Lundi, grand jour de grève(s) en Tchéquie
Un peu plus de 7 200 écoles maternelles, primaires et secondaires participent à la grève qui se tient en Tchéquie ce lundi. Dans de nombreuses entreprises de différents secteurs aussi, l’activité a été partiellement interrompue. Mais soucieux de réduire l’endettement du pays, le gouvernement, selon son chef Petr Fiala, n’entend pas « céder à la pression et renoncer à ses efforts pour améliorer les finances publiques ».
Globalement insatisfaites des moyens accordés par le gouvernement à l’éducation, un sous-financement - à leurs yeux - dont elles redoutent qu’il entraîne une détérioration de la qualité de l’enseignement, environ trois quarts des écoles du pays, ce lundi, ont gardé leurs portes fermées ou ont fonctionné en régime partiel, avec alors seulement certaines heures de cours supprimées ou en proposant un programme de remplacement à leurs élèves.
Dans la majorité des établissements en grève, même dans ceux restés ouverts, les cantines n’ont servi aucun repas, et ce, cette fois, pour protester contre les mauvaises conditions salariales des personnels non enseignants. Selon les syndicats, il s’agit du plus grand mouvement social dans le secteur de l’éducation de ces trente dernières années. Toutefois, malgré cet important mécontentement, dès mardi matin, toutes les écoles retrouveront leur régime habituel.
Les manifestations de ce lundi ne concernaient pas seulement les écoles. Dix syndicats avaient décrété une grève pour protester à la fois contre le plan de consolidation budgétaire dont les mesures commenceront à être appliquées dès le 1er janvier prochain et contre le projet de réforme des retraites, la non-augmentation des salaires dans le secteur public, les coûts élevés de l’énergie ou encore la forte inflation. Le mouvement touche également les grandes entreprises : à Mladá Boleslav, la production s’est ainsi arrêtée pendant deux heures dans les usines du constructeur automobile Škoda Auto, un des plus grands employeurs en Tchéquie.
« Je suis venu exprimer mon désaccord absolu avec le gouvernement de monsieur le Premier ministre Petr Fiala. Je pense que c’est un gouvernement composé d’incapables, d’incompétents et d’arrogants qui mènent le pays à sa perte. Je suis là pour dire mon déasaccord et soutenir les revendications des syndicats », a ainsi expliqué cet homme d’une soixantaine d’années, qui participait à la manifestation qui s’est tenue en début d’après-midi sur la place Malostranské náměstí, dans le centre historique de Prague.
Un rassemblement qui n'a mobilisé que quelques milliers de personnes, avec des revendications très vagues. Un des principaux reproches adressés à la coalition gouvernementale de centre-droit est l’absence de dialogue social.
Très critique au sujet des grèves, tout en soulignant qu’il s’agissait d’un droit qu’il respectait, le Premier ministre conservateur, Petr Fiala, qui s’est longuement exprimé lundi matin, a, lui, regretté que les syndicats « tiennent tout le pays en otage » et répété qu’il n’avait pas l’intention de « se détourner d’un avenir prometteur » :
« Contre quoi les syndicats protestent-ils ? Contre le plan d’assainissement et la réforme des retraites. Mais soyons clairs : le plan d’assainissement est absolument essentiel si l’on veut disposer de finances saines, si l’on veut avoir un avenir prometteur et si l’on veut cesser de vivre dans l’endettement. Notre dette nous coûte énormément d’argent chaque année. Au début de l’année prochaine, nous paierons près de 100 milliards de couronnes (un peu plus de 4 milliards d’euros) pour son seul service. Cela ne peut plus durer. Nous devons tous prendre conscience de ce que nous pourrions faire d’autre et de plus utile avec cet argent, par exemple construire des écoles, des routes et bien d’autres choses dont notre pays a absolument besoin. Nous devons faire en sorte que le pays cesse de s’endetter, et le plan d’assainissement est un moyen clair d’y parvenir. »
Et concernant la reforme des retraites, encore à l’état de projet et dont une des conséquences pourrait être le report de l’âge de départ à 68 ans, le chef du gouvernement, qui a estimé que « certaines choses, même si elles ne soulèvent pas d’applaudissements, sont nécessaires », a gardé le même ton, très ferme :
« Cela fait des années que nous parlons dans ce pays d’une réforme des retraites. Elle figurait dans les programmes de tous les gouvernements précédents, mais aucun d’entre eux n’a eu le courage de l’entreprendre. Nous, nous avons ce courage, et cette réforme, nous la mènerons à bien. Non pas parce que nous pensons que c’est une bonne idée, mais parce que c’est une nécessité. Et tous ceux qui pensent un peu à l’économie, à la politique sociale ou à l’avenir de ce pays, le savent parfaitement. Si nous n’entreprenons pas cette réforme, nous n’aurons pas les moyens à l’avenir de verser des pensions dignes de ce nom. Et cela concerne tout aussi les seniors aujuourd’hui que les prochaines générations qui, un jour, partiront elles aussi à la retraite. Donc si les syndicats disent ‘non’ à la réforme des retraites, cela signifie que les générations futures ne les intéressent pas et qu’ils sont indifférents à leurs perspectives. »
Confronté à la critique et à une atmosphère globalement morose, après deux ans aux affaires, le gouvernement de Petr Fiala, composé de cinq partis politiques aussi différents que les conservateurs de l’ODS, les chrétiens-démocrates ou encore les Pirates, continue néanmoins de faire preuve d’unité et semble avoir les reins suffisamment solides pour pouvoir faire front. Et les perspectives économiques un peu plus réjouissantes annoncées pour 2023 devraient l’aider à surmonter cette vague de mécontentement.