Coronavirus : bien qu’au bord de la rupture, les hôpitaux tchèques parviennent encore à faire face
Alors que la République tchèque fait toujours partie des pays les plus durement touchés par l’épidémie de Covid-19, de nombreux hôpitaux, en province plus particulièrement, se retrouvent de nouveau dans une situation critique. Une aide de l’étranger n’est cependant pas envisagée.
En temps normal, c’est-à-dire lorsque le coronavirus ne sévit pas, environ 300 personnes meurent chaque jour en République tchèque. Depuis la mi-octobre, à un moment où la deuxième vague de l’épidémie était encore en phase ascendante, elles sont en moyenne une centaine de plus chaque jour. Rapportés à sa population (10,7 millions d’habitants), que ce soit en termes de mortalité avec un peu plus de 13 200 décès depuis le début de l’épidémie en mars dernier, ou encore de nouvelles infections, avec des pics à plus de 17 000 cas la semaine dernière et un taux de positivité des tests de dépistage depuis le début de l’année régulièrement supérieur à 40%, les chiffres confirment que la République tchèque compte parmi les pays les plus frappés.
Logiquement, les hôpitaux se retrouvent de nouveau sous pression, plus encore même qu’à l’automne dernier, où la situation était déjà critique. Selon les données disponibles ce lundi matin sur le site du ministère de la Santé, près de 6 600 personnes sont actuellement hospitaliées en République tchèque en raison du Covid-19 ou d'une affection liée à la maladie, parmi lesquelles 1 100 sont placées en réanimation ou en soins intensifs. C’est certes un peu moins qu’en fin de semaine dernière, mais cette légère baisse ne marque pas encore de tendance positive, comme ne s’en est pas caché le vice-ministre de la Santé, Vladimír Černý, chargé de la coordination nationale des soins intensifs :
« Nous atteignons effectivement certaines limites en termes de capacité de prise en charge des patients. La principale de ces limites est la pénurie de personnel. »
Plus concrètement, en fin de semaine dernière, plus de 1 300 médecins, 3 360 infirmières et 2 650 aides-soignantes et autres professionnels de la santé étaient contaminés dans le pays. Plus encore dans les régions qu’à Prague, la majorité des hôpitaux et centres de soins déplorent une importante pénurie de personnel. Dans certains endroits, les soldats prêtent désormais main forte. Directrice d’une clinique de l’Hôpital universitaire d’Ostrava et membre du parti d’opposition ODS, où elle est chargée des questions relatives au domaine de la santé, Zdenka Němečková Crkvenjaš estime qu’un point de rupture a d’ores et déjà été atteint :
« Je n’arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement, à la mi-décembre, à un moment où la situation s’améliorait, a assoupli les mesures des restriction tout en sachant parfaitement ce qui allait se produire en janvier. Et c’est ce qui se passe aujourd’hui. Les responsables le reconnaissent eux-mêmes : nous assistons à l’évolution attendue. Cela n’a vraiment aucun sens, d’autant moins quand je les entends dire que les hôpitaux qui procéderont à des opérations qui étaient planifiées mais qui peuvent être reportées, seront sanctionnés. Je peux vous dire qu’à Ostrava, nous sommes déjà contents d’être encore en mesure de fournir les soins les plus urgents. Les hôpitaux à Prague sont peut-être mieux lotis que nous, mais les régions sont dans une situation vraiment très difficile. »
Pour l’heure, les transferts de patients entre hôpitaux d’une même région ou d’une région à une autre restent néanmoins possibles. Ces dimanche et lundi, quatorze malades ont ainsi quitté l’hôpital saturé de Cheb, en Bohême de l’Ouest, pour d’autres établissements du pays diposant encore d’une capacité d’accueil suffisante.
La semaine dernière, le ministre de la Santé, Jan Blatný, a d’ailleurs rejeté la demande de la région de Karlovy Vary, en Bohême de l’Ouest, de transférer certains patients dans des hôpitaux de l’Allemagne voisine. Et dimanche, cela a été au tour du Premier ministre, Andrej Babiš, de déclarer qu’il n’y avait pas de raison, dans l’état actuel des choses, de solliciter une aide de l’étranger. Ce serait même « un non-sens » selon lui. Souvent critiqué comme nombre de ses homologues en Europe pour sa gestion de la crise, le chef du gouvernement estime que c’est d’abord aux Tchèques qu’il appartient de faire preuve de discipline pour éviter le pire :
« La situation n’est pas bonne et je ne peux que rappeler que le plus important est d’éviter les contacts. Moins il y aura de contacts entre les gens, moins le virus se propagera. Je les appelle aussi à respecter les trois règles de base : se laver les mains, porter le masque et respecter les distances. »
Malgré tout cela, le gouvernement n’envisage pas de mettre en service les deux hôpitaux de campagne construits à Prague et à Brno à l’automne. D’abord là encore en raison de la pénurie de personnel, mais aussi parce que les deux sites pourraient servir de centres de vaccination.