Des fresques romanes exceptionnellesdans la rotonde Sainte-Catherine à Znojmo

Petite visite de saison : nous vous invitons à découvrir un édifice historique exceptionnel, dans le sud de la Moravie : la rotonde Sainte-Catherine, dont nous vous racontons brièvement l'histoire...

C'est un petit bijou de l'art roman, planté sur une colline qui surplombe un paysage d'une rare beauté. Nous sommes à Znojmo, capitale viticole de la Moravie du Sud. En contrebas de la ville perchée s'écoule la rivière Dyje. A l'horizon, la frontière autrichienne n'est pas loin.

Un quart d'heure de visite, dix personnes maximum, et une seule visite par heure, tout cela avec l'interdiction formelle de parler à l'intérieur de l'unique salle circulaire de la rotonde Sainte-Catherine. Avec un casque sur les oreilles, le visiteur découvre à mesure que la lumière éclaire les murs du sanctuaire l'histoire du monument. Datant de la moitié du XIè siècle, c'est le seul édifice conservé du château des princes premyslides, bâti à l'époque pour défendre la frontière sud du royaume. Mais l'intérêt du lieu n'est pas tant le bâtiment, car il y a d'autres rotondes romanes dans le pays : les épaisses pierres qui la composent abritent en fait des peintures d'époque, remarquablement conservées mais si fragiles qu'elles nécessitent le maintien permanent d'un micro-climat stable. D'où les mesures extrêmement strictes imposées aux visites pour limiter les dégâts causés par la respiration ou la condensation.

Sous la coupole où s'étale traditionnellement le monde cosmique et céleste, avec des anges de l'apocalypse et les quatre évangélistes, se déploient 19 princes premyslides et le premier roi de Bohême Vratislav. Mais le cycle de fresques, qui s'étale sur les murs et la voûte comprend surtout une représentation rare et absolument unique en son genre. Sur un des bandeaux : un laboureur, et certaines hypothèses penchent pour Premysl Orac, considéré comme le fondateur mythique de la dynastie des Premyslides. Il y est représenté avec la prophétesse Libuse, qui l'avait choisi comme époux, au-dessus d'une scène représentant la naissance du Christ. Une manière, par la symbolique de légitimer le pouvoir dynastique : en mettant le Christ, seigneur céleste, en-dessous de Premysl, seigneur terrestre, le rôle de celui-ci lui est ainsi garanti, la dynastie dont il est le fondateur légendaire règne de plein droit, de droit divin...

Les autres fresques détaillent des scènes de la vie du Christ et le représentent sous ses formes archétypales - Christ Pantocrator, Christ en majesté - ou bien encore les douze apôtres. Classiques, elles n'en sont pas moins d'une pure beauté. Les applats ocre, rouges, bleus, jaunes et verts, malgré les siècles et les restaurations, n'ont pas perdu de leur éclat inspiré. Evidemment, impossible de ne pas ressortir avec un intense sentiment de frustration après le maigre quart d'heure de grâce forcément insuffisant. Ne serait-ce que parce que très concrètement, les yeux doivent s'habituer à la pénombre et à la lumière artificielle, de même que l'on perd quelques minutes avant de parvenir à se concentrer sur le récit du guide audio.

A l'origine la rotonde avait été consacrée à la Vierge Marie, comme en témoigne une inscription gothique en latin, redécouverte sur un mur en 1949. Au XIVè siècle, la rotonde est donnée à l'ordre des Clarisses qui la cèderont à la ville en 1555. Plus tard, au XVIIIè siècle, les propriétaires de la brasserie voisine l'utiliseront comme lieu de stockage pour le bois, avant qu'elle ne devienne elle-même un petit dancing où boire de la bière ! Certaines voies sont décidément impénétrables...