C'est après une pause de 14 ans que le Théâtre national de Prague enrichit son répertoire avec une pièce de Vaclav Havel. La mise en scène de cette oeuvre intitulée "Tentation" a été confiée au metteur en scène américain Charles Marowitz.
La première impulsion pour écrire une pièce sur le thème faustien est venue à Vaclav Havel en 1977. Lors de sa première détention préventive, il s'est aperçu que le pouvoir cherchait à détourner le sens de la lettre adressée au procureur par laquelle Vaclav Havel avait demandé sa libération. Havel devait bientôt se rendre compte de la fragilité terrible d'un homme face à la machinerie politique et à son pouvoir de manipulation: le régime a fait de la lettre un instrument efficace pour discréditer son auteur. Il s'est rendu compte que celui qui tente de négocier avec le Diable en sort toujours éclaboussé. Huit ans après, Vaclav Havel écrira donc une pièce intitulée "Tentation" dans laquelle il exploitera cette expérience amère. C'est l'histoire de Henri Faustin, un scientifique, qui joue un jeu dangereux avec le Diable, représenté ici par un vieux monsieur invalide nommé Fausset. Les connotations politiques de cette pièce sont évidentes. Faustin peut être conçu comme la victime du régime totalitaire et diabolique représenté par Fausset. La portée de la pièce est cependant beaucoup plus générale et dépasse largement le contexte historique dans lequel elle a été créée. C'est d'ailleurs cet aspect qui est souligné dans la nouvelle production du Théâtre national par le metteur en scène Charles Marowitz.
Charles Marowitz, photo: CTK
Vaclav Havel, lui-même, a suivi de loin les répétitions et semblait satisfait: "J'ai l'impression que la distribution des rôles est bien faite, a-t-il dit à la veille de la première. J'ai assisté à une répétition, il y a un mois, peut-être plus, et j'ai été très agréablement surpris par certains comédiens. Je pense que le choix des acteurs pour les rôles principaux est bon."
Parmi les comédiens engagés pour cette production il y aussi la jeune et belle Martina Valkova qui campe Vilma, petite amie de Henri Faustin. Elle avoue que le texte de Havel lui posait quelques difficultés: "Havel utilise une langue spéciale qui ne situe pas la pièce dans la sphère du théâtre contemporain mais débouche sur une déformation bizarre. Jouer dans une telle pièce est donc pour moi un travail très particulier. C'est très difficile à jouer, et parfois plus difficile que de jouer dans une pièce de théâtre classique. Il y tant de significations cachées dans le texte et la responsabilité vis-à-vis d'un auteur vivant est si grande que c'est plus difficile."
Le metteur en scène Charles Marowitz aimerait donner à la pièce des résonances tout à fait actuelles. "La dictature des années 80 a beaucoup en commun avec la stratégie de grandes sociétés multinationales, dit-il, et de nombreux aspects de la pièce peuvent rappeler l'esprit de la mondialisation."