« Avec les Tchèques, il suffit de briser la glace. Mais il faut faire le premier pas ! »

David Marie

Courtier automobile originaire de Bretagne, David vit à Prague depuis le 16 janvier 2019. S’il n’a pas oublié la date précise de son arrivée en République tchèque, il ne semble pas prêt de décider de celle de son départ. Et pour raconter son histoire, David a tenu à rencontrer Radio Prague International dans le bar U Sadu de Žižkov. Un lieu pour lui hautement « symbolique » puisque c’est ici même qu’il a pris, il y a quelques années, « l’une de [ses] meilleures décisions ».

« Je m’appelle David, j’ai 36 ans et je suis originaire de Bretagne. Je suis passionné d’automobile. En France, j’ai fait une grande partie de ma carrière dans l’automobile ; j’y ai travaillé dans différentes entreprises. J’ai toujours travaillé dans ce milieu, qui m’intéresse. Je pratique également beaucoup, comme sport, le running. Ici, à Prague, j’ai recommencé récemment à courir. Et je prévois de participer au marathon de Prague l’an prochain. Sinon, j’aime la ville et la vie ici, c’est pour ça que je suis là. »

Qu’est-ce qui vous a amené à Prague ?

Prague | Photo: Jarod Barton,  Pexels,  CC0 1.0 DEED

« Plusieurs choses. J’étais à un moment de ma vie où j’avais besoin de changement. En France j’étais employé, j’avais une certaine routine… J’étais déjà venu à Prague quelques années auparavant, car j’ai un ami qui vit ici. J’avais gardé un bon souvenir de cette ville, et puis il y avait cette opportunité que constituait le fait d’avoir un ami sur place. J’étais également conscient des opportunités de business qu’offrait Prague. Je me suis dit que j’allais prendre le risque de venir m’installer ici, d’essayer. Je suis toujours là, ce n’était que du positif, je ne regrette pas. C’est comme ça que j’ai connu cette ville, et je continue de l’apprécier, et je ne compte pas en repartir, pas tout de suite, c’est certain. L’endroit où nous nous trouvons maintenant, le bar U Sadu à Žížkov, n’est pas anodin : lorsque je suis revenu voir mon ami quelques mois avant de venir m’installer ici, on discutait dans ce bar et c’est ici que je lui ai dit ‘je vais revenir, mais pour m’installer, et pas seulement pour visiter’. C’était l’une des meilleures décisions que j’ai prises jusqu’à maintenant. »

Et vous avez décidé de créer votre entreprise ?

« Bizarrement, cela n’a pas été si compliqué que ça, même s’il y a la barrière de la langue. Mais au niveau des formats d’entreprises permettant de travailler avec le statut d’indépendant, il y a des similitudes avec la France, ce n’est pas complètement étranger. On peut s’inscrire rapidement et à moindre coût pour lancer une première affaire, obtenir le statut indépendant. Sur certains points – mais pas sur tous – cela me semble plus simple qu’en France, du moins du point de vue administratif, d’accès à l’entreprise. »

En quoi consiste votre activité professionnelle ?

Photo illusttrative: Alexander Lesnitsky,  Pixabay,  CC0 1.0 DEED

« C’est toujours dans l’automobile, car c’est sur cela que j’ai bâti mon expérience et mes contacts en France. Mon idée, c’était d’être ici, au plus près des marchands automobiles. Car ce qui m’intéresse, c’est l’achat-revente. C’est ce que j’apprécie aujourd’hui, c’est d’aller au contact des revendeurs, de les aider à faire de l’export, en France, un marché plus propice pour eux. J’essaye d’installer une sorte de connexion entre la France et la République tchèque. J’interviens auprès des revendeurs de voitures d’occasion ou neuves, tant qu’il s’agit de voitures de tourisme. Mais pas de toutes marques : mon activité est principalement ciblée sur les marques qui intéressent le marché français, à savoir les marques françaises ou allemandes. Je fais également un peu de Škoda, mais ce n’est pas la marque préférée en France. Et je pense que les Tchèques se débrouillent très bien pour vendre leur marque sur le marché local. »

Qu’est-ce que vous appréciez le plus dans la vie quotidienne en Tchéquie et à Prague ?

Photo illustrative: Free-Photos,  Pixabay,  CC0 1.0 DEED

« Il y a beaucoup de choses que j’ai apprises à apprécier ici. Ce qui m’a frappé, quand je suis arrivé de France, c’est une certaine forme de simplicité. Ici, on ne se complique pas la vie. D’après ce que j’ai compris, dans la culture tchèque, on ne cherche pas à en faire beaucoup pour être heureux, à voyager énormément. Il y a ici, en comparaison avec la France, une simplicité de vie apaisante que j’ai tout de suite appréciée. Le stress accumulé en France s’est quelque peu évaporé. C’est peut-être ça, la vie de bohème… Avec les Tchèques, on ressent beaucoup de sérénité. Ça se voit à tous les coins de rue, et on les voit partir le week-end dans la nature… Ce sont les plaisirs simples. C’est ça que la culture tchèque a à apprendre à la culture française, voire à d’autres cultures. C’est ça que j’apprécie le plus ici. »

« Il y a également la beauté de la ville, quand on parle plus précisément de Prague. L’architecture, l’accès à l’art, tout ce genre de choses… C’est un luxe, et la cerise sur le gâteau, c’est que c’est accessible en termes de coût. C’est aussi quelque chose que j’apprécie énormément, cette grande liberté par rapport au coût de la vie ici. On peut faire beaucoup de choses, aller au restaurant, au théâtre, et se déplacer dans le pays, aussi, pour beaucoup moins cher que ce que je connaissais avant en France. Ça, on le ressent vraiment comme une forme de liberté. »

Côtoyez-vous plutôt des Tchèques ou des étrangers ?

« Je dirais que c’est moitié moitié. Bizarrement, je côtoie beaucoup de Tchèques parlant français. J’essaye de m’intégrer au mieux, mais Prague est une ville internationale, donc on côtoie beaucoup de nationalités différentes. J’ai envie d’apprendre le tchèque, mais il faut pour cela une vraie volonté. Car on n’est pas confronté à la nécessité de l’apprendre, en tout cas si on reste à Prague. A moins d’être obligé de l’apprendre, par le travail ou une situation sociale donnée. Mais malheureusement – ou heureusement – les Tchèques se débrouillent très bien en anglais. Je n’ai donc pas eu de problème de communication, ou bien ça a été assez rare. Mais je compte m’y intéresser, ne serait-ce que pour avoir des interactions basiques, au restaurant ou pour me présenter. Mais à partir de l’an prochain, je vais prendre une bonne résolution et apprendre. La prochaine fois, on fera une interview en tchèque ! »

Quels sont les points négatifs de votre vie à Prague ?

« Beaucoup de mes amis expatriés disent beaucoup de choses sur les Tchèques, sur le côté social des Tchèques. Moi j’ai appris à connaître un peu plus la culture. Même s’il est vrai qu’au début, on a l’impression d’une certaine distance, une fois qu’on fait l’effort d’entrer dans la culture, cette distance est remplacée par une proximité très forte. Il suffit de passer de l’autre côté du cercle de confiance. Mon affaire professionnelle reflète aussi cela, car lorsque j’ai commencé à aller voir des Tchèques dans leurs garages, leurs concessions de voitures, j’étais confronté à la même chose. Mais au final, ces relations, une fois acquises, sont solides et durables. Il suffit de briser la glace, mais il faut faire le premier pas. »

Quel est votre endroit préféré, à Prague ou ailleurs en République tchèque ?

Vyšehrad | Photo: Irina Ručkina,  Radio Prague Int.

« Il y a beaucoup d’endroits magnifiques. On peut citer de la Suisse de Bohême, Český Krumlov, la Moravie… Mais si je devais retenir un seul endroit, ça serait à Prague : Vyšehrad. L’histoire, le lieu et le point de vue qu’il offre sur la ville sont vraiment intéressants. J’y vais régulièrement car c’est un endroit très apaisant. On a l’impression d’être en retrait, alors que c’est en plein cœur de la ville. On y a l’impression d’être dans une bulle, c’est parfait pour penser et se relaxer. »

Même si vous ne parlez pas le tchèque, y a-t-il des mots tchèques que vous connaissez et aimez ?

« Les premiers mots qu’on apprend dans une langue étrangère ne sont bien évidemment pas les plus prononçables : ce sont des insultes, des gros mots… Mais j’en ai un qui est, je pense, écoutable : c’est ‘Ježíš Maria*’, une expression de surprise que j’entends souvent dans la rue. C’est intéressant, parce que les Tchèques n’expriment pas beaucoup leurs émotions. Donc quand j’entends ‘Ježíš Maria!’, je me retourne systématiquement, parce qu’il s’agit souvent d’une situation inhabituelle, de quelque chose de drôle à regarder. C’est donc le mot qui me plaît le plus, parce que la situation qui va avec m’apporte souvent le sourire. »

* littéralement, "Jésus Marie". Expression d'émotion généralement intense, d'après le Dictionnaire de la langue tchèque littéraire (SSJČ).