Journée de la mémoire pour les anciens combattants

La principale cérémonie a lieu traditionnellement au mémorial national de Vítkov, photo: CT24

Depuis 1919, le 11 novembre est dans le monde une journée de commémoration pour rappeler la signature de l'armistice mettant fin à la Première Guerre mondiale et pour entretenir la mémoire de tous les sacrifices des conflits mondiaux du XXe siècle. La République tchèque s'est ralliée en 2001 à cette tradition en rendant hommage aux légionnaires, aux pilotes de la RAF, aux combattants de la Deuxième Guerre mondiale ainsi qu'aux vétérans de l'Irak, de l'Afghanistan ou du Koweït.

Ferdinand Foch  (second de droite)
Par tradition, il y a deux minutes de silence chaque année à onze heures, le onzième jour du onzième mois. C'est à cette date, en 1918, que l'armistice a été effectif. L'historien Josef Turek de l'Institut d'histoire militaire détaille les circonstances de cet épisode historique :

« L'armistice a été conclu entre les Etats de l'Entente victorieux et ceux de la Triple Alliance le 11 novembre à 5h15, heure de Paris. Les généraux alliés et allemands se sont réunis dans un wagon-restaurant provenant du train de l’Etat-major du maréchal Ferdinand Foch, en forêt de Compiègne. C'est ici que l'armistice est signé entre le maréchal Foch et le représentant du gouvernement allemand Mathias Erzberger, avec une application sur le front fixée à onze heures, le onzième jour du onzième mois : trois chiffres symboles de cette victoire. »

En l'honneur des anciens combattants, le Jour du souvenir connu aussi comme Jour de l'Armistice, Veterans Day ou Remembrance Day est observé depuis 1919 au Royaume-Uni, en France, aux Etats Unis et dans d'autres parties du monde. Dans la Tchécoslovaquie d'après-guerre, le 11 novembre n'a pas été retenu comme une date mémorable. Est-ce parce que cette journée est restée dans l'ombre du 28 octobre, date de la fondation d'un Etat indépendant, la Tchécoslovaquie, ou parce que les soldats tchèques avaient combattu des deux côtés du front de la Grande Guerre ? Explications avec l'historien Ivan Šedivý de l'Institut Masaryk :

Zborov
« La naissance de la République a quelque peu relégué au second plan la mémoire de la guerre. Le sentiment de joie a été plus fort que le souvenir de la guerre. En plus, pour les légionnaires, c'était le 2 juillet, une date marquante commémorant la bataille de Zborov. Il ne faut pas oublier non plus que pour la population d'Autriche-Hongrie, la guerre ne s'est pas terminée le 11 novembre, mais le 4 novembre, date de signature de la paix séparée avec les puissances de l'Entente. Ceci explique les raisons pour lesquelles le 11 novembre n'a pas été considérée dans la mémoire collective comme une journée mémorable. »

Le nombre des soldats tchèques tués pendant la Première Guerre mondiale a été le plus élevé par rapport à tous les autres conflits qui suivront : dans cette guerre, les pays tchèques d'Autriche-Hongrie ont perdu près de 150 000 soldats, ainsi que le rappelle l'historien Šedivý :

Photo: Archives de Radio Prague
« Le nombre des pertes tchèques estimées - car l'armée autrichienne ne distinguait pas la nationalité d'origine de ses soldats – s'élève à près de 138 000, en 1917. A la fin de la guerre, les pertes ont dépassé le chiffre de 150 000. Près de 5000 légionnaires combattant en France, en Italie et en Russie y ont laissé la vie. Derrière ces chiffres froids des statistiques se cachent des moments dramatiques et des destins mouvementés qu'aucun chiffre ne peut décrire... »

Pendant la Seconde Guerre mondiale, 25 000 soldats tchécoslovaques ont trouvé la mort sur les fronts Est et Ouest. Emil Vašek est l'un des 2200 pilotes tchécoslovaques ayant servi dans la Royal Air Force au sein du 310e escadron. A 90 ans, il ne manque aucune des cérémonies commémoratives annuelles :

Photo: CT Brno
« J'ai combattu sur le front occidental, j'ai été engagé d'abord dans la bataille de France et après la capitulation de Paris, j'ai fait partie des troupes débarquées en Grande-Bretagne. »

Des fleurs de coquelicot sont le symbole des vétérans de tous les conflits mondiaux du XXe siècle. L'historien Turek rappelle d'où vient cette tradition :

John McCrae
« Le lieutenant-colonel canadien John McCrae, un médecin militaire, attristé par la perte de l'un de ses meilleurs amis, a composé en mai 1915 un poème : « Au champs d'honneur, les coquelicots sont parsemés de lot en lot, après des croix... » Le poème est inspiré par la vue du champ de bataille des Flandres, l'un des plus terribles de la Première Guerre, qui se couvrait après le combat de fleurs rouges de coquelicots. Publié dans un journal, le poème trouve un large écho. Une Américaine, Moisa Michael, prend l'engagement de toujours porter un coquelicot rouge comme symbole du souvenir de toutes les personnes décédées. Aussi inspirée par le poème de McCrae, la Française Anne Guérin persuade la Légion britannique d'adopter le coquelicot comme symbole associé à la mémoire de ceux qui sont morts à la guerre. »

La principale cérémonie a lieu traditionnellement au mémorial national de Vítkov,  photo: CT24
En République tchèque, la Journée des anciens combattants sera commémoré pour la treizième fois cette année. La principale cérémonie a lieu traditionnellement au mémorial national de Vítkov qui abrite les restes des légionnaires ayant combattu aux côtés des Alliés et morts sur les champs de bataille à l'étranger.

La commémoration de la Journée du souvenir, tombant à la date anniversaire de la signature de l'armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale, est une tradition relativement récente. La Tchéquie a-t-elle appris à respecter les anciens combattants ainsi que les nouveaux vétérans des conflits en Afghanistan, en Irak et ailleurs ? L'historien Josef Turek ne le pense pas :

Photo: Kristýna Maková
« Le ministère de la Défense, l'Institut d'histoire militaire et bien d'autres organismes dont l'Institut pour l'étude des régimes totalitaires font tout pour que les anciens combattants bénéficient des hommages qui leur sont dus. Malgré cet effort, il y a un manque de consensus général à l'égard des anciens combattants. Pour ce qui est des nouveaux vétérans de guerre, les hommages qu'ils méritent ne leur ont pas été rendus. »

En République tchèque, le statut d'ancien combattant peut être attribué non seulement aux soldats, aux policiers militaires, mais aussi aux membres de la troisième résistance, c'est à dire aux personnes ayant combattu contre le régime communiste. La loi relative à la résistance anti-communiste est entrée symboliquement en vigueur le 17 novembre 2011.