Soixante ans se sont écoulés depuis la mort du prêtre Josef Toufar

Josef Toufar

Ce jeudi, 25 février, nous commémorons le 60e anniversaire du décès du prêtre Josef Toufar, suite aux interrogatoires musclés de la StB. Le souvenir du prêtre est lié à ce qu’on appelle le « miracle de Čihošť », un événement ayant donné le coup d’envoi des purges communistes dans les rangs de l’Eglise catholique. Josef Toufar en sera la première victime, deux ans, jour pour jour, après le putsch d’Etat communiste, opéré le 25 février 1948.

Čihošť est un petit village dans la région de Vysočina, à cent kilomètres au sud-est de Prague. En décembre 1949, un crucifix se serait mis à bouger sur l’autel de l’église de Čihošť, pendant le sermon prononcé par Josef Toufar. Dans l’atmosphère des années 1950, où règne l’hostilité contre l’Eglise, Josef Toufar est arrêté et torturé dans la prison de Valdice. La situation échappe à l’un des enquêteurs de la StB, Ladislav Mácha. Le prêtre ne supporte pas un interrogatoire trop musclé et meurt, deux jours plus tard, le 25 février 1950, des suites d’une hémorragie interne au sanatorium d’Etat à Prague. Il y avait été emmené car le pouvoir voulait le sauver à tout prix pour le traduire devant un tribunal et lui faire faire ses « aveux » dans un procès monstre. Dans les années 1950, ces procès sont intentés contre les adversaires politiques du régime, dont les ecclésiastiques chassés des monastères, observe l’historien Jaroslav Šebek :

« Le 20 janvier 1950, le comité central du PCT approuve le plan de liquidation des monastères et du clergé. Ce plan de sinistre mémoire appelé « action K », ou encore la nuit de la Saint-Barthélemy, est réalisé en deux étapes : lors de la première, les 13 et 14 avril 1950, le pouvoir intervient contre les premiers ordres dans le pays : les Jésuites, les Salésiens, les Rédemptoristes et les Franciscains. Le régime intente un procès contre dix supérieurs de ces ordres. Les peines prononcées sont lourdes : le rédemptoriste Ivan Mastiliak est condamné à perpétuité, l’abbé Vít Tajovský, un proche de Josef Toufar, impliqué lui-aussi dans le « miracle de Čihošť » est condamné à 20 ans. Pour le régime communiste, ce procès devait être une compensation pour le procès jamais réalisé du prêtre Josef Toufar torturé à mort suite au miracle de Čihošť. »

L’événement appelé le « miracle de Čihošť » a longtemps été considéré comme une mise en scène de la StB. Une enquête menée après 1989 par l’Institut de documentation et d’enquête sur les crimes du communisme n’a pas apporté de réponse à ce phénomène qui reste inexpliqué et inexplicable. Comme le souligne Jaroslav Šebek, l’enquête a prouvé qu’il ne s’agissait pas, dans ce cas précis, de provocation de la StB, bien que celle-ci s’en soit servie pour déclencher les représailles contre l’Eglise :

« Dans les années 1948 – 1964, 174 procès contre des religieux ont eu lieu, dans lesquels 360 personnes ont été condamnées à une peine globale équivalente à 2100 ans. »

Josef Toufar est mort à l’âge de 47 ans et a été enterré dans une fosse commune à Prague - Ďáblice. Sa famille n’en a été informée qu’en 1954. L’enquêteur Mácha, condamné en 1998 à cinq ans de prison, puis à deux ans en appel, n’a jamais purgé sa peine pour des raisons de santé. Un monument érigé en 1990 devant l’église de Čihošť honore la mémoire de Josef Toufar et d’autres prêtres devenus victimes des représailles communistes.