Nicolas Sarkozy à Prague : « Les impôts plus bas des nouveaux pays de l'UE sont un élément du dynamisme »
De passage à Prague après un détour par Budapest, le ministre français de l'Economie et des Finances a reconnu aux nouveaux membres de l'UE le droit de pratiquer la concurrence fiscale, à condition qu'elle soit loyale.
« Je suis un vieillard ici... Le Premier ministre a 35 ans, le ministre des Finances ne les a pas encore atteint, et le vice-Premier ministre en a 33. Je n'en ai vu que trois, mais mon moral a baissé... Alors quand ils m'ont dit poliment que moi aussi j'étais jeune, je leur ai répondu qu'effectivement j'étais un 'quadra', mais je ne leur ai pas dit que je n'en avais plus que pour un mois. »
La visite de Nicolas Sarkozy intervenait quelques semaines seulement après ses déclarations qui avaient provoqué de vives réactions de Prague à Tallin. Le ministre français de l'Economie et des Finances avait en effet suggéré de cesser d'attribuer des fonds structurels européens aux pays qui pratiquent le dumping fiscal pour attirer les entreprises sur leur territoire. Rejetées en bloc par les dix nouveaux membres de l'UE et critiquées par la Commission européenne, les « menaces » du futur président de l'UMP avaient été mal accueillies en République tchèque, où il a dû mettre de l'eau dans son vin :
« Je n'ai jamais suggéré cela. Il est normal qu'il y ait de la concurrence entre les pays européens. Et que les pays nouvellement dans l'UE aient des impôts plus bas que les nôtres, c'est un élément du dynamisme. Simplement, il faut le comprendre, la stratégie fiscale tellement aggressive qu'elle consisterait, comme l'ont fait certains pays, à supprimer les impôts, est une erreur. C'est une erreur pour ces nouveaux pays, parce que s'il n'y a pas d'impôts, il n'y a pas de budget, et s'il n'y a pas de budget, on ne peut pas faire face aux dépenses pour les services publics, pour la santé, les retraites, les autoroutes, les transports. Et c'est une erreur également parce que la logique de l'Europe c'est la concurrence loyale, ce n'est pas la concurrence déloyale. J'ai parlé longuement de cette question avec le Premier ministre tchèque, et ce matin avec le Premier ministre hongrois. Chacun m'a dit qu'il était exactement sur la même ligne, qu'ils considéraient qu'il n'était pas sain d'avoir une politique fiscale tellement aggressive que cela supprimait l'impôt sur les sociétés. Et je le dis d'autant mieux ici que la Tchéquie aujourd'hui souffre des délocalisations, comme un certain nombre de pays de l'Europe de l'ouest, avec la Slovaquie et avec l'Ukraine. Donc nous avons choisi de plaider pour une concurrence loyale, et pour une politique raisonnable. »
Les interlocuteurs de Nicolas Sarkozy à Prague - tous membres du gouvernement, le président Klaus ayant annulé leur entretien - ont pourtant rejeté toute idée d'harmonisation de la fiscalité sur les sociétés en Europe, persuadés, comme la majorité des chefs d'entreprise et économistes tchèques, que la principale cause des délocalisations est le coût de la main d'oeuvre.Le vice-Premier ministre Martin Jahn, comme lors de son entretien quelques semaines auparavant avec le secrétaire d'Etat français au budget Dominique Bussereau, s'est déclaré convaincu qu'une telle harmonisation n'aiderait pas l'économie européenne et handicaperait certains pays membres plus qu'autre chose.
Français et Tchèques se sont en revanche entendus pour promouvoir un système commun de calcul des assiettes fiscales de chaque pays, afin de mieux pouvoir les comparer.