deux seuls joueurs tchèques à évoluer cette saison dans le Top 14, une des meilleurs compétitions de clubs au monde.
Lukáš Rapant, vous le connaissez peut-être déjà un peu. En octobre dernier, nous avions diffusé en deux parties une longue interview avec lui. Mais il ne s’agissait alors que d’un entretien par téléphone. Mercredi dernier, sur la route entre Prague et Lyon, où le Viktoria Plzeň s’apprêtait à disputer, le lendemain, le match aller des 8es de finale de la Ligue Europa de football, nous avons donc fait une escale à Oyonnax pour nous faire une meilleure idée du phénomène rugby dans la ville et faire plus ample connaissance avec les deux gaillards. Rendez-vous avait été fixé dans la matinée avec Lukáš Rapant et Miroslav Němeček au centre d’entraînement du club. De là, nous nous sommes rendus au stade, où c’est d’abord Miroslav Němeček, élu récemment meilleur rugbyman tchèque de l’année 2013, qui a répondu à nos questions. En voici un extrait :Mirek, au moment où nous nous parlons, Oyonnax est 13e et donc avant-dernier du Top 14. Comment se passe cette première saison dans l’élite ?
« C’est plutôt satisfaisant. On a bien commencé en gagnant notamment tous nos matchs à domicile. Malheureusement, on ne ramenait pas de points de nos déplacements. Au début, nous avons pensé que gagner chez nous suffirait pour nous maintenir. Aujourd’hui, on voit que ça n’est pas le cas. Il nous reste sept matchs (six après la première victoire à l’extérieur d’Oyonnax de la saison vendredi à Biarritz, dernier du Top 14), dont trois à l’extérieur et il nous faudra gagner au moins deux fois loin de chez nous pour rester dans le Top 14. »
-Dans quelle mesure est-il important pour vous de vous maintenir ? Si le club venait à descendre, qu’est-ce que cela signifierait ?
« Oui, c’est vraiment très important, parce qu’il y a beaucoup de projets qui se mettent en place autour d’Oyonnax. Ces projets ne sont pas pensés pour la Pro D2 mais pour le Top 14. Pour garder les sponsors et tout le reste, il faut donc rester dans le Top 14. Mais ce sera super difficile, car il n’y a pas d’équipe faible cette saison comme il y en a eus les précédentes avec Agen ou Mont-de-Marsan. »
-Et pour vous personnellement, comment se passe votre apprentissage dans l’élite alors que vous n’êtes pas toujours titulaire ?
« Je savais avant le début de saison que ce serait extrêmement difficile, parce que le niveau est plus élevé. Je ne pensais pas jouer beaucoup de matchs, et encore moins comme titulaire. Mais j’en ai quand même disputés sept ou huit comme titulaire en début de saison, j’étais donc très content. Après, j’ai eu quelques problèmes de dos, mais là, ça va mieux depuis quelque temps et je rejoue. »-Est-ce important pour vous, en tant qu’étranger, de vous inscrire dans le projet de ce club familial ? Oyonnax est une petite ville, un club avec des moyens financiers limités, mais on sent que son cœur bat pour son équipe de rugby…
« Vous savez, je suis arrivé à Oyonnax quand le club était en milieu de tableau en Pro D2. Auparavant, c’était un petit club, effectivement, mais je l’ai vu évoluer et grandir. Alors, oui, voir aujourd’hui autant de gens s’investir dans le projet, c’est très important pour moi. Ca fait six ans que je suis là et c’est aussi une partie de mon cœur. Il me reste encore deux ans de contrat et je n’ai pas envie de quitter le club en le laissant en Pro D2. Je veux partir par la grande porte. »
Quel a été votre parcours pour en arriver jusque dans le Top 14 ?
« Cela a été vraiment très difficile. Un joueur tchèque qui a envie de réussir au haut niveau ne peut pas se permettre d’attendre en Tchéquie qu’un club français, même de Pro D2, vienne lui proposer un contrat. En France, j’ai donc commencé en Fédérale 1 (3e division) (Němeček est également passé par Bègles-Bordeaux et Beaurepaire avec des essais en Nouvelle-Zélande, en Angleterre et en Australie), j’ai progressé pas à pas avant d’entrer en contact avec Oyonnax avec qui nous sommes montés dans le Top 14. »
Jouer dans le Top 14, c’est un rêve qui se réalise ou plutôt un aboutissement, votre progression qui se poursuit ?
« Honnêtement, mon rêve a toujours été de joueur dans le Top 14. Quand j’avais 14 ans, mon rêve était de joueur pour Toulouse. Bon, je crois que cela n’arrivera plus (il rit)… Mais jouer au plus haut niveau possible était mon rêve, peut-être même plus encore pour mon père. Et en Europe, je pense que le Top 14 est ce qui se fait de mieux. »
Comment envisagez-vous votre proche avenir et la suite de votre carrière ?
« La priorité des priorités est d’aider à ce qu’Oyonnax se maintienne dans le Top 14 pour que l’on puisse encore joueur à ce niveau la saison prochaine. Après, je ne sais pas. J’aurai 35 ans à la fin de mon contrat (en 2015). Je crois que je vais suivre une formation et avoir ‘un métier normal’. »
Au-delà du rugby, comment vous plaisez-vous en France et à Oyonnax ? On suppose qu’avec votre gabarit (1,98 m et 115 kilos), les gens vous reconnaissent assez facilement dans la rue…
« Je ne suis pas sûr… Vous savez, on passe tellement de temps à l’entraînement et entre nous qu’il ne nous en reste plus beaucoup pour fréquenter d’autres gens que les joueurs et tous ceux qui tournent autour du rugby. »
Néanmoins, votre épouse est tchèque, elle vient de vous donner un petit garçon. La famille Němeček est-elle heureuse à Oyonnax ?
« Oui, tout le monde est super heureux. Ils vont bientôt tous venir ici, ce sera la première visite de mon père depuis la naissance et je suis sûr qu’il va déjà ramener un ballon de rugby pour commencer à entraîner son petit-fils… »
Nous poursuivrons notre découverte de la vie des deux rugbymen tchèques à Oyonnax avec Lukáš Rapant cette fois et toujours les chaleureux supporters du club dans une prochaine rubrique sportive.