Joël Chapron : « La République tchèque a toujours fait la part belle aux films français »

La soirée de jeudi a sonné l’ouverture de la 24e édition du Festival du Film français qui se tient jusqu’au 24 novembre en République tchèque. A cette occasion, Radio Prague Int. a interrogé Joël Chapron, responsable du secteur Europe centrale et orientale pour Unifrance, une organisation chargée de promouvoir le cinéma français dans le monde.

Pouvez-vous rappeler quel est le rôle d’Unifrance dans l’organisation du Festival du Film français en République tchèque ?

Joël Chapron | Photo: Katioucha44,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

« Unifrance a d’abord lancé ce festival avec l’Ambassade de France il y a 24 ans et cela a toujours été imaginé comme une opération conjointe. A l’époque, nous avions lancé plusieurs festivals en Europe de l’Est : à Budapest, Moscou, Prague ainsi qu’à Belgrade. Aujourd’hui il n’y a plus que le festival de Prague qui se maintient et c’est maintenant l’Institut français de Prague qui est aux manettes. Il organise et nous apportons un soutien financier et artistique car nous envoyons des artistes quand c’est possible. C’est l’Institut français et l’important travail qu’il réalise qui rend ce festival possible aujourd’hui. C’est vraiment un festival important pour nous. C’est la dernière opération qui nous reste en Europe de l’Est de manière annuelle. »

Selon quels critères ont été sélectionnés les films présentés cette année ?

« Il y a eu des évolutions au cours des dernières années, notamment au cours des dix dernières, dans la sélection des films. Il a toujours été important pour Unifrance que le festival puisse servir de rampe de lancement aux distributeurs. Le cœur de la manifestation ce sont donc les films qui ne sont pas encore sortis à Prague mais qui ont déjà été achetés par les distributeurs tchèques et qui vont être présentés en avant-première au public tchèque lors de ce festival. Avec l’Institut français nous faisons donc le tour des distributeurs pour savoir ce qu’ils ont acheté, ce qu’ils n’ont pas sorti et ce qu’ils souhaiteraient mettre au programme du Festival. Il y a quelques années, c’était un travail relativement difficile parce qu’ils n’étaient pas toujours convaincus de l’utilité du festival. Aujourd’hui ils le sont donc c’est plus facile. C’est pourquoi il y a dix avant-premières venant de tous les distributeurs tchèques implantés en République tchèque. Elles représentent vraiment le cœur de la manifestation.

'Jane par Charlotte' | Photo: Festival du film français

Avec les années, l’Institut français a décidé d’agrandir le nombre de sélections et de sections. Il y a également une compétition qui compte huit films cette année avec, à la clé, un prix du public soutenu par TV5 Monde. Ces films sont généralement choisis par des journalistes tchèques qui les ont vus dans différents festivals dans le monde. Ce sont des films qui ne sont pas achetés et ne vont pas sortir en République tchèque mais dont les journalistes pensent qu’il est important de les montrer au public tchèque qui décide in fine du film qui peut bénéficier du soutien de TV5 monde. L’Institut a également élargi le festival avec Costa-Gavras qui devait venir, un focus sur Charlotte Gainsbourg, un hommage à Jean-Paul Belmondo, des séances spéciales, des reprises de films qui ont été en distribution… Aussi,  depuis de nombreuses années, l’Institut français souhaite organiser une soirée du court-métrage français dans le cadre du festival. C’est aussi très important pour nous de mettre en avant les futurs noms du cinéma français. Il y a donc dix court-métrages choisis par Unifrance et projetés chaque année dans le cadre du festival. C’est important pour le renouvellement des talents de voir les court-métrages d’un pays quand on s’intéresse à cette cinématographie. La sélection des films, toutes sections confondues, se fait donc à la fois par l’Institut mais aussi par la partie tchèque c’est-à-dire par les distributeurs pour les avant-premières, par les journalistes pour les films en compétition et pour un certain nombre de sections parallèles. »

Photo: Festival du film français

Cette année le festival présente deux co-productions franco-tchèques, est-ce que cela révèle l’existence d’un lien fort entre le cinéma français et le cinéma tchèque ?

'La Traversée' | Photo: Festival du film français

« Je pense que cela révèle un lien c’est sûr mais est-ce que ce lien est aussi fort au niveau des co-productions ? Aujourd’hui davantage car il y a plus de possibilités de co-produire à la fois pour des films français et pour des films tchèques donc nous voyons une progression des co-productions. De plus, la République tchèque est une terre d’accueil pour le cinéma français qui souhaite tourner là-bas. Donc ce lien existe et il est fort parce qu’il est très ancien et qu’il ne s’est jamais démenti. Du temps du communisme, les co-productions étaient quasiment impossibles évidemment, mais depuis, cela s’est beaucoup développé. Le lien, même s’il n’est pas extrêmement fort, continue d’exister donc il est important pour nous de montrer au public les co-productions que nous avons réalisées l’année précédente avec la République tchèque. »

Vous avez dit que le cinéma français aime tourner en République tchèque. A votre connaissance, y a-t-ils des projets cinématographiques en cours entre les deux pays (d’autres co-productions, des projets de films devant être tournés à Prague…) ?

Lambert Wilson | Photo: Georges Biard,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0

« Je ne suis pas cette partie-là des tournages mais je suis absolument persuadé qu’il y en a. Je sais, par exemple, que Lambert Wilson était à Prague pour tourner dans une série. Je crois qu’il y a croisé d’autres acteurs qui tournaient autre chose. Donc je sais que cette partie de la fabrication des films continue de se faire et les français sont toujours ravis d’aller tourner en République tchèque. »

Est-ce que les films français sont généralement bien accueillis par le public tchèque ?

« Oui. La République tchèque a toujours fait la part belle aux films français. Cela a commencé du temps du communisme et même avant. Depuis, sans doute aussi en partie grâce à ce festival, je pense que le public tchèque a réussi à s’habituer aux nouveaux visages du cinéma français, aux nouveaux noms des metteurs en scènes. Généralement, c’est-à-dire sans parler des années 2020 et 2021 qui ont été particulières à cause de la pandémie,  30 à 50 films sortent chaque année en République tchèque, co-productions comprises. Donc, pour nous, cela reste un territoire important. En Europe de l’Est, c’est le troisième ou le quatrième le plus important après la Russie, la Pologne et parfois la Hongrie. D’une manière générale, le cinéma français a toujours été bien accueilli à l’Est de l’Europe historiquement. Avec le travail des distributeurs tchèques, du festival et des journalistes tchèques qui se font le relai de la sortie de chacun des films, nous avons la chance d’avoir de très bons relais sur place pour continuer d’avoir une réelle notoriété dans le pays. Même si en pourcentage de part de marché, le cinéma français n’est pas très haut en République tchèque, nous savons qu’il est très fort dans le cœur des tchèques et surtout sa présence est permanente, ce qui est le plus important. »

Photo: Festival du film français

https://www.festivalff.cz/fr/