Les idéaux sur lesquels repose la République tchèque

Le Sénat de République tchèque a accueilli, lundi et mardi, une conférence intitulée « Les idéaux sur lesquels repose la République tchèque ».

Le thème traité était très vaste, à commencer par les idéaux sur lesquels Tomas Garrigue Masaryk avait créé la Tchécoslovaquie, en 1918. Des intervenants ont cherché à savoir où en étaient aujourd'hui ces idéaux, ce qu'il en restait après 40 ans de régime communiste, comment la nouvelle démocratie s'était acquittée de la totalité, et comment elle avait témoigné sa reconnaissance à ceux qui ont lutté contre la dictature. Bref, comment vivent les opposants au régime, d'une part, et les communistes et les anciens agents de la police secrète, la StB, de l'autre, quinze ans après la révolution de Velours?

Selon Jan Kalous, de l'Institut de documentation et d'enquête sur les crimes du communisme, l'une des priorités de l'Etat qui a édifié la démocratie après la chute du régime communiste était de punir en conséquence les auteurs des crimes les plus graves. La réalité est cependant autre:

"Le bilan des dix ans des travaux de l'Institut d'enquête et de documentation sur les crimes du communisme, c'est une série de succès mais aussi d'échecs. L'Institut a poursuivi 187 personnes. Dans dix-huit cas, le tribunal a constaté qu'un crime avait été commis. Or, un seul haut responsable communiste a été condamné et jugé, Karel Hofman."

Comment vivent les anciens agents de la StB? Jaroslav Spurny, journaliste de l'hebdomadaire Respekt et spécialiste de la question, souligne que, matériellement, certes, très bien, mais que le principal est leur pouvoir actuel:

"Il faut surtout s'interroger sur la quantité du pouvoir politique et économique qui leur reste encore aujourd'hui. Car dans une démocratie naissance comme celle de la République tchèque, le pouvoir économique influence énormément le pouvoir politique, et tant que le pouvoir économique est entre les mains des anciens de la StB, les méthodes utilisées sont les fraudes, la corruption et le clientélisme."

Radek Schovanek, du Centre de documentation tchécoslovaque, a parlé des avantages dont jouissent les anciens officiers de la StB:

"En février 1990, la StB a été supprimée, on a mis fin à l'ère de la police totalitaire. Qu'est-ce que cela a signifié pour les collaborateurs? Des pensions élevées et une série d'avantages. Plus alarmant est le fait que l'on se soit contenté de la loi de lustration et que l'on n'ait pas ouvert les archives pour connaître les vrais collaborateurs de la police politique. Dix ans après la révolution de Velours, les deux tiers des 12000 anciens membres de la StB occupaient encore des postes importants, y compris dans l'armée et la police. Quinze ans après la révolution de Velours, la République tchèque est le seul pays du groupe de Visegrad à ne pas avoir une institution qui rendrait accessibles les documents de l'ancienne police politique. Espérons que la nouvelle loi sur les archives, qui entre en vigueur dès le 1er janvier 2005, permettra des recherches détaillés sur notre passé totalitaire."