V4=2+2. Réunion à Prague d’un groupe de Visegrad profondément désuni sur l’Ukraine

Ce 27 février, le Premier ministre tchèque accueillera les Premiers ministres polonais, slovaque et hongrois au Palais Liechtenstein

Ce mardi doivent se réunir dans la capitale tchèque les chefs de gouvernement des pays du Groupe de Visegrad (V4), désarticulé par les postures pro-russes du Slovaque Robert Fico et du Hongrois Viktor Orbán.

Ce 27 février, le Premier ministre tchèque accueillera les Premiers ministres polonais, slovaque et hongrois au Palais Liechtenstein à Prague. « Petr Fiala, Donald Tusk, Robert Fico et Viktor Orbán discuteront de la sécurité énergétique, de l'agenda stratégique de l'UE, de la prévention de l'immigration illégale et de la poursuite du soutien au Fonds international de Visegrad », peut-on lire dans le communiqué du gouvernement tchèque, qui assure cette année la présidence de ce V4.

Sur les sujets mentionnés, surtout sur l’immigration illégale, les quatre capitales restent au diapason - et encore. Mais, depuis le retour au pouvoir de Robert Fico à Bratislava, difficile de ne pas constater que ce groupe de quatre pays est totalement désuni sur le principal enjeu géostratégique du moment pour le continent et au-delà : l’invasion russe et le soutien à apporter à l’Ukraine.

Après Viktor Orbán qui n’a pas hésité à aller serrer la main de Vladimir Poutine et à négocier son soutien au plan européen d’aide à Kyiv, Robert Fico prononce désormais des discours qui semblent écrits pour faire plaisir au Kremlin. A l’occasion du deuxième anniversaire de l’invasion russe ce samedi, le Premier ministre slovaque n’a en effet pas hésité à entonner les refrains poutiniens sur « les néo-nazis ukrainiens » et sur l’OTAN :

« Cette guerre a été déclenchée en 2014 par les déchaînements des néo-nazis ukrainiens. Cela trouve également son origine dans les assurances données à la Russie que l’OTAN ne s’étendrait pas plus à l’est. Et maintenant, les choses sont allées si loin que l'Ukraine elle-même est censée devenir membre de l'OTAN, ce que je considère comme seulement un bon point de départ pour une troisième guerre mondiale », a déclaré Robert Fico.

Viktor Orbán et Robert Fico | Photo: Geert Vanden Wijngaert,  ČTK/AP

Un temps soutenu par l'ancien président tchèque pro-russe Milos Zeman, qui a lui-même fini par concéder qu'il s'était trompé sur les intentions de Vladimir Poutine, Robert Fico s’était déjà fait remarquer en se rendant en Ukraine le mois dernier, mais en s’arrêtant à la ville occidentale d'Oujhorod, tout près de la frontière slovaque. Il a martelé aux journalistes - qui avaient osé lui demander pourquoi il ne se rendait pas à Kyiv comme la plupart de ses homologues européens - qu’il ne voyait aucune raison de le faire et qu’il n’y avait même pas la guerre dans la capitale ukrainienne, où selon lui les gens vivent tout à fait normalement.

« Je trouve tout à fait remarquable qu’il n’existe pas de véritable plan de paix. Que l’Union européenne n’utilise pas son poids considérable pour obtenir un cessez-le-feu immédiat. Le seul plan de l’UE est de continuer à soutenir l’assassinat mutuel des Slaves », a affirmé Robert Fico dans son discours de samedi, tandis que son homologue tchèque était à Paris ce lundi pour un sommet devant garantir le soutien européen à l’armée ukrainienne et pour y défendre le plan d’achat de munitions esquissé par le président tchèque Petr Pavel la semaine dernière à Munich.

Côté polonais, le nouveau gouvernement de Donald Tusk affiche lui aussi des positions très claires, comme le chef de la diplomatie Radoslaw Sikorski faisant la démonstration des mensonges russes à l’ONU ce week-end. Et ce pendant que, le même jour, Robert Fico évoquait « une fausse diabolisation de Vladimir Poutine » dans sa vidéo postée sur les réseaux sociaux.

Avec Robert Fico comme allié objectif d’un Viktor Orbán plus que réticent à soutenir l’Ukraine, il apparaît en tout cas de plus en plus évident que ce goupe de quatre pays d'Europe centrale (dont trois ont une frontière commune avec l'Ukraine) ne soit plus qu’un ensemble de deux États – Tchéquie et Pologne – face à deux autres – Slovaquie et Hongrie. D’ailleurs Donald Tusk sera reçu par Petr Fiala en premier et avant la réunion du V4 mardi matin à Prague.

Cela va bien au-delà des affiliations politiques à l'échelon européen, le parti ODS de Petr Fiala siégeant au parlement européen dans le groupe CRE avec le PiS désormais dans l'oppositon polonaise, tandis que la Plate-forme civique de Donald Tusk est membre du PPE, dont a fini par être exclu le Fidesz de Viktor Orbán en 2021.

Rare point positif que noteront certains dans ce nouvel alignement entre Budapest et Bratislava : les querelles concernant la minorité hongroise en Slovaquie semblent bel et bien avoir cessé, ou en tout cas ne sont plus l’objet de revendications politiques… pour l’instant.