À Prague, la limitation de la vitesse à 30 km/h pas encore à l’ordre du jour

Alors qu’un nombre croissant de villes en Europe ont choisi de limiter la vitesse de circulation à 30 km/h, en République tchèque, le bannissement du 50 km/h reste sujet à controverse. À Prague, les avis sont très partagés.

« Les rues de Prague sont devenues un parking où une minorité tyrannise la majorité », pouvait-on lire, lundi 24 avril, en titre d’une analyse publiée par le quotidien Deník N. « Prague est en train de perdre la lutte contre les voitures », soulignait aussi le journal.

Zdeněk Hřib | Photo: Michaela Danelová,  ČRo

Si l’analyse en question se concentrait sur le stationnement souvent sauvage des véhicules faute d’un nombre de places suffisant, le constat n’en reste pas moins que, de manière plus générale, l’automobile tend à prendre une place toujours plus importante dans l’espace public de la capitale tchèque. Un constat que dresse également l’ancien maire et désormais maire-adjoint de Prague, Zdeněk Hřib (Parti des Pirates), alors que plus d’un million de véhicules (pour 1,2 million d’habitants) y sont désormais immatriculés :

« Il y a trop de voitures et de plus en plus d’embouteillages, même lorsque personne ne défile sur la ‘Magistrala’ (un axe nord-sud à quatre voies qui traverse la ville en son centre). C’est une réalité objective et il va nous falloir trouver des solutions. Les faits sont tels que nous allons devoir nous pencher sur la question de l’apaisement du centre de Prague. »

Une des solutions envisagées pour cela est l’abaissement à 30 km/h de la vitesse de circulation dans l’ensemble de la ville, une mesure déjà adoptée par de nombreuses capitales en Europe comme Paris, Bruxelles, Berlin, Madrid ou encore Helsinki et Stockholm.

Photo: Bronislav Valenta,  Panoramio,  CC BY 3.0

À Prague, où le centre avec ses rues étroites se prête particulièrement mal à la circulation automobile, l’idée fait encore son chemin. La traversée de la ville par la « Magistrala », considérée comme une erreur urbanistique historique, et l’absence du tronçon nord du périphérique compliquent encore le trafic.

Mais même dans un pays où là voiture, au-delà de sa dimension utilitaire, continue d’incarner une certaine liberté individuelle, le débat tend à avancer. Ce débat fait suite notamment à des actions de protestation menées par l’association appelée « Poslední generace » (« La dernière génération qui peut encore empêcher l’effondrement écologique total »). Un groupe composé essentiellement de jeunes gens qui a organisé plusieurs marches au cours des derniers mois, dont une en mars dernier sur la « Magistrala » qui a notoirement ralenti la circulation et rendu furieux les automobilistes. Leur objectif est de parvenir à faire en sorte que les rues à Prague où la circulation automobile est autorisée soient perçues comme un lieu appartenant à tous et où il est possible de mieux vivre.

Sécurité renforcée des piétons, plus grande fluidité du trafic, meilleure qualité de l’air, réduction des nuisances sonores ou encore davantage de place pour les cyclistes, les effets escomptés du rabaissement de la vitesse dans les villes sont désormais bien connus, et ce comme le rappelle Oldřich Štros, membre de l’organisation « Poslední generace » :

Photo: Štěpánka Budková,  Radio Prague Int.

« Le nombre de voitures ne cesse d’augmenter à Prague et elles occupent une place toujours plus importante dans l’espace public. En réduisant la vitesse à 30 km/h, la circulation automobile dans les rues sera moindre. Il faut aussi réduire les possibilités de stationnement dans le centre-ville de manière à mieux partager les voies publiques et à les rendre plus accessibles aux piétons, aux cyclistes et aux autres participants au trafic. La situation n’est pas propre à Prague, elle est même encore pire à Brno et c’est pourquoi nous y organiserons aussi des marches à compter du début du mois de mai. »

En attendant ces manifestations dans le chef-lieu de la Moravie, à Prague, la vitesse a déjà été rabaissée dans de nombreux endroits. Et s’il se dit favorable à la mesure, Zdeněk Hřib, que les Pragois ont l’habitude de voir dans le métro, est toutefois davantage partisan d’une adaptation en fonction du type d’axes :

« Des limitations à 30 km/h sont continuellement introduites à Prague dans les zones résidentielles et sur les routes secondaires, mais c’est une décision qui est de la compétence des mairies d’arrondissement. Pour ce qui est de la mairie de Prague, elle est chargée de la gestion des voies principales et c’est vrai que la vitesse n’y est pas limitée à 30 km/h et je pense que c’est plutôt logique. Mais cela est le cas aussi à Paris, que tout le monde cite en exemple mais où une vitesse plus élévée a été maintenue sur certains grands axes comme le périphérique. »

Si à Prague, comme dans les autres grandes villes tchèques, les « zones 30 » tendent donc à se développer, leur généralisation n’est pas encore à l’ordre du jour. L’adoption de la mesure ne constitue pas une priorité pour les municipalités et ne devrait pas faire l’objet, ne serait-ce que dans un proche avenir, d’une éventuelle consultation de la population.