Il y a un an, la Suisse bohémienne en proie aux flammes

Le parc national de la Suisse bohémienne un an après de l’incendie

Il y a un an, le plus important incendie de l’histoire moderne de la République tchèque ravageait le parc national de la Suisse bohémienne. Si l’écosystème renaît progressivement de ses cendres, les visiteurs, eux, tardent encore à revenir.

Les images des violents incendies qui sévissent actuellement sur l’île grecque de Rhodes réveillent de douloureux souvenirs en Tchéquie. Elles rappellent incontestablement les scènes de terreur et de désolation observées il y a un an dans la région de la Suisse bohémienne à la frontière avec la Saxe. Le feu s’était déclaré dans la nuit du 23 au 24 juillet 2022. Pendant une vingtaine de jours, plus de 6 300 pompiers s’étaient relayés pour venir à bout de l’incendie qui a ravagé plus de 1 000 hectares de forêt. Plusieurs villages avaient été évacués. Des avions spéciaux venus d’Italie et de Suède et des hélicoptères polonais et slovaques avaient été dépêchés pour prêter main forte aux soldats du feu. L’incendie, qui s’était propagé au-delà des frontières de la République tchèque, n’avait finalement été complètement maîtrisé que le 12 août, soit trois semaines plus tard.

En mai, un homme, soupçonné d’être à l’origine de l’incendie, a été arrêté et inculpé pour mise en danger de la vie d’autrui et dégradation de biens appartenant à autrui. S’il est reconnu coupable, l’homme risque une peine d’emprisonnement maximale de quinze ans.

Le parc national de la Suisse bohémienne un an après de l’incendie en 2022 | Photo: Jakub Delibalta,  ČRo

Cerfs, grenouilles, faucons, bouleaux et fougères refont leur apparition

Un an après le tragique événement, l’écosystème se recompose graduellement. Champignons, mousses et lichens sont les premiers organismes à avoir refait leur apparition. Quatorze jours après la fin de l’incendie, les fougères, qui grâce à leurs racines profondes ont pu résister en partie aux flammes, ont commencé à retapisser de vert les terres calcinées.

Le photographe et employé de l’administration du parc national de la Suisse bohémienne, Václav Sojka, est un témoin privilégié de cette lente renaissance. Au micro de Radio Plus, Sojka partage les évolutions de comportements qu’il a observées chez les animaux :

Václav Sojka | Photo: Daniela Pilařová,  ČRo

« Pour le faucon pèlerin, le feu n’est pas un problème. […] C’est le prédateur le plus rapide de la planète. Il peut atteindre une vitesse proche de 360 ​​​​km/h. Je précise cela parce qu’il ne chasse que dans des espaces dégagés. Qu’il y ait donc une forêt derrière les rochers ou qu’il n’y en ait pas, cela a peu d’importance pour le faucon. […] Le problème, c’est que ses proies - le pigeon colombin ou le pigeon ramier par exemple – ont, elles, généralement besoin de forêts de hêtres ou de pins et ont donc été amenées à nicher plus loin. Il en est de même pour la cigogne noire dont le nid se doit d’être dissimulé pour ne pas être vu de loin. »

« Certains oiseaux ont donc migré, tandis que d’autres sont restés. Il s’agit là d’une phase transitoire. Dans trois ans, les pousses de bouleaux dans les zones anciennement brûlées atteindront un mètre et demi, puis dans dix ans ces arbres mesureront dix mètres. Il y aura alors une nouvelle forêt et les oiseaux recommenceront à se réapproprier tout ce que la nature leur offre. »

Le parc national de la Suisse bohémienne un an après de l’incendie | Photo: Jakub Delibalta,  ČRo

Le tourisme toujours en berne dans la Suisse bohémienne

Le parc national de la Suisse bohémienne un an après de l’incendie | Photo: Jakub Delibalta,  ČRo

Malgré les espoirs qui se veulent rassurants du photographe, les visiteurs, eux, se font toujours attendre. La situation constitue une préoccupation majeure du territoire où un employé sur dix travaille dans le milieu du tourisme. La région d’Ústí nad Labem a pourtant multiplié les campagnes de communication ces derniers mois en proposant notamment aux voyageurs en basse saison un remboursement de 300 couronnes (12 euros) par nuit et par personne à condition de passer au moins deux nuitées dans la Suisse bohémienne. Si l’offre a convaincu un certain nombre de clients de faire le déplacement, les chiffres de l’hôtellerie n’en restent pas moins largement en-deçà de la moyenne. A Hřensko et Mezní Louka, parmi les communes les plus touchées par les feux, la baisse de fréquentation enregistrée sur un an avoisinerait les 50 %.

Les touristes semblent hésiter à venir compte tenu de la fermeture de certains segments du parc national. Alors que la splendide arche de grès (Pravčická brána) et la gorge sauvage (Divoká soutěska) sont ouvertes, la gorge d’Edmond (Edmundova soutěska) et le sentier de Gabrielle (Gabrielina stezka) restent, eux, partiellement ou entièrement fermés. Pour le maire du village de Hřensko, Zdeněk Pánek, « la seule solution pour renverser la situation dans le parc national et revenir à la normale [serait] d’ouvrir [ces lieux] » le plus rapidement possible.

La gorge d’Edmond  (Edmundova soutěska) à la rivière Kamenice à Hřensko | Photo: Miloš Turek,  Radio Prague Int.


Vít Rakušan alerte sur les risques d’incendies à grande échelle

Vít Rakušan  (à droite) regarde l'hélicoptère Black Hawk | Photo: Ondřej Hájek,  ČTK

A l’occasion du premier anniversaire de l’incendie, le ministre de l’Intérieur, Vít Rakušan (STAN), était ce lundi à Roudnice nad Labem, non loin de la Suisse bohémienne. En conférence de presse, le ministre a mis en avant les initiatives prises par le gouvernement pour mieux anticiper la réitération de telles catastrophes. La République tchèque possède actuellement deux hélicoptères Bell de la police pouvant transporter 900 litres d’eau et loue deux hélicoptères Black Hawk ayant une capacité de 3 000 litres. Les pompiers ont également à leur disposition 24 camions-citernes et trois réservoirs pompier de 54 000 litres et trois de 36 000 litres pour stocker l’eau dans les lieux où celle-ci se fait rare. Enfin, près de 300 millions de couronnes ont été déboursés pour moderniser et renouveler les équipements des pompiers.

Le ministre a ajouté qu’à l’avenir « la République tchèque pourrait devenir une base d’Europe centrale pour des opérations de lutte contre les incendies à grande échelle », alors qu’il faut s’attendre, selon lui, à ce que de tels phénomènes ne soient plus l’apanage des pays du sud de l’Europe.

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