De l’analyse vidéo avancée pour réguler le trafic dans Prague
Alors que les embouteillages sont de plus en plus fréquents à Prague, le conseil municipal a signé un contrat, en ce mois d’août, avec l’entreprise OICT pour mettre en place un système de caméras qui permettra une collecte plus efficace et plus exploitable des données sur le trafic routier. De nouvelles opportunités pour une future transformation des routes pragoises seraient-elles en vue ?
En seulement trente ans, le nombre de voitures circulant quotidiennement à la frontière entre Prague et la région de Bohême centrale a été quasiment multiplié par six, passant de 118 000 en 1980 à 679 000 en 2021. Une augmentation du trafic automobile qui génère aussi bien des difficultés de circulation que des accidents, et également de la pollution atmosphérique. C’est pour répondre à ces problématiques que la ville de Prague travaille avec l’entreprise municipale OICT, experte en technologies d’information et de communication, sur un projet innovant qui permettra d’obtenir de nombreuses informations sur la circulation routière grâce à des caméras, informations qui seront par la suite exploitées pour améliorer la gestion du trafic automobile. Ce projet s’inspire d’initiatives mises en place dans d’autres villes européennes telles que Vienne, Munich, ou encore Copenhague. Petr Suška, le directeur de la section « Smart City, Innovations et Gestion de projets » de OICT, nous en dit plus sur l’origine du projet :
« La façon dont nous analysons le trafic actuellement n’est pas très efficace. La raison de cela, c’est que nous avons environ dix différentes manières de collecter des données : différents types de centres de collecte, avec des capteurs pour certains, des caméras pour d’autres, et nous avons même des personnes présentes sur les routes pour compter les voitures qui passent. Vous pouvez imaginer qu’au XXIe siècle, ce n’est pas la façon la plus efficace de procéder. Nous avons donc soumis l’idée d’un système intégré qui peut tout faire en même temps. Notre motivation principale, c’est que cela génère des données beaucoup plus fiables et que nous pouvons obtenir en temps réel, 24h/24. En cas d’accident, nous serions ainsi capables de réagir beaucoup plus rapidement et nous n’aurions pas besoin d’attendre que quelqu’un le notifie. »
Par ailleurs, cette collecte de données associée à l’intelligence artificielle permettrait de prédire les conditions de circulation, et ainsi mieux gérer le trafic automobile dans la ville. Une avancée très utile quand on sait que la ville de Prague possède un réseau routier de 400 kilomètres, composé de 700 intersections. Pour le moment, le représentant d’OICT confie que ces caméras ne seront installées que dans Prague 6 et Prague 11, pour les tester et s’assurer de leur efficacité. Il affirme avoir choisi des lieux avec des types d’intersection différentes – avec et sans passages piétons, un carrefour à sens giratoire, des lieux de passages avec différents types de véhicules – pour recueillir les différentes informations. Mais d’ailleurs, quelles sont-elles ? Petr Suška :
« Nous allons regarder à l’intensité du trafic, en termes de rapidité et de fluidité de circulation, la vitesse, les modes de transports – bus, camion, voitures individuelles, moto, scooter. Nous allons cartographier le mouvement pour savoir d’où vient le flux et vers où il se dirige. Evidemment, nous allons aussi déterminer où se trouvent les embouteillages et essayer de comprendre quels sont les facteurs qui provoquent cet encombrement. C’est là qu’intervient l’intelligence artificielle. Cela permettra de planifier des itinéraires et de donner des recommandations aux gens. »
Mais ce ne sont pas uniquement les véhicules motorisés qui intéressent la société : elle analyse également les déplacements des piétons et des vélos, et veut ensuite croiser les informations obtenues avec celles sur le trafic automobile. Bien évidemment, toutes les données collectées sont anonymisées et servent juste à avoir une vue générale du réseau routier de la capitale tchèque. Il est d’ailleurs possible de les consulter sur le site Golemio. Le but, en rendant ces données publiques, est de promouvoir les modes de transports plus doux :
« Finalement, ce que nous souhaiterions, c’est que les gens utilisent des modes de transports autres que la voiture et se rendent compte des externalités qu’elle génère. Ce projet s’inscrit dans plusieurs stratégies municipales comme le plan de développement durable, le plan pour s’adapter au changement climatique et le plan climat. Il s’inscrit également dans ce que l’on appelle en interne le ‘Smart City Concept Prague 2030’. »
Aussi appelée ville intelligente, une smart city est une ville qui utilise les technologies de l’information et de la communication pour produire des services urbains et réduire les coûts aussi bien économiques qu’environnementaux. Avec ce projet d’analyses vidéo, la firme contribue à transformer Prague en une smart city, un objectif qu’elle s’est d’ailleurs fixé pour 2030. Mais cette transformation ne se fera pas sans l’appui du pouvoir politique. Le maire de Prague, Zdeněk Hřib, a déclaré à ce propos que les autorités devaient trouver des solutions pour assurer une circulation fluide sur le territoire, en investissant massivement dans les infrastructures, mais aussi en gérant les transports « sur la base de données et non d’impressions ».
A présent, à leur tour de jouer pour atteindre les objectifs établies d’ici huit ans. Pour les aider à cela, se tiendra les 19 et 20 septembre prochains le Prague Data Congress, une conférence dont l’objectif sera de discuter les différentes solutions qui peuvent être mises en place à Prague en termes de gestion urbaine durable. Espérons alors que dans quelques années, il soit plus aisé et moins polluant de se déplacer à Prague.