Vers une hausse des salaires dans le secteur de la santé ?

Photo: Filip Jandourek, ČRo

Cinq ans après la campagne de protestation des médecins, « Merci, on s’en va », appelant ces derniers à démissionner en masse en cas de non-amélioration de leurs conditions générales de travail, le secteur de la santé en République tchèque est à nouveau en crise. La coalition gouvernementale au pouvoir doit se réunir mardi pour discuter de la question de l’augmentation des salaires du personnel médical.

Photo: Filip Jandourek,  ČRo
Ne pas mécontenter le personnel médical à travers la République tchèque est un des objectifs du gouvernement en place, qui sait que la question de la revalorisation des salaires est crucial en cette période pré-électorale, alors que les législatives et les sénatoriales doivent se dérouler en octobre prochain.

D’où la tournée des popotes des représentants de deux partis de la coalition au pouvoir dans des hôpitaux régionaux la semaine dernière. Et les déclarations d’intention du Premier ministre Bohuslav Sobotka, symboliquement à l’occasion du 1er mai, selon lesquels le parti social-démocrate soutenait l’idée d’une augmentation des salaires de 10% à compter du 1er janvier 2017. Même le ministre des Finances Andrej Babiš (ANO), à l’origine beaucoup plus réticent, a modéré son discours et admet la possibilité d’une augmentation tout en rappelant la nécessité de faire des économies :

Andrej Babiš,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
« Les médecins méritent sans conteste une augmentation de leurs salaires. Et pourquoi pas 10%. La question qui reste maintenant, c’est où trouver ces finances ? »

La Chambre tchèque des médecins propose notamment d’augmenter le montant des cotisations mensuelles de l’Etat à l’assurance santé pour les enfants, les retraités et les chômeurs, mais aussi une hausse de la taxe sur le tabac et l'alcool, estimant que si le prix du paquet de cigarettes augmentait de 5 CZK, le secteur de la santé pourrait engranger 5 millions de couronnes de plus par an, compensant ainsi la suppression des frais de régulation obligatoires. Cette contribution obligatoire de 30 CZK instaurée en 2008 pour chaque consultation médicale par le gouvernement de droite de Mirek Topolánek avait été en effet définitivement abandonnée par la nouvelle coalition au pouvoir au 1er janvier 2015.

Milan Kubek,  photo: ČT24
La sonnette d’alarme a été tirée par cette même Chambre des médecins, qui met en garde contre l’essoufflement d’un secteur en sous-effectifs et un total d’heures supplémentaires qui monte en flèche. Selon ses données internes, toutes les régions manquent de personnel et les hôpitaux auraient besoin d’embaucher près de 1 000 médecins pour faire face à la masse de travail. Milan Kubek est le président de la Chambre des médecins :

« Les médecins qui restent sont souvent obligés de violer le code du travail : ils sont en état de surmenage, il leur arrive de commettre des erreurs, et cette accumulation met en danger les patients. »

Roman Prymula,  photo: David Němec,  ČRo
Si les salaires des médecins et infirmiers ont augmenté à chaque fois de 5% ces deux dernières années, le secteur de la santé s’estime toujours sous pression, et ses représentants craignent une nouvelle fuite des cerveaux vers l’étranger comme ça avait été le cas il y a quelques années. Roman Prymula, directeur de l’Hôpital universitaire de Hradec Králové :

« Malheureusement, il manque un certain pourcentage de médecins dans le système de santé actuel. Et on ne s’attaque au problème que quand il y a des pressions. C’est pourtant un problème systémique sur le long terme. Il faut bien se rendre compte que s’il doit y avoir des changements, il faut envisager les choses sur neuf ans. Pour devenir médecin, il faut faire des études, obtenir son habilitation avant de pouvoir pratiquer. A l’heure actuelle, on a recours à des solutions de facilité, où l’on fait venir des médecins d’un établissement à l’autre pour compenser le manque, et c’est un vrai problème. »

Quels que soient les résultats des discussions avec le gouvernement, les syndicats du secteur de la santé entendent maintenir la pression au moins jusqu’aux élections de l’automne.