La ‘normalisation’ du populisme : une tendance qui va se poursuivre?
Quelles tendances marqueront l’évolution mondiale au cours de cette nouvelle année ? Quelques éléments de réponse dans cette nouvelle revue de presse qui s’intéressera ensuite aux discours prononcés ces derniers jours par les hauts dirigeants tchèques. Elle rappellera aussi le 20e anniversaire de la monnaie européenne et se penchera sur les résultats de la dernière enquête de l’agence Eurobaromètre. Quelques mots, enfin, au sujet de la situation du cinéma tchèque.
« Durant les deux dernières années, on a vu s’imposer dans les systèmes démocratiques du monde entier des politiciens qui, récemment encore, auraient été considérés comme des extrémistes. On assiste à une ‘normalisation’ du populisme, une tendance qui s’approfondira cette année. Les partis de centre-gauche et de centre-droite traditionnels sortiront probablement affaiblis des élections au Parlement européen en mai prochain, qui confirmeront le renforcement des eurosceptiques, toutes couleurs confondues. Or, le fossé entre les camps des ‘mondialistes’ et des ‘nationalistes’ devient un conflit déterminant de la politique occidentale. Ce n’est pas un phénomène négatif en soi, car il traduit une confrontation politique authentique entre différentes visions du monde sur laquelle toute démocratie doit reposer. »
Or, présenter des propositions attrayantes pour les larges masses constitue un grand défi à relever pour les défenseurs de la mondialisation, de l’intégration de l’Europe, des valeurs libérales. L’auteur du texte estime qu’il y a donc lieu de suivre attentivement en 2019 les démarches du président français Emmanuel Macron, car « ses propositions européennes vont à contre-courant de l’esprit nationaliste de l’époque ». Il s’interroge également :
« Emmanuel Macron sera-t-il capable d’appliquer ses propositions et de trouver pour cela des alliés en Europe? Après la vague de révolte qui s’est levée contre lui en France, parviendra-t-il à se débarrasser de l’étiquette de président arrogant des riches pour convaincre les électeurs moins bien lotis ? »
Lorsque les hauts dirigeants s’adressent à la nation
« Les politiciens devraient laisser les gens tranquilles au moins pendant les fêtes de Noël. C’est pourtant le contraire qui se produit », peut-on lire dans une note publiée sur le site de l’hebdomadaire Reflex en rapport avec les discours prononcés, tout d’abord le 26 décembre, par le président de la République Miloš Zeman, puis, le Jour de l’An, par les chefs des deux chambres du Parlement, Jaroslav Kubera et Radek Vondráček. Son auteur précise à ce propos :« Miloš Zeman a décidé, il y a quelques années déjà, d’abolir la tradition des discours du Jour de l’An, pour s’exprimer pendant les fêtes de Noël. C’est donc pendant une période qui devrait être de paix et de repos qu’il communique aux gens des messages qui peuvent attiser les animosités. Le 1er janvier, la relève a été prise par les présidents du Sénat et de la Chambre des députés, tandis que le soir même, la Télévision tchèque diffusait une interview d’une demi-heure avec le Premier ministre Andrej Babiš. Mais à quoi bon et pourquoi ces trois messages prononcés en un laps de temps si court ? On n’est quand même pas en temps de guerre ou de mobilisation. »
L’auteur considère que tout ceci ne pourra que contribuer, paradoxalement, à une division plus profonde encore de la société tchèque et à des polémiques très animées sur les réseaux sociaux. Pourtant, comme il le souligne, « chaque citoyen tchèque mérite qu’une trêve soit mise aux disputes et aux proclamations politiques, surtout qu’il y en aura encore beaucoup à l’approche des élections européennes ».
Les 20 ans de l’euro
Le quotidien Lidové noviny a rappelé le 20e anniversaire de l’existence de la monnaie unique européenne en constatant :« L’euro est un projet certainement réussi. Son succès réside dans son existence même. Il suffit de rappeler combien de faux prophètes, particulièrement nombreux en Tchéquie, lui prédisaient sa fin. Toutefois, en dépit de toutes sortes de drames et de crises, l’euro a survécu et constitue une monnaie crédible. En Tchéquie, on dit souvent que l’euro est un projet anticipé mis sur pied beaucoup trop tôt. Il s’agit d’une hypothèse discutable sur le plan économique, mais pas d’un point de vue politique. L’euro est le fruit d’une certaine vague d’optimisme et d’enthousiasme vis-à-vis de l’intégration, liée à la fin de la guerre froide. Depuis le début de la décennie écoulée, on voit s’imposer en Europe le scepticisme, la prudence et les égoïsmes nationaux. Pour cette raison, aujourd’hui, tout comme il y a dix ans, un projet grandiose comparable à l’euro ou à Schengen ne réussirait pas ».
Evoquant également des faiblesses et des réserves concernant l’euro, l’auteur estime que celui-ci n’est pas encore devenu « la monnaie de l’Union européenne », comme espéré. La Pologne, la Hongrie, la Tchéquie, la Suède, le Danemark, la Croatie, la Roumanie et la Bulgarie sont les pays absents de la zone euro. Mais ce constat découle plus de leur volonté et de leur réticence, comme dans le cas de la Tchéquie, que d’entraves qui leur seraient faites.
Ce que l’Eurobaromètre a dévoilé
Les Tchèques craignent les menaces qui ne les touchent pas directement, tandis que celles qui sont réelles les laissent indifférents. Telle est une des conclusions à tirer d’une récente enquête de l’agence Eurobaromètre qui a examiné les opinions des habitants des pays membres de l’Union européenne sur les problèmes la concernant. D’après le journal en ligne Deník Referendum, ses résultats ont jeté une lumière peu flatteuse sur l’état du débat publique en République tchèque. Le texte consacré à ce sujet explique :« Selon les Tchèques, ce sont la migration et le terrorisme qui menacent le plus le continent européen. Ces questions les inquiètent davantage que les habitants de pays comme la Suède, l’Espagne, l’Allemagne, la France ou la Belgique, qui y sont pourtant réellement confrontés. En effet, il n’y aurait pas en Europe d’autre population pour laquelle le terrorisme représenterait une plus grande menace que pour les Tchèques. Les changements climatiques, en revanche, ne les préoccupent guère. »
Deník Referendum constate que les Tchèques n’arrivent toujours pas à sortir de l’ombre de l’ex-président Václav Klaus, qui a alimenté chez eux un fort climatoscepticisme et le refus d’une « politique verte ». Et ce en dépit du fait que le coup d’envoi de révolution de velours en 1989 a été donné, dans une certaine mesure, par des protestations d’ordre écologique dans le nord de la Bohême. Le journal rapporte enfin que la contestation des changements climatiques par une grande partie de la société tchèque serait également le fruit d’une faible formation environnementale dans les écoles.
Le cinéma tchèque n’est plus ce qu’il était
La situation du cinéma tchèque n’est pas très favorable. C’est le constat fait par le quotidien Mladá fronta Dnes qui porte un regard sur l’année écoulée et qui indique :« En 2018, une soixantaine de films nationaux, longs métrages et films documentaires, sont sortis dans les salles en Tchéquie. Malgré ce nombre impressionnant qui nous range aux côtés des puissances cinématographiques, aucun de ces films n’a suscité un intérêt particulier des spectateurs et de la critique tchèques, et encore moins à l’étranger. Aucun candidat tchèque, par exemple, ne figure parmi les neuf finalistes qui se disputeront l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. De même, le cinéma tchèque n’a pas été récompensé lors de la récente remise des prix du cinéma européen. A noter en outre que les films tchèques ne sont pas très fréquentés et appréciés par le public du pays d’origine, un seul parmi eux, une comédie romantique, ayant été vu par plus d’un demi-million de spectateurs. »
Le journal rappelle que Kolya réalisé par Jan Svěrák est le dernier film tchèque à avoir obtenu, en 1996, un Oscar.